LA GRANDE GUERRE 1914-1918

LA GRANDE GUERRE ANNÉE 1914

1914

Les mobilisés se portent aux frontières sur les champs de bataille de Belgique, de France, de Serbie et de Russie, pendant que les grandes flottes anglaises et françaises traquent en mer les cuirassés corsaires allemands.

Le plan Schlieffen d’encerclement des armées françaises échoue à la bataille de la Marne. Les Autrichiens ne peuvent éliméner les Serbes et contiennent de toutes leurs forces la ruée des Russes en Galicie. Les Russes, battus par Hindenburg à Tannenberg, ouvrent en Arménie un front du Caucase, contre les Turcs, entrés dans la guerre aux côtés de l’Allemagne. Français, Anglais et Japonais s’emparent de toutes les possessions allemandes outre-mer.

Août 1914 : la déclaration de guerre à Munich. La foule entonne Die Wacht am Rheim. Parmi eux un jeune marginal autrichien : le futur caporal Adolf Hitler. Engagé volontaire dans l’armée bavaroise, il connaîtra le feu à Ypres.

 AOÛT 1914

SARAJEVO : UN ATTENTAT QUI FAIT SAUTER L’EUROPE

 Le 3 août 1914, le baron de Schön ambassadeur d’Allemagne à Paris, fait atteler pour se rendre à L’Élysée, porteur d’une déclaration de guerre de l’empereur Guillaume II à la République française. Depuis l’attentat commis par un terroriste serbe bosniaque contre l’archiduc héritier d’Autriche Francois-Ferdinand et son épouse la duchesse d’Hohenberg, le 23 juin 1914 à Sarajevo, le jeu des alliances a entraîné le pire. L’ultimatum lancé par Vienne au gouvernement serbe de Belgrade a entraîné la mobilisation de la Russie, puis de l’Allemagne, enfin de la France.

 

Le 28 juin 1914, Sarajevo. Gavrilo Princip, l’assassin du couple Habsbourg (à droite, entre deux policiers) est évacué sous les huées de la foule bosniaque, qui tente de lui faire un mauvais sort.

L’alliance franco-russe de 1893 se renforce dès avant l’entrée en guerre. Le général Joffre, commandant en chef de l’armée française, assiste avec Nicolas II aux grandes manoeuvres russes d’août 1913.

Du 20 au 22 juillet 1914, au plus fort de la crise diplomatique, le président Poincaré rend visite au Tsar à Saint Pétersbourg, visite en calèche, qui lui permet également de constater l’état d’avacement de la mobilisation russe.

Les Russes acheminent leurs propres troupes à la frontière grâce aux chemins de fer stratégiques, construits avec l’argent des épargnants français. Joffre, général en chef des armées françaises, est allé lui-même en Russie l’année précédente, avec le colonel Weygand et toute une mission militaire, afin de vérifier l’état de l’armée du Tsar.

Conrad von Höendorf, à la tête de l’armée autrichienne et Moltke II, du grand quartier-général allemand, ajustent leurs plans : le premier envahira la Serbie ; le second, la Belgique et le Luxembourg, pour exécuter le plan d’encerclement des armées françaises concu par Schlieffen.

La victoire sur la France, qu’ils jugent possible en six semaines, permettra d’affronter à pleine force le principal adversaire : les Russes.

 

L’état-major allemand de la grande époque (Aus grober Zeit). Dans la tradition prussienne, l’état-major vaut d’abord, sous la direction du Kaiser (haut à 1er à  gauche), par son esprit de corps, son professionnalisme extrême, ses plans précis et minutés. Sur le terrain, une grande liberté est néanmoins laissée aux chefs, comme le prouve durant la bataille de la Marne l’incompréhension entre le généralisme Moltke il (au centre), neuveu du vainqueur de 1870, et son subordonné Kluck (à droite).


La guerre vue par un caricaturiste français en septembre 1914. Le taureau allemand est aiguillonné sur deux fronts : par Marianne, montée sur le coq gaulois et par le Tsar, protégé de la Sainte-Russie. Une position bien réelle, que devait contrer le plan Schlieffen. Les autres puissances ont un rôle secondaire : l’Angleterre, qui ne vaut que par sa flotte ; l’Autriche, déjà au bord de l’engloutissement, qui face à l’embrouillement des nations balkanniques ; l’Italie, restée neutre malgré son alliance avec les puissances centrales, et réduite à jouer de la mandoline.

JUILLET-AOÛT 1914

L’INVASION DE LA BELGIQUE

Dès le 1er août, les troupes allemandes envahissent le Luxembourg. Un ultimatum est adressé à la Belgique, qui le rejette. Le 4 août, la violation du territoire belge entraîne l’entrée en guerre de la Grande-Bretagne. La Royal Navy, mobilisée la première, prend la mer pour protéger les ports belges.

Depuis le 28 juillet, le gouvernement de Vienne à déclaré la guerre à la Serbie. L’ordre de mobilisation générale, est signé par le Tsar le 29 juillet, est affiché sur les murs de Saint-Pétersbourg, comme dans tous les villages de Russie, le 31 juillet à l’aube. Les affiches convoquant les Français et les Allemands ont été collées le 1er août dans l’apres-midi. Douze millions d’hommes, dans toute l’Europe, vont prendre le sac et le fusil.

Des manifestations sont organisées dans les gares de Berlin, de Munich, de Saint-Pétersbourg, de Vienne, de Belgrade et de Paris, pour couvrir de pétales de fleurs les soldats partant en guerre. Ils s’engouffrent dans les wagons, embarquant aussi les chevaux, leurs canons et mitrailleuses. Les convois se succèdent jour et nuit. En deux semaines, les armées sont à pied d’oeuvre.

La flotte britannique en manoeuvre à Spithead en juillet 1914. Au premier plan, le croiseur Collingwood, fleuron de la Royal Navy. Quelques jours plus tard, la mobilisation de la flotte, principal atout de la G.B., marque l’entrée en guerre du pays. Contre toute attente, l’engagement décisif avec la Kriegsmarine n’aura pas lieu.

L’appel aux armes dans les rues de Liège. Chaque matin, les lanciers belges parcourent les rues de la ville, invitant à s’engager les hommes valides, respectant la tradition médiévale des hérauts d’armes.

La lecture de l’ordre de mobilisation à Londres (à gauche) et à Paris, boulevard du Palais (à droite). Dans les deux cas, loin de la fleur au fusil, l’angoisse domine.

Train de plaisir pour Berlin ou Parole London: dans les premiers jours d’août.

Train allemands manifestent sur les trains un obtimiste de façade, l’espoir vite démenti d’une guerre courte.

AOÛT 1914

UN AMIRAL ALLEMAND À CONSTATINOPLE

La flotte anglaise est supérieure à toutes les flottes du monde, avec 64 cuirassés, 10 croiseurs de bataille, 108 croiseurs légers. Grâce aux bases de Gibraltar, Malte et Alexandrie, elle tient la Méditerranée, où patrouille aussi la flotte française. Rien ne dit que la Turquie, qui tient les détroits de la mer Noire, va prendre parti pour l’Allemagne. Le 4 août, à 4 heures du matin, la ville de Bône en Algérie est bombardée par un croiseur corsaire allemand battant pavillon anglais. Un autre navire, aux couleurs russes, prend pour cible Philippeville. La flotte française couvre toute entière les convois de troupes sur le trajet Alger-Marseille.

Les Anglais sont à Malte. Le Goeben et le Breslau, commandés par l’amiral Souchon, franchissent les barrages, échappent aux patrouilles et se présentent devant les Dardanelles le 10 août. Les Turcs les accueillent d’autant plus volontiers que l’amiral Souchon, qui coiffe le fez à Constantinople, offre ses navires de la part du kaiser. La Turquie n’est pas encore en guerre. Elle vient pourtant de se placer du côté de l’Allemagne.

Le Goeben, devenu le Turc Yavuz Sultan Selim, en rade de Constantinople. Joyau des chantiers Blohm und Voss, presque neuf, il est opérationel depuis 1912, de la classe Moltke, il dispose de 10 canon de 280 mm, 12 de 150.

Coiffés du fez, les officiers allemands de la flotte turque en avril 1915. De gauche à droite: L’amiral Souchon, commandant en chef. Les capitaines Buchsellst et Busse, le lieutenant Wichlhausen et les Turcs Enver Bey et Hakki.

AOÛT 1914

LES ÉCHECS EN ALSACE

Le caporal Peugeot s’était fait tuer le 2 août, avant la déclaration de guerre par une patrouille allemande aventurée en territoire français à Joncherey, près de Mulhouse. Pour des raisons psychologiques, Joffre voulait reconquérir l’Alsace par surprise, ce fut un échec sanglant.

Dès le 8 août, les français étaient entrés dans Mulhouse, Ils devaient évacuer la ville deux jours plus tard. Du 14 au 18, nouvelle offensive sur la ligne de Sarrebourg à Mulhouse. La ville reprise le 19 août devait être à nouveau abandonnée. Les charges à la baïonnette se heurtaient au feu des mitrailleuses. L’artillerie allemande anéantissait les colonnes d’infanterie avant qu’elles n’entrent au contact des troupes bavaroises. Tous les généraux de l’offensive manquée d’Alsace étaient (limogés) tenus à résidence dans la région militaire de Limoges par Joffre.

Le 7 août, les Alpins francais du VIIe corps prennent le col du Bonhomme après un violent combat. Ils abattent immédiatement le poteau frontalier¸(Deutsches Reichi), trace de l’humiliation de 1870.

Ces retouvailles symboliques de la France et de l’Alsace sont reprises avec enthousiasme par la presse française. De belles images, qui semblent venger l’annexion des territoires de l’est en 1871, comme la venge l’entrée fleur au fusil des fantassins français à Thann le 7 août. À Mulhouse le lendemain, treize jours plus tard, c’est l’échec et le repli du gros des forces françaises.

Le caporal André Peugeot, du 44e régiment d’infanterie, est le premier mort de la guerre, il est abattu le 2 août par le lieutenant von Mayer.

Près de Mulhouse, le Kaiser passe en revue les troupes de la garde prussienne. La défense de l’Alsace est un succès politique pour le Reich. Mais en détournant à cet effet des divisions du front principal, les Allemands mettent en péril la réussite du plan Schlieffen.

AOÛT 1914

 LE MARTYRE DE LA BELGIQUE

Moltke, le général en chef allemand, veut prendre les forts de Liège avant de terminer la concentration des trois armées d’invasion qui doivent envahir la Belgique et le nord de la France. Selon le plan Schlieffen. Il échoue dans la nuit du 5 au 6 août. Les Allemands doivent amener des obusiers de 420 mm tractés par des engins à vapeur pour écraser les forts du 12 au 16 août.

Les soldats à casques à pointes marchent à pied les belges ayant saboté leurs chemins de fer. Ils parcourent 200 km en huit jours, du 16 au 25 août. Les trois armées de von Kluck, von Bülow et von Hausen ont bousculés la petite armée belge repliée sur Anvers, en l’absence des Anglais et devant l’insignifiance des renforts français.

Les sabotages et la résistance belge rendent les Allemands furieux: Ils brûlent Louvain, prennent partout des otages, fusillent les suspects, plus de cent personnes dans la petite ville d’Andenne. Les civils belges s’enfuient par Anvers, ou Churchill fait débarquer quelques unités de marine. La Belgique, qui compte sept millions d’habitants, est martyrisée par le passage d’une armée d’un million d’hommes.

Un redoutable obusier de 420 mm qui terrassent Liège. Les Autrichiens ont aussi prêtés à Bülow des 305 mm Skoda.

20 août 1914: les fantassins allemands entrent dans Bruxelles. Épuisés par leur marche forcée en territoire hostile, vivant dans la peur des francs-tireurs et des saboteurs, les fantassins de Kluck (1re armée) n’offrent pas la traditionnelle image de l’armée de fer prussienne.

Contrairement à leur ennemi, les fantassins belges bénéficient du soutien de la population, comme le prouve cette charmante jeune fille, leur vaillance n’empêche pas, le 17 août, un repli désespéré sur la poche d’Anvers.

L’armée allemande se déploie sur la grand-place de Bruxelle, le 20 août. Le commandement allemand veut frapper les esprits en faisant défiler 40 000 hommes dans un ordre parfait: l’infanterie, la cavalerie et les chariots de l’intendance (avec les premières cuisines roulantes).

Contraste des deux entrées. Les allemands occupent Gand, évacué par les Alliés le 11 octobre, devant une foule muette, sans même déranger le tramway.

Les Marines britaniques défilent le 27 août dans les rues d’Ostende, acclamés par la population belge, Ils tenteront en vain de sauver la poche d’Anvers.

Le drame des réfugiés belges. Une femme et sa fille à Londres. Elles viennent à peine de débarquer du train qui les amenait des ports anglais.

AOÛT 1914

EN PASSANT PAR LA LORRAINE

J’offre n’a pas renoncé à son plan de percée ver le Rhin : il lance le 18 août deux armées françaises, soit 600 000 hommes sur la Lorraine allemande, pendant qu’une autre armée doit pénétrer dans le Luxembourg belge. Il espère ainsi obliger les Allemands aventurés en Belgique à faire retraite.

Mal lui en prend: le 20 août, la Ier  armée de Castelnau échoue devant Morhange. Le XVe corps de marseille recule en désordre, le XXe corps de Foch se laisse prendre son artilerie. Les pertes sont considérables. Le 22 août, dans les Ardennes, les Français très supérieurs en nombre sont également débandés. L’armée Castelnau se replie vers le Grand Couronné de Nancy où elle résiste brillamment.

Mais la Loraine est envahie, martyrisée. Les Allemands, comme en Belgique, brûlent les villages et fusillent des otages, pour décourager les francs-tireurs. Nomeny et bien d’autres villages lorrains connaissent le martyre.

Moltke, qui vient de gagner la bataille de Charleroi, engagée le 23 août contre la Ve armée francaise, veut poursuivre. Mais il doit détourner quatre divisions de ses armées: il vient d’apprendre que les Russes sont vainqueur à Gumbinnen.

Lunéville, ville martyre de la bataille de Lorraine. La sous-péfecture est durement touchée par les combats. Le résultat du bombardement allemand du 25 août.

Une colonne de dragon et un convoi de ravitaillement automobile sur la grande-place de Lunéville.

Une fois le danger écarté, les retranchements allemands près de Lunéville attirent la curiosité des Lorrains, à l’instard de ces élégantes posant sur la côte des Vignes.

AOÛT 1914

LE DÉSASTRE DE TANNENBEREG

Deux armées engagées contre les prussiens, quatre en Galicie contre les Autrichiens : les russes ont tenu leurs promesses, il attaquent au quinzième jours de la mobilisation.

Ils franchissent la frontière allemande le 17 août, et bousculent un corps d’armée. Le général russe Rennenkampf entre en Prusse-Orientale.

Mais Ludendorff et Hindenburg, nommés par le Kaiser sur le front de l’Est, sont alertés par les messages radio envoyés en clair par les Russes. Au lieu d’attaquer la 1re armée de Rennekampf, qui marche sur Königsberg, ils prennent au filet la 1re armée de Samsonov, dont l’État-major portait des toasts à la prise de Berlin. A Tannenberg, du 26 au 29 août, ils font 92 000 prisonniers. Rennenkampf doit faire retraite sur les lacs Mazures, sauvant son armée de justesse.

En Galicie, deux divisions russes de cavalerie ont chargé au sabre vers Lemberg  (Lvov), talliant en pièces les unités de l’empereur François-Josepf 1er. Les Autrichiens se replient sur les Carpates fin septembre. Ils sont sauvés le 4 octobre par l’offensive austro-allemande de Mackensen, en direction de Lublin. Les Russes ont dû renoncer au bénifices de leur fougue. Ils sont désormais en position de défense.

Frères ennemis de l’armée russe, les généraux Samsonov et Rennenkampf. Rennenkampf cause le désastre de Tannenberg en différant son aide à Samsonov. Ce dernier échappe à la disgrâce par le suicide, le 29 août.

Désordonnée mais conquérante, l’avant-garde russe pendant les beaux jours de l’avancée en Prusse-Orientale ; le 20 août, ils triomphent à Gumbinnen.

Les fantassins russes passent un gué en territoire allemand. Le Tsar a mis en route le (rouleau compresseur russe). Mais les moyens de transport et de communication lui font cruellement défaut.

 

Tannenberg du point de vue allié: les Russes s’emparent d’une batterie allemande à Korschen, le 26 août. Bravoure indéniable, mais inutile face au plan du colonel Hoffmann, cerveau de la manoeuvre de Ludendorff et Hindenburg.

 AOÛT-SEPTEMBRE 1914

LA LONGUE RETRAITE DES FRANÇAIS

Depuis Charleroi, les Français se replient vers le sud. La Ve armée de Lanrezac, craignant d’être enveloppée après l’échec de la IVe armée  de Langle de Cary dans les Ardennes, abandonne la Meuse. Moltke veut vaincre en six semaines. Il a donné à ses troupes, le 27 août, l’ordre de poursuite. Les caques à pointe marchent vers Paris, protégés par les Lances des uhlans.

La 1re armée de von Kluck, à peine retardée au Cateau par un corps britanique, prend Cambrai, Péronne et s’incline ensuite au sud-sud-est vers Compiègne, l’armée von Bülow est arrêtée en Guise par Lanrezac, mais celui-ci doit encore battre en retraite et les Allemands franchissent l’Aisne pour marcher sur la Marne. 50 000 Français se laissent enfermer dans la forteresse de Maubeuge, qui finit par se rendre aux Allemands.

Le 31, von Cluck est à la Ferté-Milon, il veut envelopper les Français par le sud, prendre leur armée dans une nasse, de la Marne aux Vosges. A Château`Thierry, sur la Marne, il arrive trop tard. Les ponts ont sauté. Les Français, qui ont perdu 120 000 hommes en trois jours, ont réussi à s’échapper.

Le 2septembre, le général allemand ordonne à ses corps de pousser les Français loin de Paris, en direction du sud-est. Les colonnes s’infléchissent, prêtant le flanc à une contre-attaque venue de Paris. Le temps de la bataille de la Marne est venu.

Guillaume II (au centre) et son état-major pendant la marche sur Paris.

La retraite franco-britanique, 22 août-5 septembre 1914. 

Les français font sauter à temps les ponts sur la Marne : le 2 septembre, la compagnie 5/13 du 1re régiment du génie intervient une heure et quart avant l’arrivée des autos-camions de l’ennemi.

L’entrée des Allemands à Amiens le 31 août, ils défilent rue Jules-Barni, vers Paris. Au centre, des femmes réquisitionnées pour porter de l’eau aux envahisseurs.

SEPTEMBRE 1914

LE MIRACLE DE LA MARNE

Les fantassins fourbus de la retraite de Charleroi ont la surprise, en arrivant sur la Marne, d’y découvrir des troupes fraîches, venues de Lorraine, débarquées par chemin de fer pour former la VIe  armée de Maunoury. Celle-ci prend position sur l’Ourcq, affrontant, dès le 5 septembre, un corps allemand de von Kluck.

Joffre avait préparé sa contre-offensive depuis le 25 août. Gallieni l’avait informé que les clichés de l’aviation indiquaient un mouvement tournant des Allemands vers le sud-est. Les taxis de Paris avaient été réquisitionnés pour amener en renfort une brigade à Maunoury. Il était temps d’attaquer. Le 6 septembre, une offensive générale commence, de l’Ourcq aux marais de Saint-Gond, où les soldats de Foch résistent à la garde prussienne. Les français sont à 30 divisions contre 20. Joffre lance le corps éxpéditionnaire britanique dans un trou de 50 km, qu’une contremarche malencrontreuse, ordonnée à von Kluck par Moltke depuis son État-major trop éloigné de Luxembourg, a creusé entre les deux armées allemandes.

Les combats furieux, se déroulent du 6 au 9 septembre. Quand les Anglais passent la Marne, les armées allemandes reculent jusqu’à l’Aisne. Le 10 au matin, les lignes allemandes sont vides. Les français harassés repartent en avant. C’est la victoire !

Le généralisme Joffre, en septembre 1914. Joffre, c’est d’abord une certaine qualité d’impassibilité pendant les plus durs moments de la retraite, qui seule permet la victoire de la Marne.

 

Ce sont aussi les trains: malgré les accidents, l’usage du réseau ferré dans l’acheminement des renforts est d’emblée un élément clef de la guerre.

Aux trains de Joffre répondent les taxis de Galieni. Ce vétéran des guerres coloniales est un artisan majeur du succès des taxis.

Le 75 mm, atout majeur des français, en action dans les marais de Saint-Gond, entre le 7 et le 9 septembre. A ce moment, les français subissent pleinement la pression allemande. Le 75 démontre au cours de la bataille que ses qualités de tir surpassent celles du 77 allemands.

Une charge d’infanterie française pendant la bataille. La charge se fait dans les règles de l’art, baïonnette au canon, d’où les pertes énormes : 80 000 hommes.

 

Le 8 septembre 1914, après les terribles combats de Fère-Champenoise, les victimes de la bataille. Aucun bilan des pertes allemandes ne sera publié.

SEPTEMBRE 1914

CASTELNAU À NANCY

Sur le front de l’Argonne, des Hauts-Meuse et du Grand-Couronné de Nancy, les armées françaises étaient assaillies, en pleine bataille de la Marne, par deux armées allemandes qui voulaient forcer le passage de la Meurthe et de la Moselle. S’ils avaient réussi, le succès de Joffre à l’ouest aurait été compromis.

Mais Castelnau veillait à Nancy, avec sa IIe armée. Repoussant les bavarois, tenant indemnes les défenses du Grand-Couronné. Les soldats du XVe corps, recrutés à Toulon, Nice et Marseille, mal remis de la bataille de Morhange, comblaient le vide de l’armée du Kronprinz avait creusé entre deux armées françaises sur Revigny. A Verdun, Sarrail refusait d’évacuer la position et repoussait toutes les attaques Moltke, battu sur la Marne le 10 septembre, demandait à ses armées d’interrompre l’offensive sur Nancy. La ville était sauvée. Elle subirait pendant des années le tir de dépit d’une pièce allemande à longue portée, baptisé le (Long Henri).

Le général Édouard de Curières de Castelnau, commandant de la IIe armée. Après sa défense du nancy, il est promu grand-officier de la Légion d’honneur. On le retrouvera dans des rôles décisifs, sans qu’il ne devienne jamais maréchal de France.

 

Fin 1914, les Allemands attaquent dans les forêts d’Argonne. Tout au long de l’hiver 1914-1915, l’Argonne sera le lieu de combats acharnés.

Nancy martyrisée par les bombardements allemands. Les dégâts causés par les obus allemands les 9 et 10 septembre, dans une cour entre la rue Saint-Didier et la rue Saint-Nicolas.

SEPTEMBRE 1914

LA RETRAITE ALLEMANDE SUR L’AISNE

Les chevaux des cavaliers français n’ont plus de fers, les fantassins sont épuisés, les attelages manquent pour tirer les canons, pourtant Joffre a lancé son ordre de poursuite.

Les coloniaux tremblent de froid sous la pluie glacée. Les avions ne peuvent repérer sous les nuages bas les mouvements de l’ennemi. Ils ne peuvent savoir si les Allemands s’enterrent à la hâte sur les lignes hautes de l’Argonne et du Chemin des Dames. Les troupes rameutées de Lorraine, les cavaliers de Conneau, le XXe corps de Foch débarquent du chemin de fer pour déborder les Allemands par l’ouest, en Picardie. Mais Noyon et Saint-Quentin tiennent bon. De Craonne à Reims, les Allemands se sont retranchés et leurs obusiers lourds arrosent Reims. 500 civils tués. La cathédrale brûle.

Le nouveau général allemand Falkenhayn a gagné la bataille de l’Aisne, où ses troupes se retranchent, protégées par leur artillerie lourde. Un front nouveau s’est constitué de l’Aisne à la Somme. Les cavaliers alliés ne peuvent lutter contre le chemin de fer, que les Allemands utilisent pour amener rapidement des renforts. La seule chance des Français est de les déborder par l’ouest, dans la course à la mer.

Septembre 1914: les hussards français traversent un village, à la poursuite des Allemands en repli sur l’Aisne.

L’ultime phase du bombardement de Reims. Touchée le 18 et le 19 septembre par 40 obus de 220, la cathédrale s’embrase le 19 à 16 heures pour ne bientôt plus former qu’un vaste brasier. L’incendie, qui a pris dans les échaffaudages montés en 1913, emporte le trésor ecclésial, les peintures et les tapisseries.

5 octobre 1914: l’observation de la retraite allemande favorise le rôle de l’aviation. Les Français Frantz et Quénault, sur biplan Voisin, livrent le premier combat aérien de l’Histoire, en abattant un Aviatik.

OCTOBRE 1914

LA COURSE À LA MER

Falkenhayn jette dans la bataille 200 000 hommes, des troupes fraîches transportées par le rail en Belgique, afin de prendre Calais et Boulogne et d’attaquer le Nord. Le 9 octobre, Anvers est tombée sous le feu des pièces de 420. Lille a subi le même sort. La ligne de l’Yser est assaillie le 19 octobre. Joffre veut la tenir à tout prix, avec le concour des Belges, des Anglais et des renforts Français : les fusiliers marins de l’amiral Ronarc’h, les Sénégalais de Grossetti.

Les défenseurs rivalisent d’héroïsme. Les Sénégalais se font tuer avec bravoure. Il n’en reste que 411 sur 2 000. Les belges du colonel Jacques résistent jusqu’à la mort. L’amiral Ronarc’h dort comme ses matelots sur une litière de paille: Le passage de Dixmude, leur dit-il, doit être tenu par vous tant qu’il restera un fusilier marin vivant.

Dixmue est finalement abandonnée, mais non l’Yser : Les Français et les Belges s’y maintiennent, dans la boue humide. Pourtant, les renforts allemands arrivent sans cesse. Les Belges décident alors d’ouvrir les écluses de Nieuport, et d’innonder la vallée de l’Yser. Aussitôt, les Allemands arrêtent leur offensive: le 24, la première bataille de l’Yser est gagnée par les Alliés.

Un éclaireur algérien aux abords de l’Yser

Les fusiliers marins à Dixmude, par Charles Fouqueray. Dès les 24 et 26 octobre, les hommes de l’amiral Ronarc’h ont gagné sur les canaux et dans les champs inondés des Flandres leurs lettres de noblesse.

Partie en reconnaissance, cette patrouille belge d’Anvers n’a échappé à un fort parti allemand qu’au prix de lourdes pertes.

NOVEMBRE 1914

LE SAILLANT D’YPRES

Le Kaiser s’est déplacé en personne. Il arrive à 6 heures du matin le 1er novembre au château du Coquinage, près de Lincelles. Il veut à tout prix que le saillant d’Ypres disparaisse. Il a fait venir de Berlin une division de réserve de sa garde.

Les prussiens attaquent, avec les Bavarois. Devant eux, les fantassins du XXe corps de Foch. On ne peut plus compter sur les Belges : Ils ne sont plus que 20 000. Pourtant, ils se battent encore. Les Anglais ont pris position en force. Le 1er novembre pourtant, ils semblent ébranlés. Vont-ils lâcher prise ? Fosch parvient à persuader French de poursuivre. Une dernière attaque est conduite les 10 et 11 novembre avec acharnement par la garde prussienne, contre Ypres et Dixmude. La brigade belge Meiser subit les assauts pendant 72 heures consécutives, au rytme de quinze attaques chaque nuit.

Le 17, Falkenhayn doit reconnaitre son échec: il n’est pas parvenu à forcer le front allié. La course à la mer est gagnée par les Belges, les Britaniques et les Français. Mais ils doivent, comme les Allemands, s’enterrer.

Ypres en novembre: des fantassins de la VIe armée en observation derrière une meule de paille. Dissimulation prudence: même les ailes des moulins à vent terrorisent les Allemands, qui croient voir dans leurs mouvements des messages codés. Une nervosité à laquelle Ypres ajoute le massacre: près de 130 000 jeunes recrues périssent dans la bataille, surnommée le (massacre des innocents).

Des zouaves en embuscade près d’Ypres. C’est réellement au cours de ces combats qu’Africains et Nord-Africains font leurs preuves. Le système de tranchées commence à peine à s’organiser: une haie, un creux servent encore d’obstacle.

La défense du canal de l’Ypres, dans un dessin contemporain. Des combattants peut-être trop propre, c’est sur l’Yser que les hommes font connaissance avec leur compagne de quatre ans, la boue. Mais la violence de l’affrontement y est: Français et Belges y épuisent leurs forces, mais surtout le British Expeditionnaru Force, que la perte de près de 60 000 hommes réduit à son encadrement.

Systhème de tranchées côté Allemand, côté Alliés

OCTOBRE-NOVEMBRE 1914

LA POLOGNE À FEU ET À SANG

Le 20 octobre, alors que Falkenhayn tente de forcer la ligne de l’Yser, les Russes attaquent sur la Vistule, avec des troupes rendues disponibles par leurs succès de Galicie.

La boucle de la Vistule est devenue le centre des combats. Les divisions allemandes ont attaqué en direction d’Ivangorod. Les Russes du grand-duc Nicolas les prennent de flanc, et l’ennemi doit opérer une retraite précipitée.

Les Allemands regroupent leurs forces dans la région de (Thorn), sous le commandement de Mackensen. Le 11 novembre, ils marchent sur Lodz, pour surprendre l’aile droite des Russes, menacée d’encerclement. Mais ceux-ci contre-attaquent et le 23 trois divisions allemandes échappent de peu à la capture.

En décembre, c’est au tour des Russes d’Ivanov de connaître la défaite à Limanowa, devant Cracovie. Sur le sol glacé de Pologne et de Galicie, les adversaires n’ont pas encore creusé de tranchées. Ils se livrent une guerre de mouvement, jamais décisive. Les Russes disposent de trop peu de canons attelés pour pouvoir poursuivre. Les Allemands et les Autrichiens n’ont d’autre ambition que de protéger leurs frontières.

Une patrouille allemande tente de se réchauffer en Prusse-Orientale.

Un cuirassier allemand pris dans les neiges de Pologne.

Une section d’Alpins autrichiens dans les Carpates, à la fin de 1914. A à mi-décembre la IIIe armée autrichiennes a repris les cols, après la bataille de Limanowa où Conrad von Hözendorf a stoppé l’avance russe sur Cracovie.

Éreintés, ces Allemands se sont assoupis dans un hôtel de Prusse-Orientale.

FIN 1914 

LES CHEVAUX DE LA GUERRE

 Brusquement après la Marne, l’armée française s’apercoit qu’il lui manque 200 000 chevaux, sur l’effectif de 500 000 nécessaire pour continuer la guerre. Les shrapnels ont tué par dizaines de milliers les chevaux normands, angevins ou tarbais. Mais aussi les lourds animaux de trait de l’artillerie, du génie, et même du service de santé. En dehors de quelques enlèvements en camions commandés par Joffre, l’armée est en très largement hippomobile, rien ne peut se faire sans chevaux.

Les batailles du Nord, de la course à la mer, ont opposé des divisions de cavalerie: les cavaliers anglais d’Allenby étaient sur la Marne, les dragons de Vonneau et les cuirassiers de Mitry ont participé à la poursuite.

Il est vrai qu’ils ont combattu les Uhlans le plus souvent à pied et à la carabine: deux régiments de cavalerie (soit 1 000 hommes) avaient la puissance de fer d’un seul bataillon d’infanterie, mais ils étaient plus mobiles et disposaient de mitrailleuses montées sur des voiturettes à deux roues, tractées par quatre chevaux. Les carabiniers belges combattaient aussi à pied, comme les Uhlans de Guillaume II. Mais les cuirassiers au dépôt. Ils descendraient bientôt dans la tranchée.

Un train d’artillerie anglaise en août 1914. Sauf l’artillerie sur voie ferrée  (A.V.F.), les canons sont encore tractés par des chevaux.

Août 1914 : des chevaux crevés à Arracourt, pendant la Grande retraite. Chaque bataille est une hécatombe pour les chevaux et les troupeaux.

Les armées utilisent tous les substituts possibles aux chevaux, ici les Allemands se servent d’un éléphant pour le transport des matériaux. Commentaire ironique du photographe: (Est-ce que les Allemands manqueraient de moyens de locomotion ?)

Les cavaliers, reconnaissables à leurs lourdes bottes, finissent l’année dans les tranchées, ici, à Zillebeke en février 1915, des Français et des Anglais du 11 th Hussars (Prince Albert’s Own).

NOVEMBRE 1914

LA SURPRISE DE CONSTANTINOPLE

 Les Turcs rompent avec les Alliés et laissent l’amiral Souchon bombarder les ports russes de la mer Noire, Théodosia et Novorossisk. Le Bresleau et le Goeben créent la surprise en attaquant la Crimée. Les ambassadeurs allemands quittent Constantinople le 2 décembre. La guere sainte est aussitôt proclamée par le sultan.

Français et Anglais doivent se défendre contre les tributs Senoussis, qui sont les seules à entendre ce message en Afrique du Nord, dans les déserts du Sud de l’Égypte et de la Tunisie. Ni la Perse, ni l’Égypte ne lâchent l’Angleterre qui déploie les unités de l’armée des Indes à Alexandrie, pour garder le canal de Suez, et en Mésopotamie, où Bassorah est occupé. Le Khédive d’Égypte, germanophile, est déposé, remplacé par un sultan favorable à l’Angleterre, qui proclame l’état de siège. Bientôt, 100 000 soldats des Indes se consentrent sur le canal.

Les Russes attaquent dans le Caucase dès le 4 novembre. Ils marchent sur Van et Erzurum, dispersent les troupes kurdes au service des Turcs, avancent sur la route de Van en Arménie. Les Turcs commencent à massacrer les Arméniens et à percécuter les Chrétiens des différents cultes en Syrie et en Palestine. L’engagement des Turcs aux côtés de l’Allemagne a provoqué l’ouverture d’une deuxième zone de guerre en Orient.

Liman von Pacha. Général de division. Le chef de la mission allemande à Constantinople est également commandant et maréchal de l’armée turque.

 

Officiers et soldats de l’infanterie turque au début du conflit. L’image dément leur réputation d’indicipline, largement entretenue par les Alliés.

Novembre 1914 : la foule constantinopolitaine, contenue par la garde, se presse duvant la mosquée Fatih. Le cheikh uHslam vient de proclamer la guerre sainte.

Un type de vieux cuirassé turc, le Medjijie, la flotte turque, trop vétuse, ne pouvait inquiéter les ports russes. L’amiral Souchon, avec les redoutables Goeben et Breslau, a pratiquement forcé la main des turcs le 29 octobre, en décidant, avec Liamn von Sanders et le ministre de la Guerre Enver Pacha, d’attaquer en mer Noire.

FIN 1914

LES LIGNES MARITIMES ET COLONIALES

 La France et la Grande-Bretagne sont en 1914 des empires coloniaux et des puissances maritimes mondiales, qui doivent à tout prix garder la maîtrise des mers. Or l’Allemagne dispose d’une flotte de sous-marins dans sa base de Wilhelmshaven. Elle ne manque pas de points de charbonnage et de ravitaillement en pétrole pour sa flotte, en Chine et en Afrique, mais aussi en Amérique latine. L’Autriche-Hongrie, par sa base de Pola, menace l’Adriatique et la Méditerranée.

Une guerre inexpiable s’engage pour la conquête des océans et des mers. Les Japonais se chargent de s’emparer des bases allemandes en Chine. Les colonies allemandes d’Afrique sont attaquées. Les Français, ainsi qu’une partie de la flotte anglaise, assurent la sécurité de leur convois en Méditerranée. Mais la grande- flotte de l’Amiral Jellicoe a pour tâche essentielle d’empêcher les superdreadnoughtd allemands de quitter leur base de Kiel. La Royal Navy ne peut empêcher les croiseurs du Kaiser de couler des navires alliés sur toutes les mers du globe.

A Freetown (Sierra-Leone), le départ des coloniaux anglais pour Douala, au Cameroun allemand. Le port tombe en septembre 1914, mais la colonie résistera jusqu’au début de 1916.

Blessés hindous, médecin anglais témoins japonais: Tsing Tao préfigure en 1914 la Babel que sera Salonique, sur le front grec, en 1916. Du 7 septembre au 7 novembre 1914, 23 000 Japonais et une brigade britanique assiègent la forteresse de Tsing Tao, tête de la concession allemande de Kiao Tchéou, dans la péninsule chinoise du Shandong. Ce sera le seul véritable acte de guerre du japon, qui en profitera au traité de Versailles pour obtenir Shandong.

La flotte naissance des U-Boote à Wilhelmshaven. On est encore loin de l’apogée de 1917, quand plus de cent sous-marins croiseront en six flottilles différentes réparties de la Baltique (Libau) aux Dardanelles (Constantinople), de la mer du Nord (Wilhelmshaven, Emden , Ostene) à l’Adriatique (Pola).

DÉCEMBRE 1914

 LA BATAILLE DES FALKLAN

 Les croiseurs allemands patrouillaient en mer depuis août 1914, attaquant par surprise les bases ou les navires alliés. Le Scharnhorst et le Gneisenau avaient ainsi bombardé papeete, à Tahiti, le 22 septembre. Le 28 octobre, le croiseur Emden, naviguant sous pavillon russe et portant une quatrième cheminée pour se déguiser, coulait en rade de Penang le croiseur russe Yemtchoug et le contre-torpilleur français  Mousquet. Il était temps de purger les mers de ces corsaires, pensait l’Amirauté anglaise.

Le 9 novembre, au large des îles Cocos dans l’océan Indien, le croiseur australien Sydney mettait fin à la croisière de l’Emden. Le 9 décembre, à l’est du détroit de Magellan, l’escadre anglaise du vice-amiral Sturdee (sept croiseurs) accrochait les cinq croiseurs allemands du vice-amiral von Spee: pendant cinq heures, la bataille faisait rage. Le Gneisenau, le Schrarhorst, navire-amiral, et le Leipzig étaient coulés. Le Dresden et le Nürenberg parvenaient à s’enfuir malgré leurs blessures, mais le Nürnberg était poursuivi et succonbait dans la soirée. Quant au Dresden, il parvenait à doubler le cap Horn et à se perdre dans le Pacifique. L’Angleterre avait purgé les mers des corsaires allemands.

Le 9 novembre dans l’océan Indien: australien du Sydney sur le pont, juste après le duel avec le corsaire Emden. À l’arrière-plan, une des cheminées, détruite pendant l’action. Les homme de l’Emden, moins chanceux, sont fait prisonniers, sauf un petit groupe qui rejoint Constantinople au terme d’une mémorable équipée.

Falkland : le duel des Sturdee ( à Gauche ) et de Speer ( à droite ).

Trois vues de la bataille des Falkland, d’après les croquis d’un témoin. En haut, vers 21 heures la fin du Leipzig et la fuite du Dresden, milieu Les deux croiseurs de bataille de Sturdee, l’Invincible et l’Inflexible, rejoignent la chasse, Bas, le duel du Kent et du Nümberg, clos à 19 h 30 par la mort de ce dernier.

DÉCEMBRE 1914

LES RAIDS SUR L’ANGLETERRE

Les obus de l’escadre atteignent les maisons et les édifices publics. On compte plus de cent victimes civiles et plus de cinq cents blessés. Ce raid cause en Angleterre une intense émotion. On le califie de terroriste et contraire aux lois de la guerre.

Les Allemands multiplient les incursions dans le ciel britanique, lâchant des bombes. Le jour de Noël, sept hydravions anglais , embarqués à bord de croiseurs autour de l’île d’Heligoland, bombardent le port de Cuxhaven. Ils sont aussitôt pris pour cible par les canons de la flotte, poursuivis par des hydroplanes allemands, assistés de deux Zeppelins et de plusieurs sous-marins. Six sur sept des aviateurs anglais réussisent à rejoindre leur flotte, mais seule trois avions sont embarqués. Le 30 décembre, les aviateurs allemands bombardent Dunkerque. Désormais les raids aériens font partie du quotidien de la guerre et l’Angleterre n’est pas à l’abri des incursions ennemies.

Le raid de Scarborough: une maison touchée dans le Crescent.

Le restaurant et le buffet du Grand Hôtel, cible facile sur le front de la mer, sont ravagés. Par chance, les chambres du dernier étage avaient été libérées vingt minutes avant l’attaque, qui fait 17 morts et 123 blessés.

Le raid de Scarborough: la Kriegmarine a tiré aveuglèment plus de 100 obus sur la station balnéaire du Yorkshire, sans épargner même le vénérable château du XIIe siècles.

Le raid de Cuxhaven, le 25 décembre: un des trois hydravions de type Short qui ont échappé à la poursuite est embarqué à bord d’un croiseur porteur de la Royal navy.

FIN 1914

 LES TROUPES COLONIALES

À Marseille débarquent des troupes indiennes, destinées à renforcer le front anglais. L’armée des Indes a fourni 100 000 combattants pour garder l’Égypte. Elle a aussi débarqué dans le Golfe persique à Bassorah pour dominer la zone pétrolifère.

Les français lèvent des troupes noires à Dakar et dans les colonies africaines pour leur armée d’Afrique, qui se compose de régiments de tirailleurs. Les unités d’Afrique du Nord engagent des soldats musulmans et pieds-noirs dans les régiments de zouaves et de tirailleurs algériens, mais aussi de spahis et de chasseurs d’Afrique. Une division marocaine, confiée au général Humbert, a été levée par les soins de Lyautey. Tous les territoires coloniaux sont sollicités pour fournir des recrues soit au front, comme les Antillais, soit dans les unités de travailleurs comme les Indochinois, les Malgaches, les Réunionnais.

Des camps d’accueil et d’entraînement réservés aux troupes coloniales ont été construits à Fréjus et Toulon. Les officiers français accélèrent l’instruction pour faire monter les premières unités en ligne dès septembre. Un bataillon de Sénégalais participe à la bataille de Dixmude pendant la bataille de la Marne.

A Dakar, des volontaires sénégalais attendent l’ambarquement pour la France devant la résidence du gouverneur.

De même à Alger, les volontaires nord-africains prennent la mer pour la métropole. Le recrutement des coloniaux se fait sans difficultés, y compris chez les musulmans, que ne touche guère l’appel à la guerre sainte que lance en novembre leur ancien suzerain, le calife-sultan de Constantinople.

La guerre joyeuse: au camp de Fréjus. Loin de leur patrie, ces tirailleurs sénégalais trouvent encore le sourire autour de la popote.

Autre scène d’une veine très utilisée par la propagande: des Français distribuent des fruits aux indiens qui, de Marseille, gagnent par train le front du Nord.

L’autre visage de la guerre: des tirailleurs algériens mettent en terre un camarade tombé au feu. Pas de cercueil, dans la tradition musulmane.

SEPTEMBRE-DÉCEMBRE 1914

LA VAILLANTE SERBIE

L’armée serbe se défend avec acharnement contre les forces d’invasion autrichiennes. Fin août, les Autrichiens sont contenus sur les bords de la Drina. Ils s’acharnent à bombarder Belgrade, où les ruines s’accumulent, envoyant sur le Danube des monitors que l’artillerie serbe prend à partie et coule. A partir du 10 septembre, les Serbes débarquent sur la rive droite, obligeant les batteries autrichiennes à la retraite.

Les Austro-Hongrois ont beaucoup de mal à investir le Monténégro, où des bandes armées résistent pied à pied. Serbes et Monténégrins envahissent la Bosnie et marche sur Sarajevo en septembre. Ils assiègent Raguse. Ils ne se replient qu’à la fin d’octobre. Devant les renforts envoyés par Vienne. En novembre la Serbie est à nouveau agressée. Le 2 décembre, une armée austro-bavaroise de 250 000 hommes tente d’obtenir la décision et réussit aux prix de lourdes pertes à occuper Belgrade. Douze jours plus tard, la contre-attaque serbe du général Putnik les en chasse. Mais les Serbes souffrent des bombardements et plus encore d’une épidémie de typhus. On célèbre à Londres et à Paris le courage de la Serbie martyre.

La cavalerie serbe. Elle s’illustre le 10 septembre, en poursuivant les Austro-Hongrois en face de Belgrade, de l’autre coté du Danube.

Prisonniers autrichiens ramenés à Nils, après la grande victoire remportée par Putnik (en médaillon) à Sabac le 17 août. Les Serbes y ont anéanti trois régiments ennemis et pris 14 canons.

Victimes des représailles, des paysans serbes massacrés près de Loznica. Les dragons hongrois se distinguent dans les cruautés en vers la population civile.

Les victoires des Serbes août-décembre 1914

FIN 1914

LES FORTIFICATIONS DE CAMPAGNE ALLEMANDES

Sur les lignes crayeuses de l’Aisne ou granitiques des Vosges, dans le sable du Nord, les Allemands ont le temps de se retrancher, de creuser le sol et de mettre en place un système modèle de fortifications de campagne. Les deux lignes de tranchées, reliées par des boyaux, sont pourvues de nids de mitrailleuses, protégées par des blindages ou des toits bétonnés, à l’abri des obus. Des Stollen, vaste casernes souterraines, également bétonnées, abritent les fantassins à proximité des premières lignes. Les liaisons téléphoniques sont enterrées.

Des renforts qu’ils s’agisse des jeunes soldats à peine formées des unités d’ersatz ou des réserves de la Landwehr prennent position dans les tranchées où la discipline est rigoureuse. Les troupes d’assaut sont retirées du front et entraînées à l’arrière aux offensives, dans des camps spéciaux, Une artillerie spéciale de tranchée, les Minenwerfer, est mise en place, avec des effets: ces mortiers, en décembre 1914, ont tués 10 000 Français dans l’Argonne. Ils creusent dans le sol des entonnoirs de huit à dix mètres. Joffre espédie des officiers du génie sur les lignes abandonnés par l’ennemi pour étudier de près leur organisation et concevoir un réseau français adapté.

L’entrée d’une tranchée allemande à la fin de 1914. Un creusement déjà profond, muni d’un camouflage rudimentaire.

Les Allemands viennent de prendre possession d’une des premières tranchées, creusée dans le sable près d’Ypres. Le creusement est encore rudimentaire, mais des postes de tir ont été aménagés.

Les Allemands viennent de prendre possession d’une des premières tranchées, creusée dans le sable près d’Ypres. Le creusement est encore rudimentaire, mais des postes de tir ont été aménagés.

FIN 1914

LES TRANCHÉE FRANÇAISES

L’État-major  manque de pelles et de pioches. Il en commande des dizaines de milliers en Angleterre et en Amérique, pour creuser partout deux lignes de tranchées distantes de trois kilomètres. La première ligne s’approche parfois à 50 mètres de l’ennemi. Les guetteurs surveillent jour et nuit, sur les parapets, les signes d’activité dans la tranchée d’en face. Les sapeurs creusent le sol pour faire sauter les mines de l’ennemi, qui se protège par des contre-sapes.

Les chemins de fer acheminent au front des tonnes de fils de fer barbelés pour les premières lignes. Un seul bataillon doit creuser pour s’abriter mille mètres de tranchées. Les travaux ont lieu de nuit pour éviter les tirs ennemis. Les nids de mitrailleuses sont en place. Bientôt les (poilus)  touchent des crapouillots, mortiers de tranchée qui peuvent résister aux Minenwerfer. La vie s’organise dans les lignes, où le ravitaillement et le courrier parviennent par les boyaux. Entre les lignes, les patrouilles nocturnes s’efforçent de réaliser des coups de main, pour capturer quelques prisonniers qui permettent d’identifier les unités d’en face. Les troupes s’immobilisent et apprennent à lutter contre leurs pires ennemis, la boue, le gel, les rats, les poux.

Un hérisson de barbelés, appareil de défense obtenu en enroulant les fils de fer sur un tambour de bois conique.

Un crapouillot rudimentaire. Ce mortier, malgré sa puissance apparente, date de 1847 et porte encore la marque de Louis-Philippe.

Une des premières tranchées françaises, dans les plaines du Nord, en septembre 1914. Tout déroge encore aux règles de la fortification de campagne, telles qu’elles se perfectionneront quatre ans durant. La double ligne est peu profonde, la protection limitée au remblai, les postes de tir innexistants, le tracé est doit.

C’est tirailleurs sénégalais rassemblent les outils destinés aux tranchées. Les coloniaux seront souvent affectés aux travaux de terrassement.

FIN 1914

LE FRONT BRITANIQUE

Calais, Boulogne sont devenues des villes anglaises : Les Tommies tiennent les lignes des Flandres et de Picardie et installent leurs tranchées dans un confort relatif. Ils disposent d’une artillerie d’obusiers et de nids de mitrailleuses Maxim bien protégés, Le commandement veille tout particulièrement à l’hygiène des troupes en faisant installer, immédiatement à l’arrière, des points d’eau pour les douches et des abris de planches.

Les fusiliers qui veillent aux créneaux disposent du fusil Lee-Enfield modèle 1903 de 7,7 mm: doté d’un magasin de dix cartouches, il pèse 4,2 kg et tire à plus de 2 500 mètres. Les troupiers sont revêtus de pièces de toile imperméables et bien pourvus de vêtements de laine. Le ravitaillement est bien soigné. Les navires chargent au Havre et à Cherbourg des caisses de bacon et de marmelades, et même de thé et du rosbif.

Lord Kitchener, le ministre de la guerre, envoie sans cesse en France les renforts qu’il recrute par volontariat. Les lignes accueillent en nombre croissant les soldats canadiens, australiens et néo-zélanais, ainsi que les Indiens. Ceux-ci ont pris par à la bataille de Dixmunde. Le but de Kitchener est de réunir 1 250 000 hommes sous les armes et de les préparer par une instruction accélérée.

Des Highlanders servant une mitrailleuse Vickers-Maxim Mk 1. Une arme remarquable, adoptée en 1912 d’après un modèle plus ancien et plus lourd, et qui tire 500 coups minutes. Mais il n’y a que quelques centaines en 1914, en face, les Allemands disposent de 12 500 Maxim MG 08.

Quand la guerre s’installe, les Britaniques installent à l’arrière des coins d’Angleterre. Ici, en juin 1916, une cantine à Abberville.

Le relatif confort d’un PC de campagnie sous abri, dans les tranchées britaniques.

Un gros mortier de siège anglais.

FIN 1914

LES ARTILLEURS MAÎTRES DES BATAILLES

L’armée française disposait en quantité suffisante de pièces de campagne attelées de 75, équivalentes aux 77 allemands et aux canons anglais à tire rapide de 13 livres. Mais les Allemands avaient gagné les premières batailles en utilisant des pièces lourdes tractées, qui ravageaient les colonnes en marche. Seuls les Anglais disposaient du Long Tom, une pièce de 60 livres, qui tire à plus de 13 km ses obus explosifs.

La fabrication française est en retard, L’armée n’a que 26 batterie de 155 à tir rapide, 20 de 120 long, 15 de 120 court. On bat le rappel des pièces de marine, que l’on transporte par chemin de fer, ainsi que des mortiers lourds, Les voies Decauville acheminent les obus sur les emplacementd des batteries que l’on fait camoufler.

Les fantassins envient des artilleurs dans leurs cagnas, creusées derrière les lignes, à l’abri des tirs ennemis. Pouratnt, aucune attaque ne peut réussir sans l’artillerie. L’infanterie appelle ses tirs en lançant des fusées rouges. On accuse toujour les artilleurs de tirer dans les lignes amies, au lieu de contrebattre efficacement les pièces allemandes, souvent hors d’atteinte en raison de leur longue portée.


Un canon anglais de 60 lbs en août 1914. Le Long Tom représente une bonne alliance entre le poids des obus (plus de 27 kg) et la portée, supérieure à 10 km. Dans sa catégorie, le mortier allemand de 150 mm a un poids supérieur, mais une portée inférieure, tandis que le mortier de 155 mm Schneider le dépasse.

Une batterie française de 75 mm. Le 75 mm modèle 1897, adopté en 1899, possède des qualités évidentes. Mais celle-ci poussent justement les militaires à négliger l’artillerie lourde et les mortiers.

Un 155 mm court Rimailho. Au camp français de  Mourmelon en juillet 1914. C’est une bonne arme, adoptée en 1906. En revanche, il y en a trop peu, et elle est trop lourde pour les actions de mouvement.

Les Allemands maître de l’observation d’artillerie. Ici, le commandant d’une batterie dirige le tir depuis un stéréo-téléscope. Ce type de machine n’explique pas la supériorité des artilleurs allemands. La vraie raison en est leur forte dotation en artillerie lourde, notamment de siège.

FIN 1914

L’OBSERVATION AÉRIENNE

Les bélligérents disposent d’avions de bombardement capables d’effectuer des raids en territoires ennemis, mais avec des obus balancés par dessus bord, des bombes trop légères, voire avec des fléchettes d’aciers, comme les Français, pour accabler les colonnes allemandes en marche.

L’utilité majeure de l’aviation est l’observation de l’ennemi. Ainsi, à la veille de la bataille de la Marne, les avions français ont-ils surpris la marche des colonnes allemandes. Un service de photographique est alors créé au CQG.

Quand les armées s’enterrent, le rôle des observateurs d’aviation devient prémordial. Les Aviatiks allemands, les Farman, les Voisin, les Morane et les Caudron G7 prennent l’air. Les aviateurs sont armés de carabines et de pistolets, plus rarement de mitrailleuses. Ils contribuent à régler les tirs d’artillerie, avec les aérostiers des ballons captifs, que les Allemands appelent Drachen.

Une équipe de l’observation aérienne, plus tard dans la guerre. Certes au mur de leur bureau, les dessinateurs de la IVe armée-section photo aérienne, dirigés par le commandant Boucher. Ils sont chargés de reporter les clichés pris d’avion ou de ballon. En 1918, ils sont stationnés à Châlons-sur-Marne.

Cette même équipe occupe ses loisirs à illustrer, non sans humour, les déboires de son travail et de la vie militaire.

Dans le même groupe de clichés, une (saucisse), ballon aérien d’observation, sur le front de Champagne

Un exemple de cliché aérien : prise de vue en juin 1917, à 2 300 mètres d’altitude, par un appareil français basé à Alger, en Champagne. On distingue nettement la structure des tranchées allemandes Hohenhöle et Nümberg.

FIN 1914

LES SERVICES DE SANTÉ

Les centres de commandements sont rapidement débordés par les centaines de milliers de blessés qui affluent dans les centres de secours. Beaucoups meurent durant les longues périodes de déplacement, faute de matériel approprié. Les postes de premières urgences sont mal équipés et les antennes divisionnaires manquent de médecins et de soignants, ainsi que de médicaments.

L’absence de casque rend les Français vulnérables aux éclats d’artillerie : les blessés à la tête représentent environ 60% des effectifs des services. Les secousses de la route ou du train les tuent. Pourtant, un bénévolat s’organise à l’arrière avec le concours de la Croix-Rouge, Des locaux sont réquisitionnés, transformés en hôpitaux.

Les opérés meurent le plus souvent de la gangrène qui affecte les plaies. Clemenceau est le témoin indigné d’un débarquement de blessés en gare de Bordeaux. Rien n’est fait pour assurer une évacuation efficace. Les premiers progrès réalisés sont les transports par péniches sur les canaux, qui évitent les secousses, et les premiers convois d’ambulance automobile, dus quelquefois à des initiatives privées, comme les ambulances de volontaires américains.

Un chirurgien franàais opère dans une église transformée en centre de soins.

L’église de Neufmoutiers, poste de secours allemands, reprise par les Français après la Marne. Les blessés allemands gisent abandonnés sur la paille. À la droite du groupe, un infirmier allemand.

Octobre 1914, près d’Ypres : des soldats belges dégagent une ambulance de la Croix-Rouge anglaise, prise dans les sables humides.

Février 1915 : accostée au quai des Orfèvres, une des premières péniches sanitaires, le Transport ambulance no 7, anciennement Aimée de Lantelme (dessin de Coudouze).

FIN 1914

PARIS EN GUERRE

À la fin de 1914, Paris est une place forte, un camp retranché dont les gares ventilent les renforts envoyés au front et accueillent les blessés et les permissionnaires des armées alliées. Avant la bataille de la Marne, quand le Président de la République et les autorités ont été évacués sur Bordeaux. Les Parisiens ont redouté le pire et nombreux sont ceux qui ont redouté le pire, et nombreux sont ceux qui ont cherché à s’embarquer pour le sud, tandis qu’affluaient les réfugiés de Belgique et du Nord. Les premiers raids d’Aviatiks sur la capitale, le 30 août puis le 1er le 8 et le 11 septembre, peu meurtriers, n’ont pas provoqué de panique. Le bruit sourd du canon allemand sur la Marne suffisait à créer l’angoise.

Dès la victoire de la Marne, Les théâtres ont rouvert dans la capitale, sous le prétexte de distraire les soldats. Ils sont moins fréquentés que les salles de cinétographe, où l’on projette les premiers films de propagande réalisés par l’armée.

La vie s’organise dans la capitale en guerre. Après la période de chômage, l’ouverture des ateliers travaillant pour la guerre attire les femmes, qui s’engagent aussi dans les postes et tramways. Les Halles ne manquent pas de vivres et les restaurants regorgent de clients. Les soldats en permission ont le sentiment que l’arrière ignore tout de la guerre.

6 décembre 1914, jour de la réouverture des théâtres parisiens, Mlle Chenal chante la marseillaise en clôture à l’Opéra-Comique.

Un immeuble parisien victime des bombardements aériens.

Un Taube allemand, abattu dans la Meuse et exposé aux Invalides.

FIN 1914

LES BESOINS DE LA GUERRE

 L’effrayante consommation de munitions a vidé les stocks à la fin de 1914. Les belligérants doivent s’organiser pour faire face, en faisant flèche de tous bois. Krupp retient à Essen 90 000 ouvriers pour ses fabriquations de guerre. À Mannheim-Ludwigshafen, on transforme l’amoniaque en acide nitrique pour fabriquer des poudres. Les Allemands importent du cuivre américain livré en Hollande, du fer suédois, du chrome turc. Ils utilisent les mines francaises de Briey, abandonnées sans combat.

Les français créent des ateliers, petits et grands, sur tout le territoire: on fabrique de la poudre à Moulin-Blanc, près de Brest, des obus à Montauban. Des États-Unis sont importés des milliers de tonnes de poudres. 500 000 paires de chaussures pour les soldats.

Des chevaux, aussi : il en faut 20 000 de plus par mois, pour compenser les pertes. L’armée française seule en utilise désormais 600 000, et l’armée belge 40 000. Pour le ravitaillement, l’Allemagne trafique avec la Hollande et le Danemark, la France importe du blé et de la viande d’Argentine. D’immenses troupeaux de boeufs et de moutons campent dans Paris en 1914.

Quelques phases de la fabrication d'obus  ans une usine française

A Paris, stockage d’obus destinés à l’aritllerie lourde.

Quelques phases de la fabrication des obus dans une usine française.

DÉCEMBRE 1914

LE PREMIER NOËL DE GUERRE

La guerre continue. Force est de fêter Noël dans les tranchées, de dire la messe de minuit sous la tente. Sur le front de l’Aisne, les hommes s’interpellent de gourbi à gourbi. Ils boivent du vin bouché en mangeant de la dinde et du Camembert. Pour dessert, du chocolat collectés par les enfants des écoles.

Les fraternisations pendant la nuit de Noël ne sont pas rares. On échange le chocolat contre du tabac, le vin contre des cigares. On entend les Allemands chanter le vieux Stille Nacht, Tannenbaum, et les choeurs français répondre. Le nouveau pape Benoît XV ne vient-il pas de parler pour la paix ?

Joffre donne des ordres pour que les officiers français ne fassent pas la trêve de la guerre en se rendant à la messe de minuit dans la petite église de Thann, dans les Vosges. Il ne faut pas attirer les obus sur la ville, explique-t-il. Il fait censurer dans les journaux la demande d’arnistice de Noël formulée par le Sain-Père. La guerre doit continuer.

Un abre de Noël dans une tranchée allemande.

Le front russe en décembre 1914. Le froid et la neige, malgré les souffrances qu’ils occasionnent, réservent quelques occasions de délassement aux soldats allemands.

Des Prussiens font de la luge sur le front russe.

Noël au 226e régiment d’infanterie dans le secteur de Carency (Pas-de-Calais). Dessin de Jean Droit. En mai-juin de l’année suivante, le secteur entier sera le lieu des violents combats d’Artois.


22/04/2013
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LA GRANDE GUERRE ANNÉE 1915

 1915

 

Un calendrier de voeux pour 1915. Au début de l’année, l’Alliance est encore forte, et les Franco-Britanniques en particulier peuvent espérer percer dans le nord de la France.

JANVIER 1915

DES ZEPPELINS SUR LONDRES

Le 19 janvier 1915: pour la première fois les Allemands lancent un raid de Zeppelins sur Londres. Cet acte de représailes répond à l’attaque commandée par Churchill, et menée par les hydravions britanniques, dans la nuit du 25 au 25 décembre, contre les hangards de dirigeables de Nordholz.

Capables de naviguer plus de vingt heures, les Zeppelins, armés seulement de deux mitrailleuses Maxim, peuvent larguer ordinairement chacun six obus de 203 mm. La division des aéronefs de la marine a misé sur ces engins pourtant vulnérables en raison de leur rayon d’action.

De fait, le L3 du lieutenant Hans Fritz, le L4 du comte Magnus von Platten-Hallermund, le L6 du baron Treutsch Buttlar von Brandenfels survolent l’estuaire de l’Humber et la Tamise, vingt-quatre bombes sont lancées: quatre tués et neuf blessés dans la population civiles, 8 000 livres sterling de dommages matériels. Des torpilles sont tombées dans le parc du château de Sandringham, résidence royale du Yorkshire. A-t-on voulu tuer le roi ?

L’opinion anglaise s’indigne et s’inquiète. Une section de défense mobile est mise en place sur les côtes de l’East Anglia. Désormais, les raids de zeppelins se multiplient, commandés par le vice-amiral Bachmann. L’empereur Guillaume II a du s’y résoudre.

Hangard pour Zeppelins en Allemagne

Les bases des zeppelins allemands. Elles sont installées principalement en Allemagne, mais les terrains de Bruxelles et Maubeuge sont très utiles pour toucher Paris ou Londres.

Le raid du 19 janvier sur l’East Anglia. Il tue quatre civiles et en blesse neuf. Parmi les victimes quatre femmes et quatre enfants. Une bombe tombe à King’s Lynn, détruisant deux maisons et tuant Percy Doate, une vieille dame, et Mrs, Gazeley, une veuve de guerre.

JANVIER-FÉVRIER 1915

LES TURCS ATTAQUENT À SUEZ

Janvier 1915: une armée turque s’avance vers le canal de Suez. Les troupes se sont lentement concentrées en palestine et en Syrie: des Arabes, ancadrés par les Turcs, bientôt rejoints par des fantassins d’Anatolie et conseillés par l’Allemand Kress von Kressenstein.

Les soldats ont franchi dans la souffrance les 300 kms de désert, avec dix jours de vivres et d’eau. Le départ a été donné par Djemal Pacha, le 21 novembre. Au début de décembre, les avions français Nieuport ont repéré les colonnes à 50 kms du canal. En janvier, mois relativement frais, les Turcs et les Arabes ont continué leur marche forcée de nuit, se cachant le jour pour échapper aux hydravions anglais.

Fin janvier, les Turcs sont à 8 heures du canal, sur la route d’El-Arish. Les imams les appelent au combat. Les affrontements avec l’armée des Indes commencent le 26 janvier. Les navires de guerre bombardent l’infanterie turque, qui se rue à l’assaut le 2 février. Mais la solide armée indienne les arrête, secondée par les tirs d’artillerie. Les Turcs doivent ordonner la retraite : ils ne prendront jamais Suez.

Le 18 décembre 1914, les Britanniques déposent le khédive d’Égypte, Abbas Hilmi, et le remplacent par son oncle Hussein Kamil, plus sûr. Deux jours plus tard, les troupes khédivales, désormais fidèles, défilent devant les chefs anglais.

Du 27 janvier au 14 février, Indiens et Turcs s’opposent sur le canal. Les Turcs, ici mitraillés par les Indiens, tentent en vain d’établir des ponts le 2 février. Seuls quelques hommes passent à la nage. De plus, le soutien d’artillerie est très imprécis.

Du 27 janvier au 14 février, Indiens et Turcs s’opposent sur le canal. Les Turcs, ici mitraillés par les Indiens, tentent en vain d’établir des ponts le 2 février. Seuls quelques hommes passent à la nage. De plus, le soutien d’artillerie est très imprécis.

Leur camp d’Abbassia près du Caire, dont les tentes coniques évoquent les pyramides toutes proches

JANVIER-FÉVRIER 1915

LA FLOTTE ALLIÉE DEVANT DARDANELLES

La guerre coûte chaque semaine à l’Angleterre autant d’argent qu’une année de paix. Aussi le gouvernement Asquith fini-t-il par admettre la thèse de Churchill: rechercher la décision en forcant les détroits des Dardanelles, pour couper l’Allemagne de son allié turc, entraîner dans la guerre l’Italie, la Bulgarie et la Roumanie, menacer l’Autriche-Hongrie.

La décision est prise par le War Council le 29 janvier: le 19 février, la Navy bombarde les forts d’accès aux Dardanelles pendant un quart d’heure, pour tester leurs défenses. Une grande flotte se concentre, venue de toutes les mers du monde : le navire le plus moderne est le Queen Elizabeth, véritable star des mers avec ses huit canons de 380 mm. Dix cuirassés démodés, mais fortement dotés de pièces d’artillerie, accompagnés de dragueurs de mines, de croiseurs légers, de torpilleurs et de sous-marins se rassemblent, rejoints par les quatre cuirassés français de l’amiral Guépratte.

L’expédition est commandée par l’amiral anglais de Robeck. Il a reçu de Churchill, premier Lord de l’Amirauté, des instructions fermes : Sous aucun prétexte on ne renoncera à l’attaque contre Constantinople.

Le 25 mai 1915, le sous-marin Britania E11 coule le transport de munition Stamboul en rade de Constantinople, provoquant la panique dans la capitale turque.

Le 25 mai 1915, le sous-marin Britania E11 coule le transport de munition Stamboul en rade de Constantinople, provoquant la panique dans la capitale turque.

Le sous-marin français Turquoise. Elle force les Détroits le 20 octobre, mais se prend dans les filets anti-sous-marins. Le lendemain, elle tombe aux mains des Turcs.

La victime du chasseur : Le cuirassé Turc Messudiyeh, coulé par le B11 le 13 octobre 1915. Le sous-marin britannique B11 lancé en 1914. Porteur de 16 hommes et de deux tubes lance-torpilles de 18 pouces, il file à 8,5 noeuds en plongée.

MARS 1915

LES CERCUEILS CUIRASSÉS DES DARDANELLES

Le 18 mars 1915, les cuirassés lourds britanniques et français s’approchent des Dardanelles, défendues par l’artillerie lourde allemande. Servie par des artilleurs turcs, sous la direction de pointeurs d’officiers allemands, elle est aux ordres du général Liman von Sanders, conseiller militaire du gouvernement ottoman.

Les pièces des forts ont été renforcées par des obusiers lourds. Des mines flottantes ont été lancées dans le courant. Des chaînes empêchent l’accès aux Détroits. Une division d’infanterie, tapis dans les ravins, est chargée d’empêcher tout débarquement. Trois des quatre cuirassés de l’amiral Guépratte sont coulés. Le Bouvet sombre en 56 secondes avec 642 hommes à bord, le Gaulois s’échoue, le Suffren est hors de combat. Les Anglais onr perdu l’Irresistible et l’Océan. L’Inflexible et l’Agamemnon sont incapables de tenir la mer. Les Turcs ont gagné: 8 canons sur 76 seulement ont pu être détruits par les Alliés. L’amiral de Robeck décide d’abandonner l’opération: sa réussite nécessite l’intervention des troupes de terre.

La fin du Bouvet le 18 mars, vue par un officier du croiseur britannique Triumph. A 14 heures, le cuirassé français est touché à tribord par une mine. Sous la violence du choc, le navire prend immédiatement de la gîte.

La flotte alliée vue depuis le Bouvet. Au premier plan, un double 305 mm.

Une minute plus tard, le Bouvet sombre. Près de 600 hommes, coincés dans la coque qui se disloque, sont pris au piège.

MARS-MAI 1915

LE DÉBARQUEMENT DE GALLIPOLI

Les Alliés ne peuvent pas rester sur l’échec des Dardanelles, en raison du retentissement de leur défaite dans le monde musulman, Ils décident de faire débarquer un corps expéditionnaire britannique, sous les ordres du général Ian Hamilton, un ancien de la guerre des Boers, renforcé de quelques régiments français commandés par d’Amade.

Le 25 avril, les Français de la division Bailloud réussissent à prendre pied, grâce au sacrifice des troupes coloniales, sur la rive asiatique des Détroits, mais les Anglais ne peuvent se rendre maîtres que des plages sud de la rive européenne, aux prix de combats acharnés, Il faut envoyer cinq divisions en renfort pour permettre d’élargir et d’approfondir le front. Les Anzac du général Birdwood (troupes australiennes et néo-Zélandaises) s’embusquent dans les rochers de Gaba-Tépé, les marins échouent sur une plage du sud le vieux charbonnier River Clyde pour s’y abriter pendant le débarquement.

Il faut beaucoup plus de 30 000 hommes pour s’emparer de la presque’île de Gallipoli, creusée de ravins, couverte de ronces et dépourvue de puits. A Londres, le 18 mai, le gouvernement chancelle, contraint Churchill à démissionner: est-ce la fin du rêve d’Orient?

Moudros, sur l’île de Loemnos, le 23 avril 1915, veille de l’embarquement pour les Dardanelles. Au premier plan, le camp des zouaves; derrière, la flotte alliée. 

(Gauche) un transport de troupes aux Dardanelles, (droite). Le débarquement du matériel. Un véritable pont de péniches s’organise, et sur la plage une ville de tentes.

25 avril, la plage V, sous le feu du fort de Seddul-Bahr. A l’intérieur du transport blindé River Clyde, volontairement échoué, les soldats irlandais attendent le soir pour contre-attaquer, le 26 avril, les lignes turques sont entre leurs mains.

Les opérations des 25 et 26 avril. Au premier plan, les débarquements réussis sur les plages W, V (Seddul-Bahr) et S. Sur la gauche, la plage Y (au second plan), évacuée dans la panique, et tout au fond, la plage Z, où Australiens et Néo-Zélandais affrontent Mustapha Kemal.

MAI 1915

LES ITALIENS PARTENT EN GUERRE

Les Italiens souffrent de la présence militaire de L’Autriche-Hongrie dans l’Adriatique et protestent périodiquement contre l’agression des navires de pêche et de commerce par les sous-marins de la base autrichienne de Pola. Mais, depuis 1914, le gouvernement italien reste fidèle à la politique d’égoïsme sacré du premier ministre Salandra.

La surenchère diplomatique des Alliés et des Empires centraux fait pencher l’Italie, en 1915, vers le plus offrant. Par le traité secret de Londres, signé le 26 avril 1915, elle s’engage à entrer en guerre, uniquement contre l’Autriche-Hongrie, pour obtenir le Tyrol italien, Trieste, les îles et certains points de la côte adriatique. Elle obtient aussi l’aide des Français en matériel militaire.

Le 20 mai, le Parlement italien a voté les crédits de guerre. Une armée de 37 divisions va se porter immédiatement sur le front des Alpes pour affronter les unités austro-hongroises. L’engagement de l’Italie élargit encore la carte de guerre au sud de l’Europe. Le commandement italien ne manque pas de troupes spécialisées dans la guerre en montagne, les Alpini, et d’une marine de guerre qui renforcera les escadres alliés de Méditerranée.

Salandra, chef du gouvernement italien. (Bas), la foule des interventionnistes à Milan, au cours de la manifestation du 13 mai pour l’entrée en guerre. Ils se réunissent symboliquement devant le monument dédié aux cinq journées des 18-22 mars 1848, au cours desquelles les Piémontais ont chassé l’occupant autrichien.

Après la mobilisation du 21 mai, les étudiants italiens se rendent aux casernes pour s’enrôler, en cortège et drapeaux déployés.

AVRIL 1915

LES GAZ ASPHYXIANTS

Le 22 avril, pour la première fois les Allemands utilisent des gaz asphyxiants sur les fronts de Steenstraate et de Langemarck. Ils ont disposé des tubes à gaz en raison d’une batterie tous les 40 mètres, en attendant les vents favorables pour vider les bombonnes placées à l’avant des tranchées. L’ensemble de la 45e division française recule, les hommes suffoquent, toussent, titubent, tombent. Des zouaves et des canadiens interviennent, un linge humide sur le visage. On transporte au front les appareils respiratoires des pompiers de Paris. On distribue des lunettes en fil de fer modelables et les premiers masques arrivent enfin. Ils ne seront assez nombreux qu’en avril 1916.

Au printemps 1915, l’armée française a perdu 130 000 combattants dans les l’offensives sans résultats en Artois et en Champagne. Les Éparges sur les Hauts-de-Meuse, L’Hartmannswillerkkopf en Alsace, le plateau de Laurette en Artois ou, en Laurenne, Bois–le-prêtre-que les Allemands appellent le bois-des veuves, sont le lieu d’affrontements sanglants. Si les Allemands emploient les gaz asphyxiants, c’est pour décourager les offensives alliées à l’ouest, parce qu’ils ont transporté à l’Est leurs divisions d’attaque.

Les masques anglais, tels que distribués au Bois Grenier (secteur au sud dArmentières) le 20 mai 1915, Ces compresses de coton et de tissu, imbibées d’eau (car la chlorine est soluble dans l’eau), n’offrent qu’une maigre protection.

Les premiers masques français sont aussi inefficaces que leurs homologues anglais. Le Miroir, qui publie ce cliché le 9 octobre 1915, titre pourtant (Nos soldats se rient des gaz asphyxiants).

Soldats allemands pendant une attaque allemande aux gaz dans les Flandres. Dès le 25 septembre, à Loos, les Britanniques à leur tour utilisent ce poison. À la Chlorine, le gaz du 22 février, succèdent des agents plus toxiques: phosgène, disphogène de Verdun et surtout, en 1917, l’ypérite ou (gaz moutarde), une arme qui provoque des souffrances atroces et qu’aucun masque ne saurait arrêter.

JUILLET 1915

LA DÉROUTE DU GRAND DUC NICOLAS

Falkenhayn retourne ses divisions d’assaut contre la Russie dès février 1915. Deux armées allemandes venues de Prusse-Orientale réusissent à encercler un corps russe dans la forêt d’Augustow: 100 000 prisonniers en quelques jours. La tempête de neige empêche cette bataille d’hiver des lacs Mazures de tourner en triomphe allemand. Le 22 mars, sur le front de Galicie, la prise de Przemysl aux Autrichiens permet au tsar Nicolas II d'oublier pour un temps Augustow.

Mais, au printemps, Falkenhayn lance quatorze divisions fraîches pour écraser l’armée russe, pendant que les Autrichiens attaquent entre la Vistule et les Carpates. En juin les Austro-Allemands commandés par Mackensen reprennent Przemysl, puis Lemberg, chassant les Russes de Galicie.

Hindenburg et Ludendorff attaquent en juillet au sud les lacs Mazures, vers Varsovie, Leur succès est complet: le grand-duc Nicolas doit évacuer la Pologne et reculer jusqu’à Brest-Litovsk. Hindenburg enlève la ligne du Niémen, pousse jusqu’à la Berezina. L’arrivée de l’hiver ramène le calme sur ce front. Les Russes ont reculé de 150 km et perdu la moitié de leur armée. Mais les Allemands n’ont pas réussi à leur imposer la capitulation. Les survivants des armées du grand-duc Nicolas se sont dérobés.

La tsarine au front, en août 1915. Elle distribue des cadeaux aux hommes du 15e régiment de dragons.

La chute de Przemysl en Galicie, le 22 mars 1915, vue par un témoin direct. Six mille Autrichiens se rendent aux Russes, portant à 17 000 le nombre des prisonniers.

Devant Vilna (Lituanie), en eptembre 1915, la fatigue des visages allemands, leurs uniformes bigarrés, disent assez la dureté des combats en Pologne et en Russie. Pourtant, le 19 septembre, les Russes doivent évacuer Vilna.

AOÛT-SEPTEMBRE 1915

L’ENFER DE GALLIPOLI

Le général Hamilton veut en finir avec les Turcs. Mais ses attaques de mai, celles du général Gouraud en juin ne sont pas heureuses: les morts français s’accumulent dans le ravin de Kérévès-Déré, au pied du mont Achi Baba.

Dans la nuit du 6 au 7 août, une grande opération est lancée dans la baie de Suvla, au nord-ouest de la pénimsule: 40 000 Britanniques escaladent les rochers et se font tués par les Turcs de Mustapha Kemal. En dépit des sacrifices des Australiens, Hamilton doit reconnaître qu’il est impossible de s’emparer de Gallipoli. Les turcs sont trop nombreux, trop bien retranchés, les tirs de l’artillerie allemande se révèlent d’une redoutable efficacité.

Mustapha Kemal réussit à chasser les Australiens de Sari-Baïr. Quarante-cinq mille soldats britanniques sont hort de combat. L’affaire des Dardanelles se termine mal. Si les Alliés restent sur place, c’est pour ne pas perdre la face. Pendant l’été, les hommes sont morts par milliers ou évacués sur les navires hôpitaux en raison des épidémies de dysentrie ou de paludisme. L’expédition a coûté 145 000 hommes sur les 450 000 envoyés successivement en renfort. C’est un désastre.

L’échec Alliés du 6 au 8 août: à gauche, Liman von Sanders tient les Alliés en place; au centre, Mustapha Kamel massacre les Anzac à Sari-Baïr; à droite, le débarquement de la baie de Suvla ent contenu par les renforts turcs.

Mustapha Kemal

1881-1938

Mustapha Kemal, le chef de la 19e division turque bloque les Anzac à Sari-Baïr dès avril 1915, les empêchant de quitter la péninsule de Gallipoli.

Un Anzac donne à boire à un blessé turc. La soif tenaille tous les combattants alliés comme turcs. Mais les Australiens souffrent moins du climat que les Irlandais et les Anglais

(Good-bye to Gallipoli) : lors de l’évacuation de décembre 1915, le casque coloniale d’un Tommy sert à narguer une dernière fois les Turcs.

Au matin du 9 janvier 1916, le cuirassé anglais Cornwallis tire les dernieres bordés contre les batteries turques. Protection des ultimes évacués des Dardanelles ou geste de rage impuissante, après une offensive dont le seul succès réside dans l’organisation de la retraite ?

MAI-OCTOBRE 1915

LES OFFENSIVES MALHEUREUSES DE JOFFRE

Pour aider les Russes, Joffre lance pendant l’été et l’automne 1915 une série d’offensives malheureuses sur le front occidental. Elles se soldent par des pertes de 250 000 hommes, tués blessés et disparus.

Premier échec en Artois, le 9 mai : Pétain perce les lignes allemandes sur 6 km mais les renforts arrivent trop tard pour exploiter le succès. Une nouvelle attaque, lancée le 18 juin, est recue par un feu d’enfer : les Allemands prévenus, se sont organisés. Joffre croit encore que la percée est possible, Il rameute les divisions de réserve, lance le 25 septembre une offensive en Champagne avec une action secondaire en Artois, à laquelle participent les Britanniques. Les troupes qui s’avancent dans les lignes allemandes sont encerclées et doivent rejoindre leurs positions de départ.

Une dernière offensive est lancée le 5 octobre en Champagne. Elle échoue également. Il est clair, des lors, que la rupture du front ne peut être obtenue à l’Ouest en raison de la solidité des fortifications de campagne allemandes. Joffre doit finalement se résigner à la défensive.

Cadavres allemands dans une tranchée de Champagne. Les Allemands subissent de lourdes pertes dans les offensives de Joffre, même celles des Français sont trois fois supérieures.

Dans le Nord : des blessés anglais gagnent un poste de secours. La 1re armée d’Haig a attaqué en septembre, vers Lens, y perdant 60 000 hommes.

Roclincourt, au nord d’Arras, pendant la bataille d’Artois en juin 1915 : deux soldats du 90e régiment d’infanterie emmènent au poste de secours le cadavre de leur lieutenant, tué d’une balle dans la tête. Ils utilisent la chaise spéciale pour boyaux étroits.

JUILLET-OCTOBRE 1915

LES MALHEURS DES ITALIENS DANS LES ALPES

L’attaque des italiens sur les Alpes devait soulager l’armée russe de Galicie. On escomptait que les Austro-Hongrois prélèveraient des forces sur ce front pour faire face dans la vallée de l’Isonzo ou dans le Trentin aux 37 divisions italiennes. On poussait les Serbes à soutenir l’attaque italienne. Furieux des revendications de Rome sur l’Adriatique. Ils se faisaient tirer l’oreille et restaient sur leurs positions. On s’attendait à l’entrée en guerre de la Roumanie aux côté des Alliés, qui aurait obligé les Autrichiens à intervenir en Transylvanie. Mais la Roumanie restait neutre.

Dans ces conditions, les Italiens attaquaient seuls, avec courage, mais les fronts difficiles des vallées alpines où il suffisait de deux divisions autrichiennes bien retranchées et dotées d’une artillerie de montagne efficace pour repousser tous les assauts.

L’offensive du 18 juillet, sur le Carso, était un échec sanglant, sans résultat appréciable. Celle du 18 octobre ne parvint pas à prendre Gorizia. Les 200 000 hommes mis en ligne désespéraient d’aboutir. Ils n’avaient pas recu, pour leurs attaques, de soutien efficace de l’artillerie. L’armée italienne ne pouvait créer la surprise. Pour les Alliés, elle risquait de devenir un poids.

Dans le Nord: des blessés anglais gagnent un poste de secours. La 1re armée d’Haig a attaqué en septembre, vers Lens, y perdant 60 000 hommes.

La guerre en montagne cause de grandes difficultés aux deux camps. Les Italiens, déjà confrontés sous-équipés, ont le plus grand mal à acheminer tant les canons que les blessés. Ces infirmiers italiens dans le tentin ont du mal à faire passer un brancard sur un chemin de montagne. Que dire du passage des canons, qui nécessitent des systèmes complexes de poulies et les efforts surhumains des hommes et des bêtes ?

 

Le 29 octobre, l’aviation autrichienne bombarde Venise, détruisant notamment le plafond de l’église des Scalzi, peint par Tiepolo.

Des Autrichiens ataquant à la baïonnette dans les Alpes.

SEPTEMBRE-DÉCEMBRE 1915

L’AGONIE DES SERBES

En promettant à la Bulgarie des provinces peuplées de grecs, de Serbes et de Roumains, les Austro-Allemands réussissent à l’entraîner dans la guerre. Le 6 septembre 1915, le tsar Ferdinand de Bulgarie promet d’aligner contre les Serbes, en quinze jours, quatre divisions. Le 23 septembre, il mobilise. Le 5 octobre, il entre en guerre. Mackensen réunit 330 000 Allemands, l’Autrichiens et Bulgares, et attaque la Serbie sur deux fronts.

Livrés à eux mêmes, sans secours alliés, les 250 000 Serbes ne peuvent empêcher les Allemands d’occuper Belgrade le 8 octobre, ni les Bulgares d’attaquer le centre ferroviaire de Nis. Ils doivent battre en retraite vers le sud, pour ne pas être encerclés. Les 65 000 Français et les 15 000 Britanniques, enfin débarqués à la fin d’octobre, ne peuve remonter la vallé du Vardar au-delà de la Cerna. Ni prêter secours à l’armée serbe.

Il ne reste aux Serbes qu’à faire retraitre vers l’ouest, vers l’Adriatique, à travers les montagnes enneigées d’Albanie, à partir du 23 novembre, Cette marche est un véritable martyre pour le vieux roi Pierre et ses soldats, qui meurent de froid et de faim, avant d’être tardivement recueillis par les Alliés dans les ports de l’Adriatique et dirigés sur l’île de Corfou.

Un blessé monténégrin évacué vers Cetinje, la capitale.

Sur la calotte d’un porteur, les initiales cyrillitiques HI, soit NI en caractères latins, pour Nicolas 1er, roi du Monténégro.

La détresse des Belgradois, attendant à la gare le train qui les évacuera. Du 5 au 8 octobre, les bombardements austro-allemands ont pris une ampleur sans précédent. C’est une capitale ruinée que les Serbes abandonnent.

Vaincu, le voïvode Putnik passe le dernier pont des Vizirs en Albanie, sur le Drin blanc. Déjà son souverain, Pierre 1er avait dû traverser à pied. Le généralissime serbe, malade, se fait porter dans une chaise improvisée. Brisé, il démissionnera et ira s’éteindre à Nice.

Après leur victoire, Guillaume II et Ferdinand de Bulgarie se retrouve à Nis le 18 janvier 1916. Le Kaiser (à gauche) s’entretient avec un général bulgare. Le roi (à droite) s’entretient avec Falkenhayn. Il tient le bâton de maréchal de l’armée prussienne offert par son homologue.

DÉCEMBRE 1915

LE CAMP RETRANCHÉ DE SALONIQUE

Deux divisions françaises tentent avec difficulté de se maintenir sur le front de la Cerna et de tenir la vallée du Vardar. Après le désastre serbe, elles n’ont plus de raison de poursuivre leur marche en avant. Elles ont évacué Gallipoli en même temps que les Britanniques, en partie le 30 septembre, en totalité du 10 décembre au 9 janvier 1916.

À Salonique, elles subissent l’accueil réservé et même hostile du roi de Grèce, le germanophile Constantin. Du camp retranché de Salonique, il est difficile d’organiser les liaisons vers le front, avec une seule ligne de chemin de fer saturée. Le ravitaillement est désastreux, les moyens dont dispose le général Sarrail, qui commande le corps expéditionnaire, très insuffisants

Quand les gouvernements alliés décident de maintenir le corps à Salonique, le 11 décembre, des renforts sont expédiés de Marseille et d’Égypte. Il n’est plus question de se maintenir à Salonique, en attendant l’offensive germano-bulgare. Les soldats francais qui ont perdu tant des leurs sur la Cerna doivent refluer dans le camp de Salonique et y creuser des tranchées pour passer l’hiver.

L’offensive allemande ne vient pas. Falkenhayn a changé ses plans. Il préfère retenir les Alliés à Salonique que de les voir rapatrier leurs forces vers le front de france.

Le port de Salonique vu d’avion. La vieille ville devient rapidement un des ports les plus actifs de la guerre.

 

Le débarquement de Salonique, en octobre: des Zouaves amènent leurs chevaux à terre. Les coloniaux francais recoivent un accueil parfois mitigé de la population grecque, que travaille en ce sens la propagande allemandes.

Le débarquement de Salonique, en octobre: des Zouaves amènent leurs chevaux à terre. Les coloniaux francais recoivent un accueil parfois mitigé de la population grecque, que travaille en ce sens la propagande allemandes.

En décembre, les Français se retirent du plateau de la Cerna sur Salonique. Ce mouvement sans gloire les sauve de leurs pires ennemis pendant la campagne: la neige et surtout le froid (jusqu’à moins 18 degrés).

Le camp français de Zeittenlick, devant les murailles de Salonique, en octobre. Les zouaves, au premier plan, ne bénéficient que des tentes-abris et de grandes tentes coniques. Les baraquements viendront plus tard.

Salonique devient vite une véritable Babel: On y croise aussi bien des Anglais et des marins russes.

Des Annamites à motocyclette et des francais.

FIN 1915

LE MASSACRE DES ARMÉNIENS

  Pendant l’hiver de 1914 à 1915, les Russes ont attaqué sur le front du Caucase, avec 100 000 hommes contre une armée turque de 140 bataillons renforcée de guerriers kurdes. Guidés par les Arméniens. Les Russes ont franchi les montagnes et se sont présentés devant Erzurum.

Mais Enver Pacha a contre-attaqué, cherchant à envahir l’Arménie et la Géorgie russes, et libérer les musulmans azéris du joug stariste. Les turcs ont décimé les russes de Caucase et fait subir à la population arménienne les plus atroces brimades. Enver pacha a conduit ses troupes dans la montagne enneigée, mais le général russe Ioudenitch à réussi à tenir grâce au sacrifice des cosaques Zaporogues, ennemi jurés des Turcs. Ils ont détruit une armée turque, contrainte de faire retraite dans la tempête de neige. Elle est bientôt remplacée et les lignes se stabilisent.

Les Turcs veulent alors se venger des Arméniens, considérés comme traîtes et amis des Russes. Ils déchaînent les Kurdes qui rassemblent la population des villes et des villages pour la déporter vers le sud, en de longs convois. Les consuls américains et allemands dénoncent la sauvagerie des Kurdes qui traitent leurs ennemis comme du bétail et les font mourir de faim et de soif. Dix mille déportés seulement arrivent sur les bords de l’Euphrate. On jette les cadavres en grappes dans le fleuve. Les estimations du jeune expert Anglais Arnold Toynbee dépassent le million de victimes.

Les têtes d’intellectuels arméniens exécutés. Certains officiers allemands assitent à ces massacres et en font même des photos souvenirs.

Dans le Caucase, officiers russes et cosaques en avant-garde sur une hauteur. Le cliché montre bien la symbiose des combattants. Le tambour et la corne doivent appeler les troupes à l’arrière. A la ceinture des cosaques, le long poignard traditionnel, utilisé au combat.

Enver Pacha, généralisme turc et grand responsable de l’entrée en guerre des turcs.

Prisonniers turcs du 50e régiment et de la 29e division, capturés à la bataille de Sarikamisch (décembre 1914-janvier 1915). Les Russes ont décimé les hommes d’Enver Pacha. Au centre, le cosaque Kozloff, chargé de les ramener à Tiflis (Tbilissi).

FIN 1915

LA GUERRE SOUS-MARINE

Le blocus allié des navires allemands ou neutres a pour réplique immédiate la guerre sous-marine décidée par le gouvernement allemand, le 4 février 1915. Les eaux britaniques sont réputées zone de guerre. Tout navire de commerce rencontré par les sous-marins pourra être détruit. Les neutres courent les mêmes risques.

À la fin de 1914, la marine allemande ne pouvait aligner qu’une trentaine de sous-marins. Elle en avait 52 en service à la fin de l’année, en ayant perdu 19. Un incident grave devait remettre en question la guerre sous-marine : le 7 mai 1915 le commandant de L’U20, Walter Schwieger, coulait un paquebot désarmé, leLusitania, avec 1 916 personnes à bord, dont 764 seulement survécurent. Parmi les victimes, 118 Américains. Un peu plus tard, le 19 août, le torpillage du paquebot Arabic coûtait la vie à trois Américains.

Devant les protestations de Wilson, le gouvernement de Berlin promettait seulement de ne pas couler les navires de passagers  sans avertissement préalable et sans que soient protégées les vies des non-combattants . En septembre, la guerre sous-marine était provisoirement interrompue sur les côtes occidentales de l’Angleterre et de la Manche. Elle se poursuivait en Méditerranée où les victimes étaient nombreuses, particulièrement dans les transports pour Salonique.

L’explosion de la torpille allemande vue du pont tribord du Lusitania, à 14 h 22. Les débris franchissent quatre ponts. Croquis d’un survivant, le peintre de décors Oliver P. Bernard.

Le torpillage du Lisitania dans une carte postale de la propagande allemande. Tripitz y figure en héros de l’affaire.

La grande flotte des torpilleurs et des sous-marins allemands.

FIN 1915

L’EUROPE OCCUPÉE

Noël de 1915, les Allemands peuvent triompher. Ils occupent dix départements francais, la Belgique, la Pologne, la Lituanie. Les Bulgares et les Autrichiens sont en Serbie. Leurs alliés turcs ont rejeté les Franco-Britaniques de Gallipoli et l’offensive italienne n’à pu déboucher dans les Alpes. Joffre a perdu 250 000 hommes dans des offensives infructueuses à l’Ouest. Les territoires occupés de l’Europe sont pressurés par l’ennemi, qui s’empare du ravitaillement, des mines et industries et contraint la population à des travaux forcés.

Joffre est le seul des généraux en chef alliés à rester en poste, malgré ses échecs. French est remplacé en décembre par Haig à la tête de trente cinq divisions britaniques, à qui l’opinion anglaise reproche leur inaction. Le grand-duc Nicolas est renvoyé par le Tsar, qui prend en personne le commandement de l’armée russe, avec l’aide du général Alexeiev.

Falkenhayn et Conrad von Hötzendorf ont réalisé le rêve allemand de domination de l’Orient, de Berlin et de Vienne jusqu’à Constantinople, par Sofia. Ni la Grèce ni la Roumanie ne les menacent. Le corps expéditionnaire allié d’Orient est enfermé à Salonique et, si les Anglais tiennent les mers. Des usines allemandes sortent de nouveaux sous-marins qui permettront de reprendre l’offensive maritime, en dépit du renvoi de von Tirpitz par le Kaiser.

Le général August von Mackensen (1849-1945), créé feld-maréchal après la prise de Lemberg        

(Lvov) le 22 juin. Ce cavalier Saxon de 66 ans est le meilleur manoueuvrier allemand à l’Est. Il s’aitait distingué comme second d’Hindenbourg en Prusse-Orientale.

L’occupation sévère de la Belgique prend parfois une tournure comique. Ici, des prussioens onr réquisitionné un cours de tennis pour une messe en plein air.

Les Alliés au grand conseil interallié du 6 décembre. De gauche à droite: le général Porro (Italie). Le général Weilemans (Belgique), le maréchal French (Grande –Bretagne) le général Joffre (France), le colonel Stenanovic (Serbie) et le général Jilinski (Russie).

Le Kaiser (à gauche) et son chef d’état-major Falkenhayn (à droite) observant une attaque au gaz en 1915.


26/04/2013
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LA GRANDE GUERRE 1916

1916

1916. Forts de leurs succès, les Allemands, libérés de la pression russe à l’Est pour longtemps, sont décidés à obtenir la décision à l’Ouest. L’année 1916 est marquée toute entière par leur offensive sur le front de Verdun. Ils ont d’abord l’ambition d’acculer les Alliés à la paix, en faisant preuve de la capacité de destruction de l’industrie de guerre allemande sur un front limité. La surprenante résistance française entraîne les belligérants dans une guerre d’usure, qui se solde par 500 000 morts et blessés.

L’insurrection irlandaise n’empêche pas les Britanniques de poursuivre leur effort de guerre, et de dominer la flotte allemande à la bataille du Jutland. Leurs armées progressent en Orient, jusqu’à menacer la Turquie. Mais ils échouent, avec les Français, dans l’offensive sur la Somme et piétinent sur le front de Salonique. Les Bulgares ne sont pas menacés par l’entrée en guerre de la Roumanie, anéantie et occupée grâce à l’intervention allemande. L’offensive russe de Broussilov a échoué.

Les Russes sont hors de secourir les Roumanins. Si ls Français l’emportent à Verdun, ils reprennent tout juste leurs lignes de tranchées du début de 1916. La guerre piétine. On commence à penser dans les deux camps qu’elle ne peut avoir qu’une issue politique.

Le désir, l’avance, l’arrêt, la flûte. Les Français, comme l’expriment ces cartes postales, ressentent la bataille de Verdun comme une victoire morale, celle des soldats du front sur les hommes des communiqués, officiers pansus et scribes émaciés de l’État-major allemand, celle des hommes sur la machine de guerre.

FÉVRIER 1916

VERDUN, LE 21 FÉVRIER

Depuis janvier 1916, les troupes allemandes se concentrent dans la région de Verdun, construisent des abris bétonnés, des parallèles d’attaque, des emplacements de batteries lourdes. Falkenhayn sait que les Français peuvent difficilement se maintenir sur ce saillant du front qui n’est ravitaillé que par une seule ligne de chemin de fer d’intérêt local, à faible débit.

Joffre a fait désarmer la place, ne croyant pas la l’intérêt des fortifications. Deux divisions françaises seulement vont soutenir le choc de six divisions allemandes. Demain  l’Empereur viendra passer à Verdun une grande revue, dit le Kronprinz à ses troupes.

Le 21 février, à l’aube, mille canons concentrent leur tir sur les 20 kilomètres du front minuscule de Verdun. Les Allemands attaquent en ligne, sans se presser, persuadés que toute vie a cessé dans un paysage transformé en croûte lunaire. Au bois des Caures, une poignée de chasseurs à pied commandés par le colonel Driant ouvre le feu. Ils ne sont pas morts. Pas encore. Quatre vingt seulement survivront sur mille. Cette réaction innattendue crée l’événement. Les renforts arrivent, les Allemands piétinent. Ils ne passeront pas ! C’est le mot de Verdun.

La résistance de Driant au Bois des Caures, idéalisée par le Petit Journal du 2 avril 1916. Driant tombe le 22 février, et rare sont ceux qui peuvent se replier sur Vacherauville. Le fanion des 56e et 59 bataillons de chasseurs.

Le 28 juin 1916, à Notre-Dame de paris, la ligue des patriotes fait célébrer une messe à la mémoire de Driant. Ici Mme veuve Driant arrive au bras de l’écrivain nationaliste Maurice Barrès, président de la ligue. Député nationaliste comme Barrès, Driant était le gendre du général Boulanger.

La bataille de Verdun, de l’attaque allemande du 21 février à la fin des offensives ennemies de juin.

FÉVRIER-MARS 1916

 Pour alimenter Verdun, évacuer les blessés acheminer des renforts, Joffre et Pétain décident d’utiliser la route de Bar-le-Duc. Le capitaine Doumenc organise une noria de plusieurs milliers de camions qui doivent circuler nuit et jour sans jamais s’arrêter. C’est la Voie sacrée.

De Douaumont sans défense, est pris par les Allemands. Pétain organise la résistance sur la rive droite de la Meuse, et la rotation des unités en première ligne. Il résiste à l’attaque allemande sur la rive gauche, sur la côte 304 et le Mort-Homme, dont les Allemands ne peuvent s’emparer. Une autre attaque du 20 au 23 mars aux confins de l’Argonne, semble réussir à tourner le front français, mais de nouveau le courage des poilus sauve la situation. Ils s’accrochent au terrain et Pétain envoie, quand il le faut, les renforts nécessaires. Joffre prépare une offensive franco-britannique en juillet sur la Somme. Il limite à 23 divisions les effectifs de l’armée de Verdun. Pétain sait qu’il doit tenir le front avec des effectis limités. Mais les pertes sont telles que ces 23 divisions devront être sans cesse renouvelées, jusqu’à engager à Verdun plus de la moitié de l’armée française.

Un hôpital de canons, ici des 155 mm Rimailho. Les cadences de tir infernales rendent les réparations fréquentes.

Nixéville, à mi-chemin entre Clermont-Argonne et Verdun, le 8 avril 1916: les Francais reviennent du front de Vaux par la Voie sacrée.

 Le soutien logistique, élément éssentiel de la résistance française.

AVRIL 1916

LES PÂQUES SANGLANTES DE DUBLIN

Les révoltés d’Irlande font campagne contre l’enrôlement des Hirlandais dans l’armée britanique et revendiquent l’indépendance. Sir Roger Casement a obtenu le soutien des Irlandais d’Amérique et aussi celui des Allemands, avec lesquels il prépare une insurrection. Il est arrêté au moment où un sous-marin devait le déposer sur la côte ouest de l’Irlande.

On attend en vain la démonstration promise de la flotte allemande en mer du Nord, destinée à fixer les navires de la Home Fleet. Cela n’empêche pas les Irlandais de se soulever. Au cours de la révolte de Pâques, Dublin tombe aux mains de 12 000 insurgés armés jusqu’aux dents. Ils proclament la République indépendante d’Irlande. Une division britannique doit être acheminée dans l’île pour rétablir l’ordre, après une sanglante bataille dans les rues de Dublin.

 Il est désormais impossible de recruter des soldats irlandais. Les Anglais sont contraints de laisser des effectifs importants dans l’île, pour prévenir toute nouvelle révolte. L’Irlande est devenue la plaie ouverte de l’Angleterre en guerre.

Sir Roger Casement. Protestant de l’Ulster, Anglais de naissance, cet ancien diplomate est exécuté à Londres le 3 août.

Parade de l’Irish Citizen Army devant le Liberty Hall, hôtel des Douanes et quartier général des insurgés. Au matin de Pâques, la Citizen Army et les volontaires irlandais fusionnent pour former l’Ira (Irish Republican Army)

Le 12 mai 1916 Dublin: le premier ministre britannique, Lord Asquin, quitte la prison de Richmond Barracks, où il vient de s’entretenir avec les chefs arrêtés du Sinn Fein.

MAI-JUIN 1916

LA BATAILLE DU JUTLAND

Le 31 mai 1916, une grande bataille navale s’engage au large de Skagerrak, entre la Norvège et le Jutland danois. L’amiral allemand von Cheer est décidé à frapper un grand coup pour enlever à l’Angleterre la maîtrise de la mer du Nord.

L’escadre de l’amiral Hipper doit croiser vers la Norvège, et y attirer les croiseurs de bataille de l’amiral Beatty. La flotte de haute mer, qui suit de près au sud, interviendra alors dans sa pleine force et anéantira l’escadre anglais isolée, à l’ouest du Skagerrak. Tel est le plan de von Scheer, que boulverse un imprévu.

Le renseignement navale anglais a percé le code allemand. L’Amiral anglais Jellicoe porte l’ensemble de ses forces, les croiseurs de Beatty en tête, au devant de la flotte allemande. Von Scheer se trouve en présence de la totalité de la grande flotte.

Beatty, aussitôt attaqué, a d’abord du mal à se dégagé seul, mais il est rejoint par le gros de l’ecadre. Von Scheer engage le grand duel à 19 heures, mais il est aussitôt surclassé. Il s’enfuit en sacrifiant des croiseurs de bataille et ses destroyers en une charge à mort. Il a coulé 14 navires anglais, dont 6 croiseurs en perdant lui même 11 navires seulement dont 5 destroyers 6 945 marins britanniques ont été tués, contre 3 058 Allemands. L’amiral  Jellicoe n’a pas oser poursuivre l’ennemi de nuit, par crainte des attaques de torpilleurs, Mais il a gardé la maîtrise de la mer. Désormais la flotte allemande ne sortira plus du port.

Sir David Beatty 1871-1936, commandant les croiseurs de bataille britanniques. Ancien commandant des canonnières de Kitchener en Égypte et aide de camp d’Édouard VII de 1908 à 1910, il a déjà livré de brillants combats à Heligoland (28 août 1914) et au Dogger (24 janvier 1915).

Le 1er juin vers 18 h 30: un cuirassé allemand touché de plein fouet par le croiseur cuirassé HMS Warspite. Ce dernier, durement frappé, doit se retirer peu après.

Le HMS Invincible, croiseur de bataille de l’amiral Hood, une demi-heure après sa destruction. A 19 h 33, un obus allemand frappe la tourelle centrale de ce fleuron de la flotte anglaise (20 000 tonneaux, 8 canons de 305 mm). Les soutes explosent, tuant l’équipage, sauf 5 hommes, y compris l’amiral. A côté de l’invincible, le HMS Badger, à la recherche des survivants.

JUIN 1916

LA DERNIÈRE OFFENSIVE ALLEMANDE À VERDUN

En juin 1916, les Allemands lancent leur dernière offensive sur le front de Verdun. Falkenhayn a défini la guerre d’usure, en escomptant un rapport de deux à cinq des pertes allemandes et françaises.

Tous les moyens d’artillerie, les gaz asphyxiants, les lance-flammes sont mis en oeuvre pour causer le maximum de pertes à l’ennemi. La survie sur le champ de bataille martyrisé, exfolié, réduit à un champ d’entonnoirs boueux tient du prodige.

Le canon allemand tire jour et nuit. Les hommes de renfort acheminés en première ligne par d’étroits sentiers marchent pendant dix heures pour rejoindre leurs emplacements. Les tranchées sont constamment détruites par les obus. L’évacuation des blessés est problémathique. Le très grand nombre des disparus, ensevelis dans la boue, inquiète l’État-major. Pour contenir les offensives ennemies, il faut fournir en renfort deux divisions nouvelles par jour. Les morts ne peuvent être enterrés que dans des fosses communes. Les sous-sols de Verdun devient un gigantesque cimetière. Les pertes allemandes qui deviennent bientôt équivalentes aux pertes françaises: l’État-major de Falkenhayn a perdu son pari macabre.

Une vue aérienne du champs de bataille de Verdun. Le martelage de l’artillerie, qui créé ce paysage lunaire, s’est retourné contre les Allemands. Il crée un terrain impraticable pour les troupes d’assaut et il offre aux Français des pauses pendant le réaprovisionnement en obus.

Un canon de 305 mm. En juin, le pilonnage redouble d’intensité, avec emploi des obus à gaz.

Une tranchée remplie de cadavres aux Caurières.

25 septembre 1916 au bois Saucisse: des brancardiers français se relayant pendant l’attaque.

Un poste de secours de seconde ligne sur le front de Verdun.

JUIN 1916

LE FORT DE VAUX

Les Allemands disposent sur le front de Verdun de 20 divisions au début du mois de juin. Ils veulent obliger les Français à renforcer ce front, pour empêcher l’offensive prévue sur la Somme en juillet. Plusieurs coups de butoir sont données dans les lignes françaises. L’assaut du fort de Vaux se heurte à la résistance désespérée du commandant Raynal, que ne peuvent dégager les troupes de renfort. Les Allemands lui rendent les honneurs militaires quand il se rend, à bout de forces, le 7 juin.

Le 11 est donné l’assaut contre Thiaumont, qui oblige les Français à reculer. Le 23, une poussée considérable, avec fortes concentrations d’artillerie, menace le fort de Souville, sauvé in extremis.

On redoute à Paris la chute de Verdun. Mais Joffre n’envoie que quatre divisions en renfort. Il pense que Verdun sera dégagée grâce à l’offensive Alliée sur la Somme. De fait, à partir du 24 juin, Falkenhayn, renonçant à recherché la décision à Verdun, commence à réduire ses effevtifs. Nivelle et Mangin ont gagné: le front de Verdun a tenu bon.

Menacé par la dernière poussée allemande, Verdun est devenu une véritable citadelle.

Dès le 2 juin, les Allemands s’emparaient des coffres nord (point noir): sans secours, harcelés au lance-flammes, les défenseurs résistaient cependant sans espoir. C’est finalement la soif qui vin à bout des hommes de Raunal.

7 juin 1916: le commandant Raynal, défenseur de Vaux. La veille, le commandement français l’a fait commandeur de la Légion d’honneur. À gauche, son vainqueur, le lieutenant Muller-Verner de Westphalie.

JUIN-AOÛT 1916

LA SURPRISE DE BROUSSILOV

En avril, Conrad attaque sur le front italien. Le 15 mai, les Autrichiens perçent et prennent Asagio. Les Italiens abandonnent 30 000 prisonniers et 300 canons.

L’attaque autrichienne incite les Alliés à demander aux Russes une offensive de dégagement. Dès le 20 avril, Alexeiev a concentré sur le front sud-ouest quatre armées commandées par Broussilov.

Le 4 juin sur 50 km, de Tarnopol à Lutsk, les russes s’élancent. La surprise de Broussilov est complète: Les Autrichiens perdent pied: leur IVe  armée est en déroute. La VIIe armée recule. Ils n’ont pas de réserves. Les Allemands rappellent en hâte cinq divisions des fronts de l’Ouest et du Nord: ils lancent en juillet une contre-offensive qui échoue dans le flanc des Russes. Les Autrichiens doivent reculer de 100 km, jusqu’aux Carpates. Le 15 juillet leur centre est enfoncé. Mais les Russes manquent d’artillerie et d’aviation pour poursuivre: fin août Broussilov doit s’arrêter, sans pouvoir franchir le col des Tatars.

Les Austro-Hongrois et leurs Alliés allemands ont perdu dans la bataille 378 000 prisonniers, Un échec lourd de conséquences: les Roumains sont tentés désormais d’entrer en guerre aux côtés des Alliés.

Broussilov (1853-1926),  entouré de son état-major

Prisonniers autrichiens de l’offensive Broussilov.

JUILLET 1916

LA SOMME ROUGE DE JUILLET

Le 1er juillet, dès l’aube, les Franco-Britaniques sortent des parallèles de départ sur la Somme. Haig a lancé 26 divisions au nord du fleuve, Foch 14. Deux mille pièces d’artillerie ont tonné pendant sept jours sur un front réduit de 15 km: c’est la réplique de Verdun.

L’attaque française, d’un seul bond, prend la première position. La percée est presque réalisée dans la soirée. Mais les renforts allemands arivent et repoussent les assillants. Les Anglais se font tuer pour le bois de Mametz. Les Français pour le village de Biaches. Perdant 54 470 hommes dont 19 000 tués. Les britanniques connaissent le jour le plus sanglant de la guerre. Pendant quinze jours, les renforts accourent, au rytme de deux divisions par jour. Les Allemands alignent bientôt 18 divisions, et la bataille continue.

Le 20 juillet, Foch et Haig reprennent l’offensive. Ils s’obstinent en vain, comme en juin Falkenhayn à Verdun. Il est clair que le martèlement de l’artillerie ne peut venir à bout de fortifications de campagne organisées. Au début d’octobre, la bataille est terminée. Le seul résultat obtenue par Foch est l’usure de l’artillerie allemande. Elle a dut engager 69 divisions dans la bataille organiser à son tour la noria du feu. Les pertes sont de 267 000 hommes, dont 6 000 officiers. Celles des français sont si élevées que Foch est limogé par Joffre et tenu pour bouc émissaire de cette sanglante opération.

28 Juin 1916: le 4e bataillon du Worcestershire Regiment, se reposant à Acheux avant de monter en ligne. Intégrés à la 29e division, ils échouront devant Beaumont-Hamel le 1er juillet.

Quatre Indiens portent sur une civière un de leurs officiers blessés.

La plaie des Britanniques: la mitrailleuse allemande Maxim MG 08

Enterrement d’un poilu dans la Somme.

Leur artillerie lourde assure aux Français des progrès plus conséquents que leurs homologues anglais. Ici, une pièce de 400 mm sur voie ferrée, au ravin d’Harbonnières, le 6 juin 1916.

AOÛT 1916

LA DÉCONVENUE DES ROUMAINS

Les Roumains sont tentés d’entrer dans la guerre en raison des échecs répétés des armées austro-hongroises. Ils brûlent de conquérir la Transylvanie peuplée de Roumains.

Pendat l’été, le moment favorable, le général italien Cardona vient de remporter un succès sur les Alpes, que les Autriciens ont du dégarnir pour résister aux Russes. S’il n’a pu s’emparer de Gorizia, sur le front de l’Isonzo, il a fait 18 000 prisonniers. Le 17 août 1916, les Alliés obtiennent un traité d’alliance avec la Roumanie. Les Russes et les Franco-Britanniques du front de Salonique promettent d’intervenir contre les Bulgares. Le 28 août, la Roumanie entre en guerre.

À cette date, l’offensive Broussilov est déjà arrêtée. Les Roumains ont trop tardé. Renforcés par les Allemands, les Bulgares et les Turcs attaquent Dobroudja des Roumains  dont le gros des forces s’est arrêté en Transylvanie. Deux armées rassemblées en Hongrie par Mackensen attaquent le 25 septembre en Transylvanie. Le 4 décembre, les forces venues de l’ouest et du sud font jonction. Le 6 décembre, elles entrent dans Bucarest. En deux mois, les Allemands se sont rendus maîtres du blé et du pétrole roumain.

Mais cette offensive a fragilisé le front allemand de l’Ouest, où les Alliés peuvent marquer un succès décisif à Verdun.

L’entrée en guerre des Roumains: bénédiction des drapeaux.

Une charge de la cavalerie roumaine. Très courageux mais inexpérimentés et mal équipés, les Roumains perdent 460 000 hommes, tués ou blessés, sur 750 000 mobilisés.

La retraite des Roumains: elle se déroule en bon ordre. Franchissant la Sereth, avec l’appui tardif des Russes, les Roumains se regroupent en Moldavie.

OCTOBRE 1916

LA VICTOIRE À VERDUN

Nivelle a remplacé Pétain au début de mai sur le front de Verdun. Après la dernière offensive allemande de juin, il prépare la reconquête du champ de bataille, avec l’aide de Mangin.

Les Allemands ont du dégarnir leurs lignes pendant la bataille de la Somme, et prélever des divisions à l’Ouest pour intervenir contre les Russo-Roumains.L’usure de l’armée française ne permet pas à Joffre d’accorder des renforts importants à Nivelle, mais il reçoit des canons lourds et du nouveau matériel d’infanterie. La synchronisation des armes et l’emploi systématique de l’aviation permettent de reconquérir les positions perdues. L’attaque du 24 octobre est un succès, la reprise du fort de Douaumont est saluée comme une victoire. Vaux tombera plus tard, le 2 novembre. Nivelle et Mangin apparaissent désormais comme les maîtres de l’offensive.

C’est Nivelle que le président du Conseil Aristide Briand place à la tête de l’armée francaise le 2 décembre 1916. Joffre est remercié, nommé maréchal de France. En dépit des offres de médiation du président Wilson, les bélligérants veulent poursuivre la guerre jusqu’à la victoire.

Le général Mangin (1866-1925) : le vainqueur du 24 octobre est le grand bénéficiaire du succès français, avec son supérieur Nivelle. Ces deux spécialistes de l’offensive seront limogés après l’échec du Chemin des Dames.

Les Français bénéficient d’un entraînement spécial pour l’assaut. Ici, une section de mitrailleurs en Lorraine, le 20 octobre.

 

Cette pièce de 400 mm sur voie ferrée, en dehors de l’amusement qu’elle procure aux artilleurs, est la clef de la bataille. Dans la nuit du 23 au 24 octobre, un gros obus touche le dépôt du génie de Douaumont, forçant la garnison allemande à évacuer les lieux.

La charge du 24 octobre à 11 h 40, au moment où la première vague française atteint la première ligne allemande. L’assaut s’est fait comme à l’exercice.

L’entrée de Douaumont repris. Un poste de secours est installé dans les fossés.

FIN 1916

L’ORIENT EST EN FEU

Les Turcs ne parviennent pas plus que les Allemands, et malgré le soutien qu’ils reçoivent de leurs alliés, à obtenir la décision sur leurs front. Les Senoussis qu’un général turc tente de soulever dans les déserts d’Égypte et de Libye sont réduits à l’impuissance par le Camel Corps. Dans le Chatt el-Arab, les Turcs bloquent une armée anglaise qui remontait la Mésopotamie, dans le Kut el-Amara. La ville est prise le 29 avril et les Anglais fait prisonniers. En juin, le colonel Lawrence a réussi à soulever les tribus du désert d’Arabie et, le 4 novembre, Hussein prend le titre de roi.

Les Turcs sont impuissants à juguler ce soulèvement, car les Russes leur mènent la vie dure sur le front de Caucase: Iouenich réussit à prendre la ville arménienne d’Erzurum, attaquant par –25o C et trois mètres de neige. Les renforts envoyés de Constantinople ne réussissent pas à venir à bout des Russes. Sur le front d’Orient, les Turcs sont partout en position défensive, et les Anglais préparent au Caire, avec le concours des Arabes, la conquête de la Palestine et de la Syrie. Mais le corps expéditionnaire allié de Salonique n’est pas en mesure d’enfoncer le front bulgare.

En Mésopotamie: un convoi britannique au repos dans une palmeraie proche du Tigre.

Des mitrailleurs arabes en opération dans le Hedjaz. Le premier effet de leur révolte est d’isoler la garnison turque du Yémen.

FIN 1916

LE GUÊPIER DE SALONIQUE

Le Franco-Britanniques ne sont que 100 000 sur le front de Salonique au 1er janvier 1916. Le roi Constantin de Grèce les tolère, mais son armée les surveille. Si les Bulgares entrent en Grèce, les Grecs ne se battront sans doute pas aux côtés des Alliés. De Salonique, Sarrail a pourtant reconstitué un front où il intègre progressivement les Serbes rescapés de Corfou, ainsi qu’une brigade russe. Ces troupes combattent en Macédoine occidentale d’août à novembre 1916, contre 10 divisions bulgares de 30 000 hommes, renforcées d’Autriche et d’Allemands. Ils repoussent en août une attaque bulgare, s’emparent de Florina, entrent en novembre dans Monastir, proche de la frontière serbe, mais ne peuvent progresser plus au nord. Sur 94 000 Serbes engagés, 33 000 ont été tués ou blessés.

Pendant l’été, les Alliés ont beaucoup souffert du paludisme, responsable de plus de 100 000 évacuations. Près de 6 000 hommes sont morts des fièvres. Les offensives inachevées de l’automne et de l’hiver ont découragé le corps expéditionnaire qui s’interroge sur les raisons de sa présence à Salonique.

L’organisation du camp retranché en octobre 1915: Français exécutant des travaux de défense près du Vardar.

La région du camp retranché de Salonique.

Un zeppelin allemand a terrorisé Salonique, bombardant la ville dans la nuit du 31 janvier au 1er février 1916. Abattu au-dessus du Vardar en maim sa carcasse et ses bombes non explosées deviennent une des attractions de la cité, près de la Tour Blanche.

Les combats acharnés autour de Salonique: Ces Britanniques, bombardés par un Taube, trouvent encore le temps de sourire.

Des Français pris sous le feu de l’artillerie bulgare aux abords du camp retranché.

L’attente: parvenus au seuil de la Serbie, Français et Serbes préparent la revanche du désastre de 1915.


27/04/2013
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LA GRANDE GUERRE 1917

1917

1917: Tous les fronts sont bloqués, à l’Ouest comme à l’Est, en Turquie comme en Russie, en France et en Italie comme à Salonique. La révolution russe de février ne provoque pas encore de graves désordres dans la carte de la guerre, puisque la nouvelle République ne cesse d’être belligérante. Mais la reprise de la guerre sous-marine entraîne, en avril, l’entrée en guerre des État-Unis et les premiers débarquements des doughboys en France.

Ce renfort est opportun, après la vague de mutinerie qui affaiblit l’armée française, saignée à blanc par l’affaire manquée du Chemin des Dames en avril-mai. Les offensives sont impossibles à l’Ouest avant l’arrivée des renforts américains et la sortie des chars et des avions. Après la révolution d’Octobre, la Russie se retire de la guerre. Les troupes allemandes de l’Et refluent vers l’Ouest: l’assaut final se prépare, alors que les alliés turcs et austro-hongrois de l’allemagne chancellent, en proie à des troubles intérieurs.

Soldat canadien revenant du front, couvert d’argile. À Vimy en avril 1917, les Canadiens écrivent leur plus belle page de gloire dans le conflit.

MARS 1917

LA RÉVOLUTION RUSSE

L’émeute de la faim qui éclate le 8 mars (calendrier occidental) à Petrograd dégénère rapidement en révolution, quand la mutinerie du régiment Volinski entraîne la défection des troupes et l’instauration d’un cabinet libéral bourgeois présidé par le prince Lvov. Le Tsar, dont les généraux ne veulent pas accepter le risque de guerre civile, est contraint de partir. Il abdique le 15 à minuit, dans son wagon d’état-major à Pskov. Le grand-duc Michel, son frère, renonce à son tour au trône.

La Russie restera-t-elle dans la guerre ? Le ministre des Affaires étrangères, Miliokov, l’assure aux Alliés. Mais Lénine, de son exil suisse, proclame que les prolétaires veulent la paix. Le Soviet de Petrograd ordonne le partage des terres entre les paysans et veut obtenir l’ouverture de négociations avec l’Allemagne.

Les régiments sont décapités par la démission des officiers tsaristes. La discipline n’existe plus. Des détachements de propagande allemands et autrichiens expliquent aux soldats, dans les rencontres de fraternisation, qu’ils doivent rentrer au village pour bénéficier du partage des terres. L’armée russe, démoralisée, ne compte déjà plus.

Nicolas II (1868-1918) dans le parc du château royal de Tsarskoïe Selo, près de Petrograd. Depuis le 22 mars, il y est prisonnier de son ancienne armée.

Petrograd, mars 1917. La foule défile devant le Palais d’hiver, en l’honneur de la liberté recemment reconquise. Les militaires se mêlent aux civils. L’enthousiame patriotique règne encore en Russie.

Milioukov(1859-1943)

Ministre des Affaires étrangères du gouvernement provisoire. Dans une note du 1er avril, il assure aux Alliés que la Russie poursuivra la lutte jusqu’à la victoire.

Mars 1917. Après une des journées sanglantes de mars, un factionnaire garde les corps des victimes de la Révolution. Elles serontenterer au Champs de mars le 5 avril, devant un million de personnes. La mise en bière de chaque cercueil sera saluée d’un coup de canon tiré depuis la forteresse Pierre-et-Paul.

JANVIER-AVRIL 1917

LA REPRISE DE LA GUERRE SOUS-MARINE

En torpillant tous les navires, y compris les neutres, dans les zones du blocus alliées, le commandement allemand se fait fort d’affamer la Grande-Bretagne et de l’acculer à la paix. L’Empereur et la diplomatie allemande doivent accepter le Diktat de l’État-major et bafouer les promesses faites à Wilson: le 9 janvier, Guillaume II a donner l’ordre de reprendre la guerre sous-marine.

Le début des opérations est fixé au 1er février. Wilson remet ses passeports à l’ambassadeur d’Allemagne mais ne déclare pas encore la guerre, à laquelle il doit préparer le pays. Il souhaite faire revenir l’Allemagne à la raison. Il attend une provocation délibérée pour se décider.

Les succès de la campagne des sous-marins sont spectaculaires: 540 000 tonneaux sont coulés en février, 578 000 en mars, 874 000 en avril. Les mesures prises par l’amiral Jellicoe sont inefficaces. Le groupement des navires en convois protégés les fragilise, en les désignants aux coups des sous-mariniers. Sur 142 engagements avec des torpilleurs, 6 seulement provoquent la perte du sous-marin. Les résultats dépassent les prévisions. L’Allemagne est en passe de gagner la guerre sur mer.

Juin 1917. Un petit sous-marin allemand apporte les nouvelles à un sous-marin de haute-mer. La politique de construction allemande adapte les submersibles à la tâche et au théâtre d’opérations: côtiers ou océaniques, torpilleurs ou poseurs de mines. Trente-huit types de U-Boote sont ainsi développés jusqu’en 1918.

Juin 1917. Un petit sous-marin allemand apporte les nouvelles à un sous-marin de haute-mer. La politique de construction allemande adapte les submersibles à la tâche et au théâtre d’opérations: côtiers ou océaniques, torpilleurs ou poseurs de mines. Trente-huit types de U-Boote sont ainsi développés jusqu’en 1918.

Le Deutschland, un cargo sous-marin capable de transporter 740 tonneaux conçu en 1916.

AVRIL 1917

L’ENTRÉE EN GUERRE DES ÉTATS-UNIS

Les exportateurs américains, victimes de la guerre sous-marine, commence à souhaiter l’entrée en guerre des États-Unis parce qu’ils ne vendent plus leurs armes, leur coton, leur blé, leurs machines aux Alliés. Ils rejoignent dans leur indignation les banquiers privés, comme Morgan, qui ont avancé de très fortes sommes aux Alliés et souhaitent leur victoire.

 La maladresse de la diplomatie allemande. Qui encourage la lutte du Mexique contre les États-Unis, le torpillage de deux navires américains de commerce, l’Algonquin et le Virgilentia, mettent le feu aux poudres. Wilson, qui avait déjà accepté d’armer les cargos américains, obtient du Congrès américain l’entrée en guerre, le 6 avril 1917.

Le service obligatoire doit fournir un million d’hommes en 1918. Il est admis que les États-Unis ne mèneront pas seulement la guerre sur mer, mais qu’ils interviendront en Europe de toutes leurs forces. Ils entraînent dans la lutte nombre d’États américains et la Chine. Ils souhaitent aussi une proche victoire sur l’Allemagne. Mais les sous-marins laisseront-ils les transports de troupes débarquer les Doughboys dans les ports anglais et français? Une course de vitesse est désormais engagée avec l’État-major allemand. Londres et Paris décident de prendre les devants, craignant l’arrivée trop tardive des renforts américains: ils lancent une dernière offensive, prévue pour avril, celle du Chemin des Dames.

2 février 1917. Le président Wilson annonce la rupture des relations diplomatiques avec l’Allemagne. Le 2 avril au Sénat, le 6 à la Chambre des représentants, il obtient l’entrée en guerre.

6 avril 1917. A la faveur de l’entrée en guerre des États-Unis, des milliers de jeunes gens se précipitent dans les rues de New York pour manifester leur contentement.

Les Américains représentent un facteur inédit dans la guerre: une démocratie placée en dehors du jeu traditionnel des alliances politiques et familiales. Une nouveauté perçue par Abel Faivre dans cette caricature.

Le 19 avril 1917. Parade monstre dans les rues américainnes: plus de 75 000 Américains manifestent pour stimuler les enrôlements. Wilson favorise une propagande aussi intensive que nécessaire. En juin 1917, il manque encore 70 000 hommes à l’armée américaine.

Un poste de recrutement de l’US Army dans les rues de New York. A défaut de volontaires, la loi du 28 avril instaure la conscription des hommes de 21 à 30 ans.

AVRIL 1917

NIVELLE OBTIENT LE FEU VERT

En décembre 1916, une conférence militaire interalliée a décidé d’engager une grande offensive des Anglais sur la Somme, des Français sur l’Aisne. Les Italiens, les Russes, les rescapés de l’armée roumaine doivent aussi attaquer. On recherche à l’Ouest une bataille de rupture. Neville en est chargé.

Il promet de percer en deux jours, avec des moyens techniques nouveaux, les chars, les tracteurs à chenilles, les avions reliés aux batteries par radio. Il promet des miracles. Il réussi à obtenir l’appui des Anglais, dont le concours sera moins important que prévu, Haig voulant conserver des forces pour attaquer dans les Flandres.

Hindenburg, qui commande désormais sur le front de l’Ouest, a pris les devants en raccourcissant sa ligne fortifiée, une première fois le 25 et 25 février, puis, amplement, dans la nuit de 12 au 13 mars. Ce repli stratégique déconcerte les Alliés, qui doivent revoir leurs plans.

Le gouvernement Briand, responsable de l’opération, démissionne le 14 mars, avant que l’action ne s’engage. Ribot, qui lui succède, accepte de poursuivre à l’instigation de Poicaré. Malgré les réticences du ministre de la guerre Painlevé et de quelques généraux, dont Pétain. Nivelle obtient sa liberté d’action à Compiègne le 6 avril. Les ordres sont donnés: dès le 9 avril, et le 16 dans les lignes francaise.

Le général Robert Nivelle (1856-1924) à son bureau. Colonel en août 1914, ce général polytechnicien adû son ascension fulgurante à la méthode offensive éprouvée à Verdun en octobre et décembre 1916.

19 mars 1917, à Bapaume. Alors que les ruines fument encore et que des combats se déroulent dans les faubourgs, la fanfare du 19e bataillon entre sur la grande place, à la tête des troupes australiennes.

La détresse des libérées: à Frétoy, dans l’Oise, des soldats français aident une octogénaire à passer un pont démoli.

17 mars 1917. Au deuxième jour du retrait allemand sur la ligne Hindenburg, les Français occupent Roye. Ils sont accueillis en libérateurs par la population, dans une ville volontairement dévastée sur l’ordre du haut commandement allemand.

AVRIL 1917

LES CANADIENS À VIMY

Haig devait finir par tenir ses engagements, en dépit de ses réticences, et attaquer le 9 avril comme prévu: la IIIe armée remonterait la Scarpe, couverte par les Canadiens de la 1e armée qui avaient pour tâche de prendre la butte de Vimy. La Ve armée attaquerait de concerve, à l’est de Bapaume. Le corps australien interviendrait ensuite. Cette offensive sur la Scarpe était destinée à fixer les divisions de réserve allemandes, en attendant l’opération principale, menée par les Francais sur le Chemin des Dames.

Les généraux Horne et Allenby avaient attaqué le long de la rivière, avec l’aide des tanks qui avaient fait leur apparition sur le front dès 1916. Quatre divisions canadiennes avaient été nécéssaires pour prendre la butte rouge de Vimy, truffée d’abris bétonnés et de nid de mitrailleuses. Les Canadiens avaient fait 10 000 prisonniers, mais ils accusaient de très lourdes pertes. Les Australiens, qui venaient en renfort, avaient été si éprouvés qu’on du les retirer du front. Les Anglais, s’ils n’avaient pas réussi à percer, avaient douloureusement rempli leur contrat: Aux Français de prendre le relais.

Avril 1917. Des éclaireurs cyclistes anglais vont en avant surveiller les mouvements des Allemands en retraite. Tout autour, les ruines laissées par l’ennemi. Mais surtout la boue, qui va marquer les combats des britaniques en 1917, de Vimy à Passchendaele.

Un convoi de ravitaillement de l’artillerie canadienne sur la crête de Vimy. L’attaque du 9 avril a été préparée par un bombardement intensif de cinq jours, qui explique largement son succès.

Le 16 avril 1917, à la fin de la bataille d’Arras. Des Britaniques blessés reviennent du combat, soutenus par leurs camarades et par des prisonniers allemands. Du 9 au 14, 13 000 Allemands ont été pris. Même s’ils n’ont pas réalisé la percée décisive, les Britaniques viennent d’accomplir leur plus belle avancée depuis le début de la guerre des tranchées.

AVRIL 1917

LE MASSACRE DES 15 ET 16 AVRIL

Le 16 avril, les trente divisions des Ve et VIe armées, Mazel et Mangin, se jettent à l’assaut du Chemin des Dames, sur le front de 70 km, de L’Oise à la montagne de Reims. Nivelle comptait sur la surprise: les Allemands sont renseignés. Ils comptait sur la préparation d’artillerie: le mauvais temps comdamne les aviateurs à l’impuissance. Il croyait enlever d’un bond les deux positions: les unités parviennent tout juste à forcer la première, au prix de très lourdes pertes. La seconde position n’est détruite que dans la dépression entre Craonne et Berry-au-Bac.

Les Français se sont fait massacrer par le tir des mitrailleuses sous abris, que les tirs de 155 n’ont pas réussi à éliminer. Les Allemands sont restés à l’abri du bombardement dans les cavernes fortifiées comme la caverne du Dragon, sur le Chemin des Dames, qui avaient des sorties au nord et au sud, permettant de tirer dans le dos des grenadiers et fusiliers français qui avaient réussi à franchir la première ligne. Les troupes coloniales de Mangin ont été décimées pour un très mince profit.

À Paris, le parlement s’émeut: Neville n’a pas réussi. On parle autour du ministre Painlevé d’une hécatombe. Faut-il poursuivre?

Les préparatifs de l’offensive du Chemin des Dames: on remplit les caissons assurant le transport des munitions entre le dépôt et les batteries en ligne. Un barrage roulant massif est censé assurer la percée française.

Nivelle compte sur les armes les plus modernes pour réussir, par exemple ce lance-flammes portatif.

Le départ des Français entre la ferme de Froidmont et l’épine de Chevreghy. La progression sur le plateau a pour objectif la vallée de l’Ailette. Au 5 mai, 135 000 Français auront été mis hors de combat.

Au soir du 16 avril, les chars rescapés reviennent du Chemin des Dames. Aucun des 132 chars Saint-Charmont engagés n’a pu percer: 57 ont été détruits, 64 endommagés, 11 demeurent idemnes.

MAI 1917

L’ÉCHEC DE MAI

Nivelle ne veut pas perdre la face, le gouvernement non plus Haig demande la poursuite de l’offensive, qui lui permettra d’attaquer dans les Flandres, selon son projet initial. Painlevé accepte la relance de l’offensive, avec des buts plus limités: s’assurer de la ligne du Chemin des Dames et des monts de Champagne, pour protéger Reims. La Xe armée de Micheler et la IVe d’Anthoine, sous la responsabilité de Pétain, attaqueront du 30 avril au 5 mai.

De nouveau les fantassins se lancent à l’assaut de positions très protégées, de véritable forteresses truffées de mitrailleuses et de Minenwerfer. Les Russes perdent l’essentiel de leur effectif dans la montagne de Reims. Le 9 mai, les Français comptent leurs morts: au moins 30 000 tués et plus de 100 000 blessés, tel était le lourd bilan d’une offensive que l’on croyait décisive. Vingt-quatre divisions d’infanterie étaient complètement usées et 17 avaient du être remplacées. Les chars engagés dans la trouée de Berry-au-Bac et au moulin de Laffaux avaient joué un rôle utile, mais ils n’avaient pu emporter la décision. Quant au tracteurs à chenilles promis à Nivelle, ils n’étaient pas au rendez-vous.

Des chars Saint-Chamond traversen le village de Dommiers, vers le front.

Un tank français écrasé pendant l’attaque. Les pannes, l’inexpérience de l’infanterie dans ce nouveau type de guerre, les pièges tendus par les Allemands, où les chars immobilés sont soumis à un pilonnage massif, tous ces éléments expliquent un échec cuisant.

La tranchée de Flensburg au Mont Comillet (cliché aérien pris le 13 mai 1917). Le martelage de l’artillerie a permis aux Français de conquérir le Mont le 17 avril, avant que, quelques heures plus tard, les Allemands, parfaitement à l’abri dans la ligne Hindenburg, ne les en chassent.

MAI-JUIN 1917

LES MUTINERIES ET LES GRÈVES DE L’INDUSTRIES DE GUERRE

Les mutineries de mais et juin 1917 sont une grève de la guerre. Elles affectent les unités placées sur la ligne du Chemin des Dames, qu’elles aient ou non été mêlées à l’offensive.

Dès le 16 avril, on note à l’État-major plusieurs refus de monter en ligne. mais le mouvement commence le 20 mai et gagne le proche en proche toutes les unités en ligne ou à l’arrière immédiat du Moulin de Laffaux à Auberive, sur les zones des IVe, Ve, VIe et Xe armées. Les tranchées sont tenues et l’ennemi n’attaque pas. Mais les fantassins refusent d’en sortir. C’est la grève des bras croisés.

Deux régiments parlent de marcher sur Paris. Le général Tauffleb doit affronter 200 mutins. Les officiers sont molestés quand ils veulent faire arrêter les meneurs.

Le mouvement se calme à la fin de juin. Pétain, général en chef depuis le 15 mai, réduit les condamnations à mort à 45, dont 43 sont suivies d’exécutions. L’un des condamnés se suicide. Le dernier, Vincent Moulia, un médaillé militaire, réussit à fausser compagnie aux gendarmes. Désormais, dans les lignes, le tour de permission est affiché, le ravitaillement amélioré, les centres de repos aménagés. On découvre que le poilu a des droits.

En mais, les ouvriers des industries se mettent en grève, même dans les usines de guerre. Le mouvement gagne toutes les activités, y compris la couture. Les midinettes et les arpettes arpentent les Champs Élysées.

La hausse des salaires en sont l’objectif, en raison de la vie chère, mais la puissante Fédération des métaux dirigée par Merrheim, qui regroupe 200 000 adhèrents, demande aussi une action internationnale contre la guerre de conquête. Le bassin industriel de la Loire est touché: on ne tourne plus d’obus, on ne sort plus de canons dans les aciéries de Saint- Étienne et de Firminy. Le mouvement est européen: en Italie, Turin est en état de siège. En Allemagne 125 000 ouvriers sont en grève dans les fabriques de minutions. Le gouvernement militarise les usines. En France, le ministre de l’intérieur Malvy choisi la méthode douce de la négociation, pour éviter les incidents graves. Tout rentre dans l’ordre à la fin de juin et les 100 000 ouvriers et ouvrières retournent au travail, quand les mutineries sont brisées au front.

Exécusion d’un mutin. Un cliché célèbre, mais qui ne reflète pas la relative clémence du commandement: moins de 50 exécutions sur près de 24 000 mutinés.

JUIN-SEPTEMBRE 1917 

LE DERNIER SURSAUT DE L’ARMÉE ROUGE

Le ministre Kerenski veut reprendre l’offensive, seul moyen de ne pas laisser se dissoudre l’immense armée du Star, Il parcourt les lignes de tranchées pour ranimer le patriotisme des soldats. Il remplace Alexeiev démissionnaire par le populaire Broussilov. Il promet que cette offensive sera la dernière. Le 24 juin, il ordonne la marche en avant. Le 1er juillet, 23 divisions russes s’élancent à l’assaut. Des lignes austro-allemandes dans le secteur de Lemberg, sur un front de 40 km. Le succès est immédiat, car les Austro-Hongrois croient l’armée russe démobilisée, incapable du moindre sursaut. Broussilov fait ce jour-là 10 000 prisonniers.

Mais les soviets des régiments discutent le lendemain des ouvertures de paix. Deux divisions de réserve refusent de monter en ligne. Broussilov ne peut poursuivre: Il n’y a aucun moyen d’obliger les troupes à se battre, dit-il. Le 19 juillet, les Allemands contre-attaquent. Les Russes perdent 160 000 hommes et abandonnent de nouveau la Galicie. Au nord, le 3 septembre, le général von Hutier prend Riga à la XIIe armée russe. Les Allemands sont en mesure de s’emparer à la fois des pays Baltes et de l’Ukraine.

Kerenski (1880-1970) se déplace au front pour ranimer la vaillance des troupes désorganisées. On le voit ici lors d’une tournée en juin 1917. A droite: le généralisme Broussilov.

Un meeting au front au mois de juin, Kerenski a su conserver une armée, notamment en satisfaisant le goût des soldats russes, ivres de liberté, pour la délibération. Mais l’échec de juillet va mettre fin aux illusions.

L’assaut du 1er juillet, ici, la deuxième vague d’attaque, menée par le général Glouschkov (en haut). Il est tué une heure plus tard.

En août, les Russes abandonnent le front en masse. Les toits mêmes des wagons sont couverts de soldats.

2 septembre 1917: les troupes allemandes de von Hutier passent la Duna vers Riga. Leurs offensives met pratiquement fin à la guerre germano-russe. Elles préfiguent aussi les coups de boutoir lancés en France l’année suivante.

MAI-OCTOBRE 1917

PÉTAIN LANCE LES MINI-OFFENSIVES

J’attends les Américains et les chars, dit Pétain en mai 1917. Il cherche cependant à relever le moral de l’armée francaise par des offensives limitées, employant de gros moyens d’artillerie, dans des secteurs où la supériorité numérique des assaillants est écrasante.

Il réussit ainsi à lancer dans le secteur de Verdun une mini-offensive sur la rive gauche de la Meuse qui aboutit à la reprise du Mort-Homme en août. En octobre, les mêmes moyens sont utilisés sur le site maudit du Chemin des Dames. Les Francais réussisent à s’emparer du plateau de la Malmaison. Pétain utilise dans ces attaques les premiers chars légers d’accompagnement d’infanterie, à peine sortis des usines Renault. Il attend leur livraison en grand nombre et la montée en ligne des premières divisions américaines pour concevoir des projets plus ambitieux d’offensive. Mais il sait qu’il devra faire face, si l’armée russe fait défection, à un retour vers l’Ouest des divisions allemandes du front oriental. Une raison de plus pour ménager ses effectifs.

Le général Pétain (1856-1951) décore les drapeaux des 51e et 87e régiments d’infanterie, qui s’illustrent le 20 août dans la reprise de la côte 304 à Verdun.

Des morts du 30e régiment d’infanterie, partis à l’assaut d’un chemin creux sur le plateau. Progressant de trou d’obus sous le feu des mitrailleuses, les hommes sont souvent tués d’une balle dans la tête, lorsqu’ils émergent pour faire le coup de feu. On peut voir le trou de sortie de la balle dans le crâne d’un poilu.

Les prisonniers allemands affluent, souvent des blessés pitoyables. Au premier plan, les Français s’apprêtent déjà à s’élancer à nouveau, vers la côte 156.6.

La section de Goutard vient d’arriver sur l’objectif, dont elle retourne immédiatement le talus.

JUILLET-DÉCEMBRE 1917

LES TANKS DE CAMBRAI

Le général Haig a retenu la leçon du Chemin des Dames et appliqué la nouvelle doctrine de Pétain: les mini-offensives. Il réussit en juin à enlever la côte de Messines sur un front de 16 km. Il divise sa grande attaque des Flandres en opération ponctuelles, déclenchées l’une après l’autre, pour user la résistance ennemie.

Du 22 juillet jusqu’à la fin d’octobre, l’armée britannique est sans cesse à l’assaut. L’attaque la plus spectaculaire, est celle du groupe blindé de Cambrai, la première de l’histoire: 400 tanks avancent en novembre sur les lignes de von Marwitz, précédés des chars grappins pour arracher les barbelés, de chars à fascines pour combler les tranchées. Les tanks pèsent 28 tonnes et leurs réservoirs contiennent 340 litres d’essence. Les Allemands les attaquent au canon: 179 sont détruits, 65 incendiés, 43 s’embourbent et 71 tombent en panne. Pour tenir les positions conquises par les chars, les Britanniques perdent 44 000 hommes et les Allemands 41 000. A quoi bon les chars?

Les quelques succès sont chèrement payés, comme la prise de Passchendaele en août. Les Allemands, constamment contraints de contre-attaquer, useront leurs réserves dans ces opérations ponctuelles. Mais l’armée anglaise en sort aussi sérieusement affaiblie.

20 octobre 1917: un train de tanks britanniques Mark IV attend de partir à la bataille de Cambrai. Sur leurs toits, les fascines destinées à les dégager au cas où ils s’embourberaient où seraient arrêtées dans une tranchée.

Les Anglais sur la route de Menin, dans la bataille de Passchendaele. Ces troupes des comtés du Nord attendent dans une tranchée d’appui leur tour pour marcher en avant.

OCTOBRE 1917

LE DÉSASTRE DE CAPORETTO

Pour ressouder l’alliance austro-allemande, Hindenburg décide d’aider l’armée Kund K à obtenir une victoire sur le front italien. Sept divisions allemandes aideront 6 divisions austro-hongroises à percer sur le front de l’Isonzo.

Le général allemand Otto von Below, qui commande l’opération, a bien calculé son itinéraire. Le 24 octobre 1917, les colonnes d’assaut attaquent dans les vallées, ouvrent une brèche à travers la montagne: c’est le désastre de Caporetto.

La IIe armée italienne est en pleine déroute. Les déserteurs se réfugient jusque dans les forêts des Abruzzes par dizaines de milliers. La IIIe armée du duc d’Aoste réussit à décrocher, non sans pertes, mais elle ne peut tenir sur la ligne du Tagliamento. Les retards de Conrad von Hötzendorf permettent au général Cadorna d’organiser une ligne de résistance solide sur la Piave. En novembre, son successeur Diaz y recevra le secours d’une douzaine de divisions franco-britaniques. Il a grand besoin d’effectifs, les Italiens ayant perdu à Caporetto 293 000 soldats et plus de 3 000 pièces d’artillerie. Avant longtemps, l’armée italienne ne pourra reprendre l’offensive.

24 octobre 1917: les troupes austro-allemandes font précéder l’offensive de Caporetto d’une attaque aux gaz. L’inefficacité des masques à gaz italiens est en effet notoire. L’utilisation des cylindres à gaz, illustrée ici, est archaïque et dangereuse, à cause des vents tournants. Depuis 1916, on préfère les obus à gaz.

L’arrivée d’un bataillon français à Castelfranco, noeud vital de communication, à l’arrière de la IVe armée italienne, qui résiste sur la Piave. A la mi-novembre, le général Fayolle prend le commandement des troupes françaises d’Italie. Le 3 décembre, les troupes françaises et britanniques sont en ligne.

FIN 1917

LA VICTOIRE NAVALE DES ALLIÉS

L’Allemagne doit être affamée par le blocus. L’objectif de l’amirauté britannique se trouve renforcé par l’entrée en guerre des États-Unis: tous les navires allemands internés dans les ports des nouveaux alliés sud-américains sont saisis et utilisés au profit des Alliés. Les arsenaux nord-américains quadruplent la flotte de commerce de l’Union.

Les sous-marins allemands s’essoufflent: le tonnage coulé baisse d’un mois sur l’autre, Ils ne sont plus que 84 à opérer en mai 1917, contre 102 en avril: les submersibles doivent être l’objet de longues révisions. Les Anglais ont organisé la défense: 100 000 mines ont constitué les lignes de barrages en mer du Nord. Huit mille navires légers ont été affectés à la chasse anti-sous-marine. Les torpilleurs escortent tous les convois, disposant d’une écoute sous l’eau de plus en plus efficace. Même si les Allemands coulent encore 351 000 tonneaux de navires allié ou neutres en septembre, c’est à 30 millions de tonneaux qu’est évaluée l’armada de commerce alliée. Les Allemands n’ont donc pas les moyens de lutter efficacement contre le blocus de leurs côtes occidentales. Ils doivent rechercher des ouvertures à l’Est.

Un sous-marin allemand échoué sur les côtes du Pas-de-Calais et détruit par son équipage. En octobre 1917, pour la première fois, les pertes allemandes dépassent le niveau des constructions de submersibles.

Les Américains apportent à la lutte anti-soumarine leur sens de l’organisation et leur capacité industrielle. Des types de chasseurs d’U-Boote, qui patrouillent les côtes de la Nouvelle-Angleterre.

Un canon anti-sous-marin.

NOVEMBRE-DÉCEMBRE 1917

LES ALLEMANDS SEULS MAÎTRE À L’EST

Dans la nuit du 6 au 7 novembre (calendrier occidental) éclate la révolution bolchevik à Petrograd. Seuls les élèves des écoles militaires défendent le Palais d’hiver. L’armée refuse de soutenir le gouvernement Kerenski. Du quartier général, le général Doukhonine annonce que les régiments du front ne manifestent pas le désir de soutenir le gouvernement contre l’emprise bolchevik. Kerenski s’enfuit le 14: la révolution est faite. Le 20 novembre, Lénine décide de demander la paix. Le cessez-le-feu est décrété le 5 décembre, après l’entrevue de Brest-Litovsk. Les négociations traînent pendant deux mois. Les Austro-Allemands obtiennent d’abord le 9 février 1918 un traité de paix avec l’Ukraine. Devenue autonome, qui leur promet des livraisons d’un million de tonnes de blé. Les troupes d’Hindenburg ont déjà occupé la Finlande et les pays Baltes. Le Kaiser, excédé des réticences des Russes, donne à l’armée l’ordre de reprendre son avance le 18 février.

Le 3 mars, Lénine signe la paix de Brest- Litovsk. La Russie abandonne la Pologne, les pays Baltes, et reconnaît la paix germano-ukrainienne. Le 5 mars, par les préliminaires de Buftea, l’Allemagne obtient la soumission de la Roumanie et d’importantes livraisons de blé et de pétrole. Les Austro-Allemands se sont ouverts l’espace économique oriental. Ils ont les moyens de poursuivre la guerre jusqu’à la victoire.

Avant Brest-Litovsk, les Allemands ourent une brèche dans les lignes pour l’arrivée des délégués russes.

Les Allemands dans la boue de Minsk, capital de la Russie blanche, occupée en mars 1918.

Mars 1918. Les Allemands font une démonstration de leur tenue impeccable dans les rues de Kiev.

NOVEMBRE 1917

CLEMENCEAU AU POUVOIR

Le 16 novembre 1917, le président de la République Raymond Poincaré, pour résoudre une nouvelle crise ministérielle, confie le gouvernement à Georges Clemenceau, ancien député protestataire de 1871 qui n’a jamais accepté que l’Alsace et la Lorraine fussent allemandes. Dans un climat politique déconcerté et divisé par les négociations de paix séparée avec l’Autriche-Hongrie, la France affirme sa volonté de poursuivre la guerre jusqu’à la victoire.

Clemenceau établit aussitôt une terreur patriotique. Il fait arrêter l’ancien président du Conseil Joseph Caillaux, qui passe pour être un partisan d’une paix blanche: il est aussitôt interné à la Santé avant son jugement en Haute cour. L’espionnite fait des ravages: l’espionne Mata Hari a été fusillée le 15 octobre. Clemenceau avait déjà contraint à la démission et à l’exil le ministre de l’intérieur Louis Malvy.

Il mène une guerre brutale contre les traîtres, déjà arrêtés ou victimes de son offensive: le député Turmel, agent allemand, Bolo Pacha, un afairiste lié au Bonnet rouge, un journal acheté par l’ennemi, Le sénateur Humbert, directeur de l’influent Journal. Clemenceau constitue un gouvernement de combat, sans la participation des socialistes. Il s’installe lui même rue Saint Dominique, au ministère de la Guerre et compte sur Pétain et sur Foch, le chef d’état-major, pour préparer l’armée au choc qui l’attend, quand les Allemands lanceront leur offensive à l’Ouest, avec les troupes revenues de Russie.

Le président Clemenceau. La chasse au traître lui semble une priorité pour le redressement du moral francais.

Épilogue de l’affaire Caillaux: en 1920, il est jugé par la Haute cour, présidée par Léon Bourgeois. On le voit ici à l’audience du 17 février. A ses côtés, ses avocats Moutet, Demange et Moro-Giafferi. Il est condamné à trois ans de prison.

Eugène Almereyda, agent allemand et fondateur du journal Pacifiste le Bonnet rouge. Il est retrouvé mort dans sa cellule le 20 août. Clemenceau, qui n’est pas encore président du Conseil, utilise l’affaire pour mettre en cause le  ministre de l’intérieur Malvy.

Bolo Pacha, agent germanophile de l’encien khédive d’Égypte, Abbas Hilmi. Son arrêstation est le prélude à l’affaire Caillaux.

DÉCEMBRE-1917

LA GRÈCE DE VENIZÉLOS ENTRE DANS L’ALLIANCE

Les Alliés ont perdu la Roumanie, mais ils ont gagné la Grèce. Le général Sarrail, qui commande le corps expéditionnaire à Salonique, ne peut plus supporter la présence à l’arrière de ses lignes de bandes d’irréguliers grecs, ni la germanophilie du roi Constantin.

Les Francais prennent le 11 juin 1917 l’initiative d’un ultimatum demandant l’abdication du roi dans les vingt-quatre heures, sous peine d’un débarquement au Pirée. Le roi se soumet, accepte de quitter le pays. Le républicain patriote crétois Vénizélo entre à Athènes et constitue un gouvernement pro-allié. Des divisions grecques seront désormais engagées sur le front de Salonique, compensant la défection de la brigade russe.

Mais l’ermée d’Orient connaît un été difficile: elle n’échappe pas à la vague des mutineries et Sarrail doit réprimer la révolte du 242e régiment d’infanterie, qui proteste contre l’absence de permissions. Beaucoup de soldats sont en Orient depuis près de deux ans. Jamais le paludisme n’a plus durement frappé le corps expéditionnaire. La stagnation du front fait dire à Clemenceau que l’armée d’Orient ne sert à rien. Il remplace Sarrail par Guillaumat, qu’il charge de réorganiser le front et les arrières, et de dégager éventuellement des effectifs pour le front de l’Ouest.

Des mitrailleurs grecs de l’armée royaliste. Il porte un uniforme à l’allemande.

Des volontaires vénizélistes quittant Salonique pour rejoindre les Alliés.

La flotte alliée mouille au Pirée pour intimider le roi Constantin. On distingue, de gauche à droite, un croiseur italien, deux sous-marins français, et les croiseurs français Bruix et provence.

Le gouvernement provisoire favorable aux Alliés, installé à Salonique le 9 octobre 1916. De gauche à droite, l’amiral Coundouriotis, le premier ministre Venizélos, le général Danglis.

DÉCEMBRE 1917

LES ANGLAIS PROGRESSENT EN ORIENT

Le maréchal Edmund Allenby conquérant de la Palestine et de la Syrie. Il sera fait vicomte de Meggido, du nom de sa victoire de 1918.

Les Turcs en Palestine en 1917: la boulangerie de campagne, au milieu du désert du Néguev.

 

Au début de 1917, les Russes tiennent encore leurs positions en Orient, notamment en Perse, où ils ont avencé très au sud. On voit ici les Cosaques faire jonction avec les Britanniques à Kasf-L-Shirin, au nord de bagdad.

Jérusalem, 11 décembre: Allenby félicite le colonel de Piépape, commandant de la colonne française du corps expéditionnaire.

Enjeu essentiel de la lutte en orient: le pétrole ici, les réservoirs du pipe-line Batou-Bakoum, convoités par les Turcs.

FIN 1917

LA GUERRE INDUSTRIELLE

En Russie, en Roumanie, au Proche-Orient, les puits de pétrole sont devenus un enjeu majeur. Les Alliés ont perdu les champs pétrolifères roumains, ils veulent disputer aux Allemands ceux du Caucase et de l’Orient. Ils ont besoin de carburant pour les camions de l’armée, les tracteurs, les chars, les automitrailleuses, qui sortent chaque jour plus nombreux des usines. La guerre est devenue industrielle. Pétain a commandé 3 500 chars Renault.

L’artillerie d’assaut est devenue indispensable dans les offensives de l’Ouest, pour faire pièce aux fortifications de campagne allemandes. L’aviation ne se contente plus d’observer les lignes ennemies: la chasse attaque les troupes au sol à la mitrailleuse, les bombardiers pilonnent les gares de rassemblement et les voies ferrées.

Pétain mise sur l’aviation, exige la construction d’escadres de bombardement de nuit de Bréquet 14 B2. Les usines françaises doivent livrer les nouveaux chasseurs Spad VII, et Spade XIII, rivaux de l’Albatros DIII, à raison de 13 000 exemplaires. Mais, au début de 1918, les Anglais alignent seulement 600 chasseurs, les Français 900 en face des 1 500 appareils allemands. Un immense effort reste à faire pour compenser des effectifs alliés par une supériorité matérielle. Mais il faut aussi s’adapter à la tactique allemande.

Un char Renault F.T. Canon.

Un atelier de montage de canons et de tourelles aux usines Schneider du Creusot.

Les premiers avions de l’armée canadienne, montés aux usines Aero, à Toronto.

FIN 1917

STOSSTRUPPEN CONTRE CHAMPS DE BATAILLE D’ARMÉE

Les Allemand ne comptent pas que sur leur supériorité en divisions pour l’emporter à l’Ouest. Ils ont mis au point une nouvelle technique d’attaque, qui leur permet de percer n’importe qu’elle ligne fortifiée, grâce à l’utilisation de troupes d’assaut (Stosstruppen) spécialement entraînées. Le 2e bureau francais a appris l’existence en Alsace de camps d’entraînement (kampfdschulen) divisionnaires, où les jeunes soldats sont soumis en un dressage de six semaines. Armée de fusil-mitrailleurs, de grnades, de mitrailleuses portables, de lance-mines et de lance-flammes, ils doivent occuper le terrain aux moindres frais, bénéficiant du feu roulant parfaitement synchronisé de l’artillerie et de l’appui constant des Minewefer.

L’attaque joue sur la surprise: une préparation d’artillerie violente mais très brève, sur un front court, précède l’assaut. Elle accable également d’obus les lieux de passage de renforts, les biplaces de reconnaissance Rumpler sont équipés des premières caméras à moteur électrique Siemens et du matériel photographique Zeiss. Les chasseurs Albatros foncent à 200 km/h sur les observateurs ennemis. Les escadrilles sont équipées de liaisons radio. Ludendorff dispose à la fin de 1917 de 56 Sturmdivisionnen prêtes pour la percée.

L’armée française n’a pas de Stosstruppen. Pétain encourage les soldats délite, grenadiers et voltigeurs dignes de l’insigne d’or des combats de première ligne. Clemenceau a décidé d’organiser un critérium interallié de combat à la baïonnette, corps à corps, et lancement de grenades. Mais, selon Pétain, le fantassin français n’a pas besoin de détachements d’entraîneurs pour donner l’assaut. Le général en chef est concient de la nouveauté de la technique allemande de percée. Aussi lance-t-il une instruction aux armées recommandant l’organisation en profondeur du champ de bataille, pour ne pas user toutes les forces en première ligne: il convient au contraire de laisser l’ennemi s’avancer, de le retenir sur des positions préparées à l’arrière, et de contre-attaquer en s’appuyant sur des môles de résistance puissament constitués aux ailes.

Des travailleurs chinois, italiens maghrébins, annamites, sont fournis en grand nombre pour aménager les champs de bataille d’armée. Mais tous les généraux français ne sont pas d’accord: Foch tient pour la résistance acharnée sur la première ligne. Clemenceau visite féquemment le front pour se rendre compte lui-même de l’état des travaux. Il peste contre les retards des divisions américaines.

Les Français sont passés maîtres dans l’art du camouflage: le cirque de Châlon-sur-Marne, où la IVe armée entrepose branchages et faux rochers.

Les Stosstruppen à l’entraînement. Ludendorff organise des manoeuvres divisionnaires pour ses troupes d’assaut, comme ici à Sedan en février 1918, où le thème est l’attaque en terrain élevé avec support d’artillerie.

FIN 1917

L’ARRIVÉE DES AMÉRICAINS EN FRANCE

À partir de juin 1917, date des premiers débarquements de doughboys dans les ports de l’ouest, les Français découvrent la guerre à l’américaine. Pas question pour le général Pershing d’engager son armée dans les amalgames que propose Pétain. Ses unités doivent combattre seules dans leur secteur, sous leur drapeau. Elles ne monteront en ligne que convenablement instruites, après avoir reçu leurs 75 et leurs 155 français, et leurs avions Spad.

Avant de combattre, construire: les pelleteuses, les Scrapers et les rouleaux compresseurs agrandissent le port de Brest, constrisent un camp pour 50 000 soldats surveillés par les M.P. à cheval. Deux itinéraires ferroviaires sont affectés au transport des divisions à partir de Bordeaux, Saint-Nazaire, Brest. Des régiments de génie, de la télégraphie, de l’intendance mettent en place les voies de communication et les relais, avec une usine frigorifique près de Tours  capable de fournir  500 tonnes de glace par jour et de stocker 16 millions de rations.

Le 15 septembre, 1 000 officiers apprennent dans les états-majors français les règles de la guerre de position. La première formée, commandée par le général Sibert, de Sommerviller. Pour les Américains, c’est le baptême du feu. Mais seront-ils assez nombreux au rendez-vous de l’offensive allemande de 1918?

Boulogne-sur-Mer, 13 juin 1917: l’état-major de la 1er armée américaine arrive en France, à bord du transport Invicta. A sa tête, le général Pershing.

Les premiers bataillons américains sont à Paris le 3 juillet, veille de l’independance Day. A la caserne de Reuilly ont lieu les premières fraternisations entre Teddies et poilus.

Les troupes de Pershing sont inexpérimentées. Force est donc de les entraîner durant de longs mois. Ici les soldats de la 42e division, protégés par des masques à gaz, s’exercent au lancer des grenades.

Le canon qui a tiré le premier coup de feu américain sur le front français : le 23 octobre 1917, le 6th Field Artillery était engagé à Somerviller, près de Nancy. 


28/04/2013
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LA GRANDE GUERRE 1918

1918 

La guerre piétine pendant trois mois. Les Américains débarquent et s’instruisent lentement. Les Anglais manquent d’effectifs, les Français sont à bout de forces. Les Allemands occupent l’Est européen et transportent leurs divisions disponibles vers l’Ouest pour les dernières offensives de la guerre, de mars à juillet, Ludendorff est convaincu qu’il n’a plus les moyens de gagner la guerre.

Il faut attendre pourtant jusqu’au 11 novembre pour que l’armistice soit signée. Le pouvoir civil tarde à en assumer la responsabilité. Les Empires ottoman et austro-hongrois sont abattus quand l’Allemagne résiste encore. Seul le développement de la révolution communiste dans les villes décide le Kaiser à abdiquer, sous la pression de l’armée. L’armistice est signé sans que l’Allemagne soit envahie. Dans l’Est de l’Europe, des armées alliées prennent position contre la Russie bolchevique, prenant le relais des Allemands désarmés.

L’arbitre de la paix et le président Wilson, qui débarque à Brest en décembre pour saluer les deux millions, de combattants américains qui ont permis la victoire. Il veut imposer à l’Europe la paix du droit, qui installe partout, sur la ruine des Empires, des démocraties et des nations indépendantes.

Pilote et mitrailleur d’un biplan français. La guerre aérienne prend en 1918 une ampleur jusqu’ici inédite: missions de reconnaissance, harcèlement des armées de Ludendorff puis soutien aux offensives de la victoire, et surtout bombardement stratégique, qui chez les Britanniques se traduit par la naissance de la Royal Air Force.

DÉBUT 1918

LES ANGLAIS ET LES FRANÇAIS MANQUENT DE TROUPES

En dépit de ses efforts, LIoyd George, qui gouverne presque dictatorialement l’Angleterre avec l’aide du War Cabinet, manque de troupes. Il a pris le risque d’une guerre générale pour mobiliser les ouvriers en surnombre dans les usines. Il vient de supprimer les sursis d’appel et d’envoyer au front les palfreniers et les garcons coiffeurs. Il a donné le droit de vote aux femmes qui travaillent dans les usines, conduisent les tramways et les taxis. Avec plus d’un million de combattants, l’armée de Haig manque d’effectifs. Elle a perdu 157 000 hommes dans les batailles d’avril à juin, et les pertes mensuelles n’ont pas été depuis inférieures à 120 000. Plus de 800 000 au total pour l’année 1917: 16 000 Australiens, 22 400 Canadiens sont morts en France. Quatre divisions canadiennes sont encore au front. Mais les Dominions refusent d’instaurer la conscription. Les Anglais sont réduits à leurs propres forces au moment où s’annonce l’offensive allemande. Les Français, eux-mêmes à bout de souffle, leur demandent de prendre en charge des secteurs nouveaux. Haig entre en conflit avec Pétain: il assure qu’il a besoin de tout son monde.

Haig et les commandants des armées britanniques en France. De gauche à droite, au premier rang: le général Plumer  (IIe armée), un chef soucieux d’épargner ses hommes, au contraire de certains de ses collègues: le maréchal Haig, commandant en chef du BEF; le général Rawlinson (IVe armée). Au second rang, les généraux Byng (IIIe armée), Birdwood (chef de l’Australian Corps puis successeur de Gough à la tête de la Ve armée) et Lawrence (chef d’état-major de Haig).

Troupes portugaises se rendant aux premières lignes, dans leurs équipements anglais. Quand le Portugal a rejoint les Alliés en 1916, son apport en effectifs semblait non négligeable. En fait, le déploiement des 100 000 hommes promis a pris beaucoups de temps, et l’armée des Américains l’a rendu moins prioritaire. Quand Ludendorff les attaquera au printemps, sur le front britannique. Les Portugais seront surpris en pleine organisation.

DÉBUT 1918

L’ALLEMAGNE EN GUERRE

L’allemagne occupe une partie de l’Europe, mais doit affecter une partie de ses troupes à la garde des régions frappées de réquisitions, la France et la Belgique affamée, la Pologne, la Roumanie et l’Ukraine, où 20 divisions surveillent la frontière russe et attendent la soudure du blé.

Car l’Allemagne manque de tout: même le charbon est contingenté pendant l’atroce hiver de 1917-1918. Les voyages en train sont réglementés, les denrées alimentaires organisées par le service du ravitaillement. La priorité absolue accordée aux soldats du front réduit la population civile à pinurie et aux ersatz.

La supériorité allemande en effectif n’est que de 20 divisions au début de 1918. C’est trop peu pour une offensive de grand style. Ludendorff a déjà usé au front la classe de 1918. On attend les premiers conscrits de la classe 1919, mais ils ne sont pas assez nombreux. On cherche des effectifs dans les dépôts, on revise les sursis, on cherche à recruter des ouvriers: sur les 1 200 000 hommes travaillant pour la guerre, on en trouve à peine 30 000. Ludendorff ne peut compter que sur le transfert des divisions de l’Est pour lancer son offensive. Il doit faire vite: remporter la victoire à l’Ouest avant l’arrivée des Américains.

Depuis que Lénine a renoncé à reconquérir l’Ukraine, l’armée allemande de l’Est est en grande partie disponible: un million de combattants, soit 53 divisions d’infanterie et 13 brigades mixtes. Le service des renseignements avertit Pétain dès janvier que les renforts ennemis arrivent à l’Ouest.

Le mouvement est progressif, mais constant: Ludendorff dégarnit lentement le front de Russie, de Roumanie et d’Italie, ainsi que les unités engagées contre l’armée de Salonique. Le 1er janvier l’Est et le Sud-Est gardaient 75 divisions contre 156 à l’Ouest. Le 1er mars, la proportion était de 57 contre 175. On attendait de nouveaux renforts quand les Russes auraient libéré les 100 000 prisonniers allemands qu’ils détenaient. Ils seraient aussitôt envoyés à l’Ouest. Les troupes allemandes venues de Russie, débarquant des trains en Belgique ou au Luxembourg, étaient rompues à tous les combats et trouvaient douces les conditions de vie en Artois ou en Champagne. Ludendorff avait engagé les vétérans de l'Est aux côtés des jeunes recrues formées dans les camps spéciaux. Le renforcement de l’artillerie et de l’aviation était considérable.

Les femmes allemandes remplissent toutes les professions. Ici, un garcon de courses  féminin conduisant sa voiture de poste dans les rues de Berlin, en mai 1917.

Un obusier lourd transporté par voie ferrée, pendant les grandes offensives du printemps 1918. Les Allemands ne sont pas les seuls à maîtriser l’artillerie lourde sur la voie ferrée (A.V.L.F.), comme les français l’ont démontré dès 1916 dans la Somme et à Verdun.

Le réseau ferroviaire allemand, qui permet le transfert rapide des divisions du front russe au front français. Six grands systèmes relient les deux zones de guerre. L’État-major. Qui a la mainmise sur ces lignes, peut transferer des divisions sur 700 km en 48 heures. C’est un avantage certain, que l’on retrouvera pendant la Seconde Guerre mondiale, même si les inconvénients sont réels: les chantiers navals qui construisent les sous-marins, par exemple, souffrent de la suprématie de l’armée de terre dans l’utilisation des voies.

DÉBUT 1918

La multiplication des fabriques d’armement impose à la population des pays belligérants les contraintes les plus sévères: en Allemagne, pour réduire la main d’oeuvre masculine, on emploie massivement les adolescents, bientôt victimes de nombreux accidents du travail. On compte 47 000 femmes dans les mines, dont 20 000 en Westphalie. Les usines anglaises engagent trois millions d’ouvrières et 900 000 employées de commerce. En France 430 000 femmes ont pris le chemin des usines, aux côtés de 133 000 adolescents de plus de 14 ans. On compte près de 100 000 ouvrières dans le département de la Seine, pour 300 000 ouvriers. Les munitionnettes sont à toutes les tâches, tourneuses d’obus chez Citroën, forgeronnes, pontonnières, employées des fabriques de poudre. Elles travaillent dix heures par jour et les cadences sont dures. L’État a pris en charge la production, imposant les normes et distribuant les matières premières.

Les intérêts privés sont mis au service des bureaux de l’armement. Renault et Peugeot ne travaillent que pour la guerre, ainsi que les nombreux ateliers d’aviation de la région parisienne.

Une usine d’aviation allemande. Les femmes sont des ouvrières très précieuses, surtout quand il s’agit de tâches qui demandent du doigté, comme ici la coupe et le montage du tissu sur les ailes d’avion.

Hommes et femmes travaillent côte à côte pour la guerre: ici ils vissent et vérifient les détonateurs des obus dans une usine anglaise.

Joyau de l’industrie de guerre française, le char Renault F.T., mitrailleuse, ici en action avec les Américains en août 1918. Le concept d’une mitrailleuse blindée s’adapte remarquablement aux nouvelles opérations d’assaut combiné.

La puissance industrielle des États-Unis au service des Alliés, dans des usines de Pennsylvanie en avril-mai 1918: l’usinage de casques pour l’U.S. Army aux aciéries Hale and Kilburn.

Le montage de canons lourds dans les usines de Bethlehem Co.

DÉBUT 1918

LES TRANSPORTS MARITIMES

Les Américains ont saisi les paquebots allemands pour en faire des transports de troupes. Toutes les marines marchandes naviguent pour la guerre, y compris celles des neutres. L’assistance financière des États-Unis permet aux Alliés de multiplier les achats: drap d’Espagne, chevaux d’Argentine, viande et blé du Nouveau Monde, charbon américain. Mais les transports ne sont jamais à la hauteur des besoins, compte tenu des raids sous-marins qui gènent encore le trafic.

À la fin de 1917, La France et la Grande-Bretagne et l’Italie ont mis en commun leur tonnage. Elles sont rejointes par les États-Unis qui créent en Comité interallié chargé d’étudier les demandes de chaque belligérant. La première réunion, tenue le 11 mars 1918, permet de mesurer l’ampleur des besoins et d’organiser un tour de priorités.

À cette date, le danger sous-marin était en passe d’être maîtrisé. Les Britanniques avaient multiplié les petits bâtiments de surveillance et d’intervention, ainsi que les patrouilles aériennes. Chaque destroyer disposait de 20 à 30 Depth charges  (charges profondes) qui explosaient automatiquement à la profondeur voulue. Ils repéraient les sous-marins à l’aide d’hydrophones construits en Amérique. Un champ de mines gigantesque mouillé dans le Pas-de-Calais en décembre 1917 avait porté un coup décisif aux bases allemandes des Zeebrugge et d’Ostende.

Dans un port américain, expédition de caisses de poudre pour l’Europe.

Lancement du cuirassé USS New Mexico à l’arsenal de Brooklyn (New York) en avril 1917. Opérationnel en avril 1918.C est le type de la nouvelle marine des États-Unis. Il ne se distingue ni par sa vitesse (21 noeuds), ni par son armement (12 canons de 350 mm), mais par son système de propulsion hydro-électrique, une nouveauté qui symbolise l’audace et la puissance industrielle des Américains.

La flotte américaine s’enorgeillit autant de son passé lointain que de sa modernité: au mouillage, la frégate Constitution côtoie deux sous-marins du type le plus récent.

DÉBUT 1918

LES AVIATEURS

Le temps des as est terminé: Guynemer a été abattu en Belgique au dessus de Poelkapelle en 1917. Le baron von Richthofen a été solennellement enterré dans les lignes australiennes. Fonck, Romanet, Nungesser survivent, mais Madon a été descendu du côté de Belfort et l’as anglais Albert Ball est tombé après sa 43e victoire. L’escadrille La Fayette, constituée en 1916 par les Américains volontaires a rejoint les rangs de l’armée de Pershing. Les Allemands avec le  cirque de Richthofen, ont montré l’exemple: le combat aérien devient une affaire de groupe et de discipline. Les escadrilles constituées en 1918 sont désignées par des sigles et affectées aux attaques de Drachen, aux bombardements de nuit, ou à l’assaut des lignes ennemies. Les camps d’aviation se multiplient à l’arrière du front et les aviateurs sont de toutes les batailles. On renforce leurs effectifs au début de 1918.

Les as deviennent chefs de patrouille, Ils n’en restent pas moins les idoles du public, qui applaudit d’autant plus à leurs exploits que les raids aériens se multiplient sur les villes et particulièrement sur Paris.

Le Rittmeister (capitaine de cavalerie) Manfred von Richthofen, as absolu de la guerre avec 80 victoires homologuées. Il tombe à Vaux-sur-Somme le 21 avril 1918.

Georges Gyunemer, abattu le 12 septembre 1917. C’était à ce moment, plus que le meilleur pilote allié avec ses 53 victimes, un symbole et un modèle.

 

Un appareil de la IVe armée en mission d’observation au-dessus de la Champagne.

Le capitaine René Fonck, posant devant son Spad XII. C’est l’as des Alliés, avec 75 victoires.

L’Anglais Albert Ball, alors titulaire de 29 victoires à l’âge de 22 ans. Dans ses mains, ses fétiches: l’hélice et le nez de son premier appareil, qui lui avait valu 14 succès. Il atteint le score de 43 victoires avant d’être tué en mission, en mai 1917.

L’Américain Robert Lufbery joue avec les lionceaux qui tiennent lieu de mascottes à l’escadrille Lafayette. Formée de volontaires d’outre-Atlantique en avril 1916, elle est intégrée à l’armée française jusqu’à l’arrivée des Américains.

Le harcèlement de l’ennemi est une des missions cruciales de l’aviation alliée: la R.A.F. bombarde des renforts allemands sur la Scarpe en avril 1918.

Trois exemples d’observation aérienne:

À 6 000 m, d’altitude, on distingue la configuration d’un terrain d’aviation, Marne 1er août 1918.

À 400 m, une colonne en marche à Melette le 5 octobre 1918.

À 200 m, les vues oblique fournissent une précision sans pareille. Le village dévasté et récemment reconquis d’Attigny, le 4 novembre 1918.

DÉBUT 1918

Pour contenir l’offensive prochaine de Ludendorff, on estime nécessaire de réunir une réserve générale des divisions alliées, qui serait utilisée en fonction des besoins urgents. Le Conseil supérieur de guerre avait émis un avis favorable le 2 février 1918 à VersaillesIl était question de verser 30 divisions dans la réserve: 10 britanniques, 12 françaises,7 italiennes. Mais les Anglais n’en veulent pas. Le chef de l’État-major impérial, Sir William Robertson, donne sa démission. Le 25 février, Haig menace de l’imiter. Il entend disposer de ses réserves, surtout si les Allemands attaquent. Les Anglais continuent à se préparer seuls au combat, dans les caves d’Arras et les cantonnements de Picardie. Pétain aussi refuse. Il veut rester maître de ses effectifs. Il offre 8 divisions au lieu de 13. Les hommes prennent position dans les cantonnements réservés à porté du front.

Lloyd George et Clemenceau renoncent: Ludendorff n’aura pas à compter sur une réserve interaliée. Il vient de remporter, avant même d’attaquer une victoire logistique.

L’état moral de l’armée s’améliore sous l’effet des mesures prises après les mutineries. Le bon effet des permissions et l’amélioration des cantonnements y est pour beaucoup.

 Le caractère international de la guerre rassure les poilus: ils ne sont plus seuls, avec les Belges et les Britanniques, à soutenir le choc allemand. Les Dominions ont envoyé leurs contingents les Portugais armé deux divisions, les Italiens garni un secteur, on forme des unités tchèques et polonaise, et les premiers Américains arrivent dans leurs side-cars poussiéreux. Plus de la moitié de l’artillerie est équipée de tracteurs et les chemins de fer installent les emplacements pour les grosses pièces montées sur rail. Plus de général sans voiture, ni de régiments sans camions.

 L’Allemagne ne peut pas compter sur le renfort de ses alliés : les Turcs et les Bulgares n’envoient aucune unité à l’Ouest. L’impératrice Zita refuse de voir partir des troupes autrichiennes qui pourraient avoir à combattre ses frères belges.

Les secours de l’arrière sont sensibles en 1918: le cinéma et le théâtre aux armées multiplient les déplacements. Les services postaux acheminent régulièrement les colis et le courrier, grâce à la mobilisation des femmes dans les P.T.T. Les ambulances automobiles et les entennes chirurgicales sont plus nombreuses. Les fréquentes visites de Clemenceau entretiennent le moral. On attend, dans chaque unité, la nouvelle offensive allemande.

Clemenceau sur le front à la fin de 1917. Les visites aux poilus sont le signe d’une réelle sollicitude, qui a le double effet de soutenir le moral des poilus et de valoir au président du Conseil une popularité inouïe dans l’armée. Il se préocucupe du moindre détail, par exemple l’approvisionnement en tabac des coopératives militaires.

Déjeuner dans les ruines de Maurepas. On a plus de chance, dit-on alors, de trouver Clemenceau aux abords de la ligne de feu que dans son bureau de la rue Saint-Dominique.

MARS 1918

LES ANGLAIS AUX PREMIÈRES LOGES

Le 21 mars 1918, à 4 h 40 du matin, le canon tonne. A 9 heures, l’attaque de Ludendorff ébranle les lignes anglaises. Deux armées sont en première ligne. La XVIIIe armée de von Hutier, le vainqueur de Riga, sous les ordres du Kronprinz de Prusse, attaque avec 27 divisions sur la Somme. Il a pour mission de séparer les Anglais des renforts français venus du Sud. Les 18 divisions de von Below (XVIIe armée), aux ordres du prince Rupprecht de Bavière, poussent vers Arras, où les Anglais sont terrés dans les abris et dans les caves. Entre les deux armées, les 20 divisions de von der Marwitz (IIe armée).

Von Hutier enfonce, avec ses Stosstruppen, la ligne anglaise du canal Crozat, et pousse sur 6 km. Ludendorff dirige la manoeuvre, qui doit rejeter les Anglais vers le Nord, élargir la brèche au sud, pour séparer les Français des Britanniques.

L’armée Gough est en déroute. Les réserves tardent à intervenir. Pétain, sollicité, envoie quelques divisions débarquées par camions, qui se fondent aussitôt dans la fournaise. Les renforts français ne viennent pas de la Champagne toute proche, où Pétain redoute une deuxième offensive allemande, mais de Lorraine, par chemin de fer. Le front défoncé de Saint-Quentin risque d’entraîner toute l’armée alliée dans la catastrophe.

 

16 mars 1918, à la jonction des fronts français et britanniques. Cinq jours avant la grande offensive de Ludendorff, les soldats alliés fraternisent. En janvier, les Anglais ont relevé les Français jusqu’à Barisis, au sud-est de Noyon., malgré la réticence du maréchal Haig.

Pour les Britanniques de Gough (Ve armée) et Byng (IIIe armée), la guerre reprend en rase campagne. Les hommes passent de la guerre des tranchées à la guerre des trous: dans la plaine picarde, un renfoncement de terrain, un creusement improvisé, tiennent lieu de ligne de défense.

MARS 1918

LE COMMANDEMENT UNIQUE

À l’évidence, la percée allemande est due au flottement du commandement interalié. Les Anglais sont toujours en retraite, sans avoir le temps d’enterrer leurs morts. Les renforts français sont écrasés. La brèche entre alliés sera bientôt irrémédiable. Ludendorff tient sa victoire.

Dans la journée tragique du 24 mars, les divergences de vues entre alliés s’étalent. Pétain veut à la foi assurer la cohésion de l’armée française et couvrir Paris. C’est se replier su sud, vers Beauvais et laisser les Britanniques à leur sort. Pour Haig, comme pour Foch, c’est plus au nord, devant Amiens, qu’il faut tenir. La liaison franc-britannique, prioritaire, sera ainsi maintenue. Il faut à cet effet, dit Foch à Clemenceau, instituer un organe directeur de la guerre.

L’urgence d’une décision est grande. En l’absence des renforts français, annonce Haig à ses dirigeants, l’armée britannique se repliera lentement sur les ports de la Manche.

 Le 25, les Alliés se réunissent à Compiègne. Lord Milner, venus de Londres, rencontre le Tigre. Les hommes tombent d’accord: la discorde interaliée est synonyme de défaite. Il est question de donner à Foch un commandement spécial.

À Doullens, le lendemain, politiques et militaires réunis en présence du président Poincaré, s’accordent enfin. Foch les convainc de sauver Amiens et de rétablir la liaison franco-britannique autour de Bray-sur-Somme. Dans ce but, il est chargé de coordonner l’action des armées alliées sur le front ouest. Pétain et Haig acceptent. Milner et Clemenceau sous la pression des événements, viennent de remporter une victoire décisive.

La situation au 24 mars, quand le fléchissement de Gough rend nécessaire l’intervention de trois divisions francaises (22e et 62e d’infanterie, 1er de cavalerie) pour  boucher les trous.

Les Britanniques montent en ligne à Aveluy (Somme), au côté des tanks. Aveluy, un village au nord du Q.G. de Byng à Albert, était très à l’arrière du front le 21 mars. Dès le 26, il est au coeur des violents combats qui opposent le Ve corps britannique et deux corps d’armée de von der Marwitz.

Foch, nommé le 14 avril commandant en chef des armées alliés: ici en juillet à son quartier-générale, il à sa droite les généralissimes Haig, (G.B.) Pétain (France), à sa gauche le général Pershing (États-Unis.

MARS 1918

LA TERREUR À PARIS

Ludendorff ne néglige rien pour terroriser les parisiens et détruire le moral allié. Le 23 mars un tube à longue portée prend Paris pour objectif à partir de la forêt de Sain-Gobain. Capable de tirer à 100 km, les journalistes le surnomment la Grosse Bertha, du nom de Bertha Krupp, la fille du canonnier allemand.

Un obus tombe tous les quarts d’heure, dans l’axe nord-sud des boulevards Saint-Michel et de Sébastopole. Le vendredi saint, le 29 mars, 75 personnes sont tuées d’un coup dans l’église de Saint-Gervais.

La population conserve son calme, mais les tirs de la Bertha se doublent de raids aériens combinés. La capital n’est plus en sécurité: Poincaré lui-même descend dans la cave de l’Élysée pendant les alertes. De nouveau, on évoque l’évacuation des institutions vers Bordeaux. Poincaré et Clemenceau l’écartent. Si les Allemands sont à Noyon, Paris est encore en dehors de la zone des combats. Clemenceau est partout. Il tient les parlementaires d’une main ferme. Il accroît la surveillance de la censure militaire, stimule le zèle de la police. Il fulmine contre les insuffisances de la D.C.A. autour de paris. Aussitôt, des canons auto-portés sont mis en batterie, couplés aux projecteurs qui illuminent les Taube, pendant que les pompiers, aidés par la population, dégagent les victimes des bombardements.

La Grosse Bertha, Max-le-Long (Lange Max) pour les Allemands et Paris Gun pour les Anglais. Sa principale qualité est la portée, assurée par la longueur du tube (34 m), le calibre étant relativement modeste (environ 210 mm). L’échauffement très rapide du fût oblige les Allemands à le remplacer à tous les 50 à 60 coups.

Effet d’un obus de la Bertha, tombé le 25 mars au 19, rue des Nonnaines d’Hyères. Au fond, l’église Saint-Gervais, théâtre de la tragédie du 29 mars. La Bertha fait 256 victimes en région parisienne, auxquelles s’ajoutent les morts des raids aériens.


Les impacts de la Bertha sur Paris du 23 mars au 9 août. Bien que tous les arrondissements soient touchés, un axe nord-sud se dégage clairement.

Trois positions successives du canon. Très mobile, il peut être démonté en 48 heures et transporté par chemin de fer.

1-    près de Crépy-en-Lannois (120 km de Paris).

2-    Près de Beaumont-sur-Seine (110 km de Paris).

3-   Aux environs de Château-Thierry (85 km de Paris).

MARS-AVRIL 1918

LES FRANÇAIS ARRIVENT

Il faut se faire tuer sur place, dit Fayolle qui commande sur Noyon.

Et Foch, le 27 mars:

Il n’y a plus un mètre de sol de France à perdre.

Les camarades arrivent.

Plus de chemin de fer: il est sous le canon allemand. Trente kilomètres de marche quotidienne, sac au dos, la noria des divisions s’organise, comme à Verdun: 40 seront jetées dans la brèche. Dès le 26 mars, Foch à fait monté sur Amiens deux divisions de l’armée Debeney.

Le front est sur le pont d’être rompu, télégraphie Fayolle.

Une résistance désespérée s’organise. Les cuirassiers et les dragons combattent à pied. Les aviateurs des groupes Féquant et Ménard harcèlent les colonnes ennemies. Au nord de la Somme, les Anglais ont reçu le renfort de 7 divisions canadiennes et australiennes. Le front se stabilise. Arras ets sauvée.

Reste Amiens. Les Allemands piétinent: les munitions manquent, les renforts tardent à arriver. Les attaques répétées n’aboutissent pas. Le 5 avril, Ludendorff arrête l’offensive. Il a avancé de 60 km, fait 90 000 prisonniers, mais il n’a pu séparer les Français des Anglais. Foch, le sauveur, deviendra général en chef des armées alliées.

Le 9 avril, les Britanniques sont attaqués dans les Flandres, entre Ypres et Béthume. Les allemands bousculent une division portugaise, franchissent la Lys, avancent au nord d’Armentières. Ils menacent les ports de la Manche. L’infanterie française arrive par camions. Douze divisions secourent les Anglais. Le corps de cavalerie de Robillot monte de 200 km en 70 heures, crevant ses chevaux.

La bataille est impitoyable. Les hommes meurent par milliers pour défendre un bois, un piton, la chasse alliée gêne l’acheminement des renforts allemands. Le Belge Gillain. L’Anglais Plumer mène une résistance acharnée. Le 25, les Allemands prennent le Mont Kemmel aux Français. C’est leur dernier succès : le 29, la seconde offensive cesse.

Haig a perdu 240 000 soldats. Lloyd George doit engager tous les sujets britanniques de moins de 50 ans pour récupérer 350 000 hommes. Les Britanniques, exténués, ont subi le poids de l’attaque Allemande. Mais il conserve les ports de la Manche, l’Yser, et Ypres. Aux Français, qui ont perdu 92 000 soldats d’attendre, avec inquiétude, la prochaine offensive de Ludendorff.

Le général Fayolle. Camarade de Foch chez les Jésuites, ce chef vénérable, âgé de 66 ans, doit assurer la liaison franco-britannique, à la tête du groupe d’armées de réserve.

Armentières, 11 avril: bombardement des britanniques sur la ville évacuée la veille. Elle constituait le premier objectif de la seconde offensive de Ludendorff.

Les Français arrivent: le 12 avril, un convoi d’artillerie française se portant au nord, sur une route de la Somme.

MAI-JUIN 1918

LE CHEMIN DES DAMES

Les Français ont envoyé leurs réserves dans le Nord pour soutenir les Britanniques. Ludendorff décide de monter une offensive limitée dans leur secteur, sur le Chemin des Dames : Foch devra ramener ses troupes au sud, et les Anglais isolés deviendront une cible aisée.

Le 27 mai, les 30 divisions du Kromprinz de Prusse, précédées de Stosstruppen, passent à l’attaque. La VIe armée de Duchêne qui voulait résister en première ligne, est facilement enfoncée. Surpris par ce succès inattendu, Ludendorff donne l’ordre de foncer vers la Marne.

Au même moment, vient d’affronter une vague de grèves. Les 29 départements qui travaillent pour la guerre sont entrés dans le mouvement. La vie chère, et à Paris les bombardements, ont favorisé les grèves. Mais les mots d’ordre sont politiques; les leaders exigent la coclusion immédiate d’une paix du droit. Les mineurs du Gard, les métallurgistes de Firminy, les ouvriers et les ouvrières de la région parisienne ont cessé le travail. Renault, Citroën, Hotchkiss, ont fermé leurs portes. En pleine menace allemande, Clemenceau a dû détourner du front des unités de cavalerie, pour contrer le risque de grève générale dans la Loire. Enfin, dans la nuit du 26 au 27 mai, 43 dirigeants syndicaux sont arrêtés, 73 ouvriers envoyés à l’armée. Le 28, la reprise du travail est générale.

Il était temps, les Allemands ont franchi l’Aisne sur des ponts intacts. Le 31, ils sont sur la Marne. Mais Pétain a organisé deux môles de résistance, autour de Soissons à l’ouest, de la Montagne de Reims à l’est. Ils tiennent, tandis que l’ennemi s’essouffle. Ludendorff, pris de court par l’ampleur du recul allié, ne dispose pas des renforts nécessaires. Le 11 juin, il doit renoncer. Les Allemands peuvent se regorger d’une avance de 60 km et de la capture de 50 000 Français. À la Chambre, Clemenceau doit user de toute son autorité pour sauver la tête des généraux responsables. Cette fois Paris est menacé. Tombera-t-il ?

Clemenceau est au coeur de la bataille: le 29 mai, il se rend à Fère-en-Tardenois pour un entretient avec le général Maistre. La ville tombe quelques heures plus tard.

La percée du Chemin des Dames et la ruée allemande vers la Marne.

Un coup de main du 134e régient d’infanterie en Champagne: les hommes montent à l’asssaut, suivis par un brancardier (à gauche). Ils franchissent quatre-vingt mètres en moins de quatre minutes, tuant plusieurs Allemands et ramenant quatre prisonniers.

Des combats se déroulent aussi plus au nord, dans le Pas-de-Calais: un fisil-mitrailleur balayant la route de Courcelles au Tronquoy, le 9 juin, Invisibles pour l’instant, les Allemands arrivent à travers les blés. Mais le cadavre derrière le tireur indique qu’un premier assaut a déjà été repoussé.

JUILLET 1918

LA DEUXIÈME BATAILLE DE LA MARNE

À Berlin, Hindenburg a fait renvoyer le secrétaire d’État Kühlmann qi doutait devant le Reichstag de la solution militaire du conflit. Ludendorff est libre de monter une nouvelle offensive, avec les renforts venus de l’Est.

L’instant est bien choisi: Pétain ne dispose que d’une demi-douzaine de divisions de réserve. Les Anglais n’ont plus que 34 divisions en ligne. Mais les Américains ont proposé l’emploi de 7 divisions à peine instruites. Désormais, ils se battent: à Cantigny en mai, au Bois Bellau et à Château-Thierry en juin, à Beaumomt-Hamel le 4 juillet. En 20 minutes, les Allemands sont capables de jetter un pont de bateaux sur la Marne. Mais le but de Ludendorff est de s’emparer de la Montagne de Reims. Le 15 juillet, à 1 heure du matin, le canon tonne à l’est de Reims, sur le front de l’armée Gouraud. Avec des noirs américains, des chasseurs polonais, des tirailleurs maghrébins, des territoriaux et le XXIe corps de Naulin, la IVe armée de Gouraud s’accroche au terrain.

Simultanément, une attaque est lancée à l’ouest de Reims, contre la Ve armée de Berthelot. A deux contre un, les Allemands enfoncent un corps d’armée italien, entre la Montagne de Bligny et la Marne. Ils franchissent le fleuve, établissent une tête de pont. Vont-ils marcher sur Paris ?

Pétain est de nouveau en désaccord avec Foch. Ce dernier veut lancer une contre-offensive avec deux armées intactes. Pétain veut utiliser ces renforts pour se cramponner au terrain. Mais Gouraud tient bon avec ses seuls effectifs. Pellé recule, mais sans flancher. C’est de leur sacrifice que dépend la victoire. Les aviateurs français attaquent sans relâche: 225 sorties dans la journée du 15. Ils bombardent et mitraillent les ponts sur la Marne. Les Américains de la 3e division se montrent héroïques au feu. Ils contribuent à réduire la poche pour jeter les Allemands à l’eau. Le XXIIe corps britannique débarque à Arcis-sur-Aube, soutenu par 4 divisions françaises.

Les Allemands avancent sur Dormans et Épernay. Mais leurs pertes sont lourdes, et les Français résistent. La Ve armée ne réussit pas à réduire la poche ennemie. Mais elle rend impossible toute progression. La 8e division de Pellé doit être évacuée en raison des pertes. Les Italiens se sont fait tuer sur place. Mais les 5 000 avions et les 20 000 canons de Pétain ont eu raison de la dernière offensive de Ludendorff, arrêtée le 17 juin, alors qu’il tient encore la Marne. Il n’a pu se rendre maître de la Montagne de Reims.

Les deux batailles de la Marne en 1914 et en 1918.

7 juillet, sur le front de Champagne: Clemenceau et Gouraud dans l’attente de la grande offensive allemande, qui surviendra huit jours plus tard.

L’attaque allemande du 15 juillet dans la Montagne de Reims, sur le front de la IVe armée (Gouraud). Les flèches indiquent la direction de l’assaut.

Une batterie française de 145/155 mm à tracteurs dans les rues de Compiègne. La ville, à l’ouest du champ de bataille, est un objectif important des Allemands.

Au nord de la forêt de Villers-Cotterêts, un régiment de Zouaves a constitué une ligne de résistance dans un chemin creux.

Des coups de main préviennent les Alliés de l’imminence d’un assaut sur la Marne. Le 14 juillet au soir, un raid audacieux de ces cinq hommes permet à Gouraud de connaître l’heure de l’attaque du 14 juillet. De gauche à droite, le sergent Lejeune, le caporal Hoquet, le lieutenant Belestier, le caporal Gourmelon et le soldat Aumassen.

Après la bataille: les prisonniers de l’armée de Gouraud défilent dans les rues de Châlon-sur-Marne.

Les unités de la Xe armée de Mangin, constituées en réserve, prennent l’offensive au matin du 18 juillet. De la forêt de Viliers-Cotterêts, les Allemands voient sortir des divisions précédées de chars Renault. Ludendorff croyait les alliés à bout. Leur attaque le surprend.

Elle frappe le flanc droit de la poche allemande, entre l’Aisne et la Marne, au moment ou les Stosstruppen essoufflées ont dû renoncer à l’assaut. En un jour, les Français capturent 12 000 prisonniers de de nombreux canons, que Clemenceau fait disposer en trophées place de la Concorde. Les positions ennemies sont enfoncées sur un front de 40 km. C’est la victoire.

On entend de Paris le canon tonner. Ludendorff jette des renforts dans la bataille. Les Français avancent lentement. Pourtant, leurs pièces d’artillerie montées sur rail parviennent à couper la voie ferrée de Fismes, le seul chemin pour les renforts de Ludendorff. Asphyxiée, l’armée allemande se retire sur la ligne de l’Aisne le 2 août. Foch et Mangin ont gagné la partie.

Le 22 juillet, une colonne Allemande franchit la Marne, mais comme prisonniers. Les ponts sont coupés, et c’est sur une passerelle provisoire, établie de nuit sous le feu allemand que s’effectue le passage.

L’offensive française en Champagne, 18-31 juillet. Au centre, le noeud ferroviaire essentiel de Fismes, dont la prise entraîne la retraite allemande sur l’Aisne.

A la fin juillet commence l’avance prudente des Français.

AOÛT 1918

LE JOUR DE DEUIL DE L’ARMÉE ALLEMANDE

Le 8 août Foch est décidé à lancer une offensive pour la victoire. Sous les ordres de Haig, la IVe armée britannique de Rawlinson et la 1re armée française de Debeney, soit 27 divisions, s’élancent hors des parallèles de départ, sur la route d’Amien à Roye. Les Allemands cèdent, perdent 400 camions et 27 000 hommes.

Ludendorff croyait les Anglais brisés, incapables du moindre mouvement offensif. Mais Haig a recu le renfort des nouveaux mobilisés et des divisions venues d’Orient. Des centaines de chars d’assaut sont déployés dans la plaine. Les Américains sont de la partie. Par le jeu continu des renforts, les Alliés attaquent jusqu’à la fin d’août et reprennent toutes les positions qu’ils avaient perdues depuis le 21 mars. Dès le 8 août, Ludendorff, que la presse allemande appelait l’homme aux nerfs d’acier: a envoyé sa démission à Guillaume II, qui l’a refusée: C’est lui disait-il, le jour de deuil de l’armée allemande. Il n’avait plus les moyens de gagner la guerre. Mieux valait demander l’armistice dans des conditions honorables. Trois mois de combats seraient encore nécessaires avant que les civils acceptent d’assumer la responsabilité du désastre des militaires.

Les mois d’août et de juillet sont pour les Allemands ceux des prisonniers et des morts. Ici, un cadavre d’allemand à Neuilly-Saint-Frontm au nord-ouest de Château-Thierry. Il est peut-être là depuis longtemps, tombé dans les combats des 10 et 11 juillet.

L’offensive franco-britanniqque du 8 août: l’essentiel du succès revient aux Canadiens et aux Australiens de Rawlinson. Ce dernier, battu sur la Somme en 1916, a su tirer les leçons sde sont échec. Exceptionellement, l’armée française de Debeney était placée sous ses ordres.

Le début de la fin : les 21 et 22 août, les Britanniques de Byng (IIIe armée) et Rawlinson (IVe armée) , font, entre Ancre et Somme, un nombre considérable de prisonniers, que l’on voit ici rassemblés dans un dépôt à l’arrière du front.

Des Allemands prisonniers des britanniques aident un de leurs blessés à sortir d’une cave-abri.

ÉTÉ 1918

LA RUSSIE DÉSEMPARÉE

Lénine a proclamé la dictature du prolétariat, lancé les gardes rouges contre les Koulaks et sucité une révolte armée dans la région du Don, qui fournit des volontaires aux généraux blancs. Alexeiev, Dénikine et Kornilov. Le Transsibérien est tenu par les 40 000 prisonniers libérés et armés de la Légion tchèque, qui veulent rejoindre l’ouest en Sembarquant dans le port de Vlidivostok. La Sibérie, où les Bolcheviks viennent de liquider le Tsar et sa famille (Ekaterinbourg, 16 juillet), leur échappe peu après juillet. Trotski doit diriger les premiers bataillons de l’armée rouge au nord de Moscou, sur Iaroslav, aux mains des Blancs de Boris Savinkov.

Il décide de conclure un accord secret avec les Allemands qui occupe l’Ukraine, les Pays Baltes et la Finlande. Pendant que les japonais débarquent 76 000 hommes à Vladivostok pour rendre la main aux Tchèques et prendre la Sibérie, que les Anglo-Français occupent au nord Arkhangelsk, les Allemands s’engagent à aider Trotski contre Alexeiev et à nettoyer le corps expéditionnaire allié de Mourmansk. Trotski peut ainsi reprendre Kanzan, et attaquer sur la moyenne Volga. L’engagement contre-révolutionnaire des Alliés objectif de Hindenburg, mais en obligeant les Allemands à maintenir des troupes dans l’est, les Bolcheviks empêchent Ludendorff de l’emporter à l’ouest.

Le démembrement de la Russie: situation en novembre 1918.

Débarquement de Britanniques à Vladivostok; le drapeau anglais est salué par des officiers russes et britanniques, devant une garde Tchécoslovaques.

Mai-juin 1918: la Légion tchèque progresse sur le Transsbérien, dans un train camouflé.

SEPTEMBRE 1918

LES AMÉRICAINS À SAINT-MIHIEL

Du 12 au 15 septembre, les Américains attaquent pour la première fois seules. Ils ont déjà attaqué sur la Marne, mais au sein d’armée alliées. Ils doivent maintenant réduire le saillant de Saint-Mihiel, sur la Meuse, pour dégager définitivement Verdun. Sur les 600 000 hommes de la 1re armée de Pershing, seul 50 000 sont français.

Les doughboys attaquent bravement, avec le soutien de 3000 pièces d’artillerie et de 270 chars. Au prix de pertes sévères. Les Américains enlèvent toutes positions, faisant de nombreux prisonniers. Dès le 13, Pétain et Pershing entre dans Saint- Mihiel.

Les Américains sont alors près de 1 200 000 en France, et les débarquements se poursuivent constamment, La 1re armée s’est placée pour l’offensive finale de Foch, même si l’exploitation de l’action a montré des désordres à l’arrière des lignes, des lenteurs dans le ravitaillement et l’approvisionnement en munitions.

L’artillerie américaine en action en Meuse-Argonne, avec des 75 mm français.

L’assaut américain à Saint-Mihiel, le 12 septembre.

Les Américains combattent sous leur drapeau. C’était la revendication essentielle de Pershing. Ici une compagnie du génie traverse le village de Nonsard.

Ici vécût, en août 1870, le prince Bismarck. Ce doughboy semble insensible à ce panneau commémoratif, laissé derrière eux par les Allemands lors de l’évacuation de Granpré  Ardenne). Le 10 octobre, les Français de Gouraud et les Américains y font jonction, parachevant le succès de l’offensive de Meuse-Argonne.

SEPTEMBRE 1918

PREMIÈRE VICTOIRE DANS LES BALKANS

Le général Franchet d’Esperey a été nommé sur le front d’Orient. Il y prépare une offensive interaliée dès le début d’août, pour atteindre le noeud ferroviaire de Gradsko dans le Haut-Vardar et réduire à l’impuissance l’armée bulgare. Il dispose de divisions grèques et serbes, mais les Italiens, menacés dans les Alpes, et les Britanniques, qui ont subi de lourdes pertes sur le front Ouest, hésitent à soutenir l’offensive. Pour obtenir leur accord, Clemenceau doit envoyer à Rome et à Londres le général Guillaumat.

A partir du 15 septembre, l’offensive est en cours, soutenue par un feu puissant d’artillerie. Les Serbes font merveille, avec les coloniaux de Franchet, dans l’attaque très dure du massif de la Mogléna, entre le Vardar et la Cerna. Le 23, les Bulgares, harcèlés par la cavalerie, mitraillés et bombardés par l’aviation, sont en retraite: les Français prennent Prilep sur l’aile gauche, les Serbes passent le Vardar au centre, les Britanniques et les Grecs progressent plus lentement sur l’aile droite. Le 29, débouchant de la montagne, la cavalerie de Jouinot-Gambetta s’empare d’Uskub. L’armée bulgare, coupée en deux, est au bord de l’effondrement et les renforts acheminés sur l’ordre de Ludendorff arrivent trop tard. L’armée d’Orient vient de reporter la première victoire des Alliés. Le 29 au soir, les plénipotentaires bulgares signent le premier armistice de la guerre.

Le général Franchet d’Esperey. Sa percée, réalisée par la montagne et non par la vallée du Vardar, lui permet de remporter le plus ample succès offensive de 1918.

Mai 1918: en prélude à la grande offensive, Guillaumat attaque le Skra di legen. Des soldats grecs, équipés à la française, en ramènent une colonne de prisonniers bulgares.

L’heure serbe: le prince héritier Alexandre de Serbie, accompagné de son état-major et du général Bojovic, chef de la 1re armée (deuxième à gauche), observe l’offensive allié du 15 septembre. Depuis deux ans, ce rocher au seuil de leur terre natale sert d’observation aux Serbes.

Entrée de cavaliers serbes, en uniforme français, à Rozden. Comme les Australiens en palestine, les cavaliers font ici la décision par leurs percées audacieuses.

SEPTEMBRE 1918

LA VICTOIRE D’ALLENBY EN ORIENT

Au début de septembre, Allenby décide de lancer une offensive contre le groupe d’armées turques Yilderim. Ses services de renseignement lui ont en effet appris que le tunnel du Taurus était en réfection: le blocage de la voie ferré empêchait les généraux allemands d’envoyer des renforts aux Turcs. C’était le momment d’attaquer. La cavalerie britannique se lance en avant vers le lac de Tibériade, le 19 septembre, Le front turcs est enfoncé, les deux armées de l’aile droite capitulent, la troisième, sur l’aile gauche, abandonne le Jourdain pour tâcher de se replier sur Damas. Les cavaliers anglais y arrivent les premiers et font 22 000 prisonniers le 30 septembre. La résistance turque est brisée: le 30 octobre, l’amiral anglais Callthorpe signera seul l’armistice avec Izzet Pacha, sans aucun concours français. L’Empire ottoman a cessé d’exister.

Bombardement de Beyrouth par des hydravions anglais. La ville tombe aux mains des Alliés les 7 et 8 octobre.

Mars-avril 1918: campement de troupes indiennes au nord du Bagdad, Les civières forment un abri improvisé contre le soleil. La chaleur excessive interrompt pratiquement les opérations britanniques en Mésopotamie d’avril à octobre.

Le général Harry-Chauvel, commandant le desert Mounted Corps (DMC), dans les rues de Damas. De la percée de Meggido (19 septembre) à la prise de Damas (30 septembre), la cavalerie australienne du DMC livre les dernières grandes charges de la guerre.

SEPTEMBRE-OCTOBRE 1918

LA VICTOIRE DE FOCH

Foch veut en finir: il lance, du 26 au 28 septembre, l’offensive de la victoire. Le 26, la 1re armée américaine et la IVe française attaquent de Reims à l’Argonne, vers Mézières. Le 27, la Ire et la IIIe armée britanniques se lancent vers Cambrai, contre la ligne Hindenburg inachevée. Le 28, plus au sud, Albert 1re de Belgique commande une vaste offensive interaliée dans les Flandres, en direction de Bruges. Le 30, l’armée Berthelot entre en scène en Champagne. Vingt-deux divisions américaines sont engagées dans une partie où le quartier-maître général Ludendorff est en infériorité : il vient de dissoudre 14 divisions.

Les résultats ne sont pas décisifs, mais les progrès des Alliés sont réguliers. L’armée Allemande recule en bon ordre, d’une position à l’autre. Les Américains marquent le pas entre l’Argonne et la Meuse.-, Gouraud piétine en Champagne. Les Anglais ont percé la ligne Hindenburg, mais avancent lentement. La résistance allemande en Flandre est tenace, grâce à l’envoi d’ultimes renforts.

Mais Hidenburg et Ludendorff redoutent une percée à tout moment, ils interviennent à Berlin pour sauver leur armée. Guillaume II vient de nommer Max de Bade à la tête du gouvernement, pour faire supporter à ce prince pacifique la responsabilité du désastre. Dans la nuit du 3 au 4 octobre, il signe une note au président Wilson l’ouverture de négociations de paix. La marche vers l’armistice est commencée. Elle ne verra son terme qu’au 11 novembre.

Les soldats du Royal North Lancashire forment une des premières patrouilles qui pénètrent dans Cambrai au matin du 9 octobre. La ville est entièrement ruinée: les Prussiens l’ont vidée de ses habitants, pillée, puis incendiée au moyen de mines à retardement.

Denain, 20 octobre: le lendemain de leur libération par les Canadiens, les habitants saluent le prince de Galles (au centre) et le général Currie).

Le 17 octobre, Lille enfin libéré acclame ses libérateurs britanniques, des unités de la Ve armée de Birdwood. Lorsqu’apparaît le premier Français l’enthousiasme redouble.

OCTOBRE-NOVEMBRE 1918

L’ABANDON DE L’EMPEREUR CHARLES

L’empereur Charles ne parvient pas à dominer les Tchèques, les polonais, les Slaves du sud qui demandent et obtiennent une indépendance de fait. Leurs soldats désertent les rangs de l’armée K und K. Il devient impossible de poursuivre le combat.

Le 24 octobre, les Italiens engagent leur offensive sur le front des Alpes, appuyés par trois divisions franco-britanniques. La Piave est franchie, Le Mont Grappa attaqué. Le général Caviglia parvient le 28, à bousculer l’armée autrichienne et à remporter, le 30, la victoire incontestable de Vottorio Veneto. La défaite tourne aussitôt en déroute. Seuls les éléments germaniques de l’armée résistent encore. Trente divisions slaves ont refusé de servir.

Charles 1re doit se résoudre à demander l’armistice, signé le 3 novembre à Villa Giusti. Réfugié en Hongrie, il signera un acte de renonciation à toute participation aux affaires de l’État. Il n’a pas abdiqué. Il a seulement quitté son trône. L’Empire austro-Hongrois s’est écroulé.

29 octobre: camions de soldats révolutionnaires dans les rues de Budapest.

Libération d’une ville italienne par les troupes britanniques et transalpines.

Achèvement définitif de l’Autriche-Hongrie: le 25 décembre, l’automobile du président Massaryk arrive sur la place Venceslas de Prague, escortée par un détachement de légionnaires tchécoslovaques.

OCTOBRE-NOVEMBRE 1918

LA RÉVOLUTION EN ALLEMAGNE

Le 26 octobre, Ludendorff a démissionné parce que les notes successives de Wilson, en réponse à la demande allemande d’armistice, exigeaient la destruction de l’appareil militaire et l’abolition du régime autocratique. La réponse de Wilson, dit-il, demande la capitulation militaire, elle est donc inacceptable.

Le 3 novembre, la flotte se mutine à Kiel. Le 7, Hanovre, Brunswick, Cologne sont gagnées par le mouvement. Dans la nuit du 7 au 8, le socialiste Kurt Eisner forme à Munich un Soviet qui exige la démission de l’Empereur pendant que la retraite s’accentue sur le front, jusqu’à la ligne Gand-Valenciennes et la Serre. Le 5 novembre, la retraite a été décidée vers Charleroi et Mézières. Les Américains ont déjàs pris pied sur la rive droite de la Meuse. Foch prépare une attaque en Lorraine. Le 6 novembre, le nouveau général en chef, Gröner, avertit Berlin qu’il faut mettre bas les armes.

Une révolution se prépare dans la capitale. Elle éclate le 8, et la troupe refuse de mener la répression. Le Kaiser renonce enfin au trône, passe en Hollande, et la République est proclamée. Il ne reste plus qu’à traiter avec les Alliés, Mais qui traitera?

Kiel, 5 novembre : le socialiste Gustav Noske harangue les équipages mutiné des sous-marins.

La révolution du 9 novembre à Berlin: la garde de la caserne des Uhlans, symbole du régime prussien, fait sa reddition aux conseils d’ouvriers et de soldats.

Sur la Potsdamer Platz, soldats allemands et prisonniers français libérés se côtoient dans une ambiance de franche fraternisation.

NOVEMBRE 1918

L’ARMISTICE

Clemenceau et Foch pensent qu’il ne faut pas riquer la vie d’un seul soldat allié, alors que les Allemands acceptent de signer l’armistice. Encore faut-il qu’un pouvoir civil responsable s’engage. Le centriste catholique Erzberger, qui avait plaidé au Reichstag pour une résolution de paix en juillet 1917, est chargé de négocoer. Foch lui impose des conditions militaires très dures sur lesquelles les Alliés, après dicussion se sont mis d’accord.

Les Allemands acceptent à Rethondes, dans le wagon de Foch, de signer l’armistice, dans la nuit du 10 au 11 novembre. Ils s’engagent à évacuer les territoires envahis, la rive gauche du Rihn. À livrer des têtes de pont sur le fleuve et une zone de 10 kilomètres sur la rive droite. Ils livrent leurs canons lourds et 25 000 mitrailleuses, leur flotte de haute mer, et leurs sous-marins. Ils promettent de retirer les troupes encore en activité à l’est de l’Europe. L’Allemagne est, selon le mot de Foch, à la merci des vainqueurs,

Dans toutes les capitales alliées, c’est une explosion de joie. Les foules envahissent les rues, les Français rentrent dans Metz et Strasbourg décorées de drapeaux tricolores.C’est la fin du cauchemar. Il ne manque à la réjouisance populaire qu’un million et demi de femmes françaises, mères ou veuves des français tués et disparus, et qui n’ont pas le coeur de fêter la victoire.

Une parisienne offre des fleurs à un soldat américain, le jour de l’armistice. La vague de joie et de soulagement ne fait qu’accentuer le succès des doughboys auprès des élégantes.

New York entre en liesse dès l’annonce de l’armistice. Les affaires sont immédiatement suspendues et la foule envahit les rues de Times Square.

Apogée de l’émotion: la cérémonie de Metz, le 8 décembre 1918. Pétain, qui vient de recevoir le bâton de maréchal de France, retient une larme. Derrière lui, les généraux Pershing (États-Unis), Gillian (Belgique), Albricci Italie), Haller (Pologne). Poincaré prenant Clemenceau par l’épaule, lui donne l’accolade. Les coeurs des deux adversaires politiques battent, pour un instant, à l’unisson.


01/05/2013
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