LA GRANDE GUERRE 1914-1918

LA GRANDE GUERRE 1918

1918 

La guerre piétine pendant trois mois. Les Américains débarquent et s’instruisent lentement. Les Anglais manquent d’effectifs, les Français sont à bout de forces. Les Allemands occupent l’Est européen et transportent leurs divisions disponibles vers l’Ouest pour les dernières offensives de la guerre, de mars à juillet, Ludendorff est convaincu qu’il n’a plus les moyens de gagner la guerre.

Il faut attendre pourtant jusqu’au 11 novembre pour que l’armistice soit signée. Le pouvoir civil tarde à en assumer la responsabilité. Les Empires ottoman et austro-hongrois sont abattus quand l’Allemagne résiste encore. Seul le développement de la révolution communiste dans les villes décide le Kaiser à abdiquer, sous la pression de l’armée. L’armistice est signé sans que l’Allemagne soit envahie. Dans l’Est de l’Europe, des armées alliées prennent position contre la Russie bolchevique, prenant le relais des Allemands désarmés.

L’arbitre de la paix et le président Wilson, qui débarque à Brest en décembre pour saluer les deux millions, de combattants américains qui ont permis la victoire. Il veut imposer à l’Europe la paix du droit, qui installe partout, sur la ruine des Empires, des démocraties et des nations indépendantes.

Pilote et mitrailleur d’un biplan français. La guerre aérienne prend en 1918 une ampleur jusqu’ici inédite: missions de reconnaissance, harcèlement des armées de Ludendorff puis soutien aux offensives de la victoire, et surtout bombardement stratégique, qui chez les Britanniques se traduit par la naissance de la Royal Air Force.

DÉBUT 1918

LES ANGLAIS ET LES FRANÇAIS MANQUENT DE TROUPES

En dépit de ses efforts, LIoyd George, qui gouverne presque dictatorialement l’Angleterre avec l’aide du War Cabinet, manque de troupes. Il a pris le risque d’une guerre générale pour mobiliser les ouvriers en surnombre dans les usines. Il vient de supprimer les sursis d’appel et d’envoyer au front les palfreniers et les garcons coiffeurs. Il a donné le droit de vote aux femmes qui travaillent dans les usines, conduisent les tramways et les taxis. Avec plus d’un million de combattants, l’armée de Haig manque d’effectifs. Elle a perdu 157 000 hommes dans les batailles d’avril à juin, et les pertes mensuelles n’ont pas été depuis inférieures à 120 000. Plus de 800 000 au total pour l’année 1917: 16 000 Australiens, 22 400 Canadiens sont morts en France. Quatre divisions canadiennes sont encore au front. Mais les Dominions refusent d’instaurer la conscription. Les Anglais sont réduits à leurs propres forces au moment où s’annonce l’offensive allemande. Les Français, eux-mêmes à bout de souffle, leur demandent de prendre en charge des secteurs nouveaux. Haig entre en conflit avec Pétain: il assure qu’il a besoin de tout son monde.

Haig et les commandants des armées britanniques en France. De gauche à droite, au premier rang: le général Plumer  (IIe armée), un chef soucieux d’épargner ses hommes, au contraire de certains de ses collègues: le maréchal Haig, commandant en chef du BEF; le général Rawlinson (IVe armée). Au second rang, les généraux Byng (IIIe armée), Birdwood (chef de l’Australian Corps puis successeur de Gough à la tête de la Ve armée) et Lawrence (chef d’état-major de Haig).

Troupes portugaises se rendant aux premières lignes, dans leurs équipements anglais. Quand le Portugal a rejoint les Alliés en 1916, son apport en effectifs semblait non négligeable. En fait, le déploiement des 100 000 hommes promis a pris beaucoups de temps, et l’armée des Américains l’a rendu moins prioritaire. Quand Ludendorff les attaquera au printemps, sur le front britannique. Les Portugais seront surpris en pleine organisation.

DÉBUT 1918

L’ALLEMAGNE EN GUERRE

L’allemagne occupe une partie de l’Europe, mais doit affecter une partie de ses troupes à la garde des régions frappées de réquisitions, la France et la Belgique affamée, la Pologne, la Roumanie et l’Ukraine, où 20 divisions surveillent la frontière russe et attendent la soudure du blé.

Car l’Allemagne manque de tout: même le charbon est contingenté pendant l’atroce hiver de 1917-1918. Les voyages en train sont réglementés, les denrées alimentaires organisées par le service du ravitaillement. La priorité absolue accordée aux soldats du front réduit la population civile à pinurie et aux ersatz.

La supériorité allemande en effectif n’est que de 20 divisions au début de 1918. C’est trop peu pour une offensive de grand style. Ludendorff a déjà usé au front la classe de 1918. On attend les premiers conscrits de la classe 1919, mais ils ne sont pas assez nombreux. On cherche des effectifs dans les dépôts, on revise les sursis, on cherche à recruter des ouvriers: sur les 1 200 000 hommes travaillant pour la guerre, on en trouve à peine 30 000. Ludendorff ne peut compter que sur le transfert des divisions de l’Est pour lancer son offensive. Il doit faire vite: remporter la victoire à l’Ouest avant l’arrivée des Américains.

Depuis que Lénine a renoncé à reconquérir l’Ukraine, l’armée allemande de l’Est est en grande partie disponible: un million de combattants, soit 53 divisions d’infanterie et 13 brigades mixtes. Le service des renseignements avertit Pétain dès janvier que les renforts ennemis arrivent à l’Ouest.

Le mouvement est progressif, mais constant: Ludendorff dégarnit lentement le front de Russie, de Roumanie et d’Italie, ainsi que les unités engagées contre l’armée de Salonique. Le 1er janvier l’Est et le Sud-Est gardaient 75 divisions contre 156 à l’Ouest. Le 1er mars, la proportion était de 57 contre 175. On attendait de nouveaux renforts quand les Russes auraient libéré les 100 000 prisonniers allemands qu’ils détenaient. Ils seraient aussitôt envoyés à l’Ouest. Les troupes allemandes venues de Russie, débarquant des trains en Belgique ou au Luxembourg, étaient rompues à tous les combats et trouvaient douces les conditions de vie en Artois ou en Champagne. Ludendorff avait engagé les vétérans de l'Est aux côtés des jeunes recrues formées dans les camps spéciaux. Le renforcement de l’artillerie et de l’aviation était considérable.

Les femmes allemandes remplissent toutes les professions. Ici, un garcon de courses  féminin conduisant sa voiture de poste dans les rues de Berlin, en mai 1917.

Un obusier lourd transporté par voie ferrée, pendant les grandes offensives du printemps 1918. Les Allemands ne sont pas les seuls à maîtriser l’artillerie lourde sur la voie ferrée (A.V.L.F.), comme les français l’ont démontré dès 1916 dans la Somme et à Verdun.

Le réseau ferroviaire allemand, qui permet le transfert rapide des divisions du front russe au front français. Six grands systèmes relient les deux zones de guerre. L’État-major. Qui a la mainmise sur ces lignes, peut transferer des divisions sur 700 km en 48 heures. C’est un avantage certain, que l’on retrouvera pendant la Seconde Guerre mondiale, même si les inconvénients sont réels: les chantiers navals qui construisent les sous-marins, par exemple, souffrent de la suprématie de l’armée de terre dans l’utilisation des voies.

DÉBUT 1918

La multiplication des fabriques d’armement impose à la population des pays belligérants les contraintes les plus sévères: en Allemagne, pour réduire la main d’oeuvre masculine, on emploie massivement les adolescents, bientôt victimes de nombreux accidents du travail. On compte 47 000 femmes dans les mines, dont 20 000 en Westphalie. Les usines anglaises engagent trois millions d’ouvrières et 900 000 employées de commerce. En France 430 000 femmes ont pris le chemin des usines, aux côtés de 133 000 adolescents de plus de 14 ans. On compte près de 100 000 ouvrières dans le département de la Seine, pour 300 000 ouvriers. Les munitionnettes sont à toutes les tâches, tourneuses d’obus chez Citroën, forgeronnes, pontonnières, employées des fabriques de poudre. Elles travaillent dix heures par jour et les cadences sont dures. L’État a pris en charge la production, imposant les normes et distribuant les matières premières.

Les intérêts privés sont mis au service des bureaux de l’armement. Renault et Peugeot ne travaillent que pour la guerre, ainsi que les nombreux ateliers d’aviation de la région parisienne.

Une usine d’aviation allemande. Les femmes sont des ouvrières très précieuses, surtout quand il s’agit de tâches qui demandent du doigté, comme ici la coupe et le montage du tissu sur les ailes d’avion.

Hommes et femmes travaillent côte à côte pour la guerre: ici ils vissent et vérifient les détonateurs des obus dans une usine anglaise.

Joyau de l’industrie de guerre française, le char Renault F.T., mitrailleuse, ici en action avec les Américains en août 1918. Le concept d’une mitrailleuse blindée s’adapte remarquablement aux nouvelles opérations d’assaut combiné.

La puissance industrielle des États-Unis au service des Alliés, dans des usines de Pennsylvanie en avril-mai 1918: l’usinage de casques pour l’U.S. Army aux aciéries Hale and Kilburn.

Le montage de canons lourds dans les usines de Bethlehem Co.

DÉBUT 1918

LES TRANSPORTS MARITIMES

Les Américains ont saisi les paquebots allemands pour en faire des transports de troupes. Toutes les marines marchandes naviguent pour la guerre, y compris celles des neutres. L’assistance financière des États-Unis permet aux Alliés de multiplier les achats: drap d’Espagne, chevaux d’Argentine, viande et blé du Nouveau Monde, charbon américain. Mais les transports ne sont jamais à la hauteur des besoins, compte tenu des raids sous-marins qui gènent encore le trafic.

À la fin de 1917, La France et la Grande-Bretagne et l’Italie ont mis en commun leur tonnage. Elles sont rejointes par les États-Unis qui créent en Comité interallié chargé d’étudier les demandes de chaque belligérant. La première réunion, tenue le 11 mars 1918, permet de mesurer l’ampleur des besoins et d’organiser un tour de priorités.

À cette date, le danger sous-marin était en passe d’être maîtrisé. Les Britanniques avaient multiplié les petits bâtiments de surveillance et d’intervention, ainsi que les patrouilles aériennes. Chaque destroyer disposait de 20 à 30 Depth charges  (charges profondes) qui explosaient automatiquement à la profondeur voulue. Ils repéraient les sous-marins à l’aide d’hydrophones construits en Amérique. Un champ de mines gigantesque mouillé dans le Pas-de-Calais en décembre 1917 avait porté un coup décisif aux bases allemandes des Zeebrugge et d’Ostende.

Dans un port américain, expédition de caisses de poudre pour l’Europe.

Lancement du cuirassé USS New Mexico à l’arsenal de Brooklyn (New York) en avril 1917. Opérationnel en avril 1918.C est le type de la nouvelle marine des États-Unis. Il ne se distingue ni par sa vitesse (21 noeuds), ni par son armement (12 canons de 350 mm), mais par son système de propulsion hydro-électrique, une nouveauté qui symbolise l’audace et la puissance industrielle des Américains.

La flotte américaine s’enorgeillit autant de son passé lointain que de sa modernité: au mouillage, la frégate Constitution côtoie deux sous-marins du type le plus récent.

DÉBUT 1918

LES AVIATEURS

Le temps des as est terminé: Guynemer a été abattu en Belgique au dessus de Poelkapelle en 1917. Le baron von Richthofen a été solennellement enterré dans les lignes australiennes. Fonck, Romanet, Nungesser survivent, mais Madon a été descendu du côté de Belfort et l’as anglais Albert Ball est tombé après sa 43e victoire. L’escadrille La Fayette, constituée en 1916 par les Américains volontaires a rejoint les rangs de l’armée de Pershing. Les Allemands avec le  cirque de Richthofen, ont montré l’exemple: le combat aérien devient une affaire de groupe et de discipline. Les escadrilles constituées en 1918 sont désignées par des sigles et affectées aux attaques de Drachen, aux bombardements de nuit, ou à l’assaut des lignes ennemies. Les camps d’aviation se multiplient à l’arrière du front et les aviateurs sont de toutes les batailles. On renforce leurs effectifs au début de 1918.

Les as deviennent chefs de patrouille, Ils n’en restent pas moins les idoles du public, qui applaudit d’autant plus à leurs exploits que les raids aériens se multiplient sur les villes et particulièrement sur Paris.

Le Rittmeister (capitaine de cavalerie) Manfred von Richthofen, as absolu de la guerre avec 80 victoires homologuées. Il tombe à Vaux-sur-Somme le 21 avril 1918.

Georges Gyunemer, abattu le 12 septembre 1917. C’était à ce moment, plus que le meilleur pilote allié avec ses 53 victimes, un symbole et un modèle.

 

Un appareil de la IVe armée en mission d’observation au-dessus de la Champagne.

Le capitaine René Fonck, posant devant son Spad XII. C’est l’as des Alliés, avec 75 victoires.

L’Anglais Albert Ball, alors titulaire de 29 victoires à l’âge de 22 ans. Dans ses mains, ses fétiches: l’hélice et le nez de son premier appareil, qui lui avait valu 14 succès. Il atteint le score de 43 victoires avant d’être tué en mission, en mai 1917.

L’Américain Robert Lufbery joue avec les lionceaux qui tiennent lieu de mascottes à l’escadrille Lafayette. Formée de volontaires d’outre-Atlantique en avril 1916, elle est intégrée à l’armée française jusqu’à l’arrivée des Américains.

Le harcèlement de l’ennemi est une des missions cruciales de l’aviation alliée: la R.A.F. bombarde des renforts allemands sur la Scarpe en avril 1918.

Trois exemples d’observation aérienne:

À 6 000 m, d’altitude, on distingue la configuration d’un terrain d’aviation, Marne 1er août 1918.

À 400 m, une colonne en marche à Melette le 5 octobre 1918.

À 200 m, les vues oblique fournissent une précision sans pareille. Le village dévasté et récemment reconquis d’Attigny, le 4 novembre 1918.

DÉBUT 1918

Pour contenir l’offensive prochaine de Ludendorff, on estime nécessaire de réunir une réserve générale des divisions alliées, qui serait utilisée en fonction des besoins urgents. Le Conseil supérieur de guerre avait émis un avis favorable le 2 février 1918 à VersaillesIl était question de verser 30 divisions dans la réserve: 10 britanniques, 12 françaises,7 italiennes. Mais les Anglais n’en veulent pas. Le chef de l’État-major impérial, Sir William Robertson, donne sa démission. Le 25 février, Haig menace de l’imiter. Il entend disposer de ses réserves, surtout si les Allemands attaquent. Les Anglais continuent à se préparer seuls au combat, dans les caves d’Arras et les cantonnements de Picardie. Pétain aussi refuse. Il veut rester maître de ses effectifs. Il offre 8 divisions au lieu de 13. Les hommes prennent position dans les cantonnements réservés à porté du front.

Lloyd George et Clemenceau renoncent: Ludendorff n’aura pas à compter sur une réserve interaliée. Il vient de remporter, avant même d’attaquer une victoire logistique.

L’état moral de l’armée s’améliore sous l’effet des mesures prises après les mutineries. Le bon effet des permissions et l’amélioration des cantonnements y est pour beaucoup.

 Le caractère international de la guerre rassure les poilus: ils ne sont plus seuls, avec les Belges et les Britanniques, à soutenir le choc allemand. Les Dominions ont envoyé leurs contingents les Portugais armé deux divisions, les Italiens garni un secteur, on forme des unités tchèques et polonaise, et les premiers Américains arrivent dans leurs side-cars poussiéreux. Plus de la moitié de l’artillerie est équipée de tracteurs et les chemins de fer installent les emplacements pour les grosses pièces montées sur rail. Plus de général sans voiture, ni de régiments sans camions.

 L’Allemagne ne peut pas compter sur le renfort de ses alliés : les Turcs et les Bulgares n’envoient aucune unité à l’Ouest. L’impératrice Zita refuse de voir partir des troupes autrichiennes qui pourraient avoir à combattre ses frères belges.

Les secours de l’arrière sont sensibles en 1918: le cinéma et le théâtre aux armées multiplient les déplacements. Les services postaux acheminent régulièrement les colis et le courrier, grâce à la mobilisation des femmes dans les P.T.T. Les ambulances automobiles et les entennes chirurgicales sont plus nombreuses. Les fréquentes visites de Clemenceau entretiennent le moral. On attend, dans chaque unité, la nouvelle offensive allemande.

Clemenceau sur le front à la fin de 1917. Les visites aux poilus sont le signe d’une réelle sollicitude, qui a le double effet de soutenir le moral des poilus et de valoir au président du Conseil une popularité inouïe dans l’armée. Il se préocucupe du moindre détail, par exemple l’approvisionnement en tabac des coopératives militaires.

Déjeuner dans les ruines de Maurepas. On a plus de chance, dit-on alors, de trouver Clemenceau aux abords de la ligne de feu que dans son bureau de la rue Saint-Dominique.

MARS 1918

LES ANGLAIS AUX PREMIÈRES LOGES

Le 21 mars 1918, à 4 h 40 du matin, le canon tonne. A 9 heures, l’attaque de Ludendorff ébranle les lignes anglaises. Deux armées sont en première ligne. La XVIIIe armée de von Hutier, le vainqueur de Riga, sous les ordres du Kronprinz de Prusse, attaque avec 27 divisions sur la Somme. Il a pour mission de séparer les Anglais des renforts français venus du Sud. Les 18 divisions de von Below (XVIIe armée), aux ordres du prince Rupprecht de Bavière, poussent vers Arras, où les Anglais sont terrés dans les abris et dans les caves. Entre les deux armées, les 20 divisions de von der Marwitz (IIe armée).

Von Hutier enfonce, avec ses Stosstruppen, la ligne anglaise du canal Crozat, et pousse sur 6 km. Ludendorff dirige la manoeuvre, qui doit rejeter les Anglais vers le Nord, élargir la brèche au sud, pour séparer les Français des Britanniques.

L’armée Gough est en déroute. Les réserves tardent à intervenir. Pétain, sollicité, envoie quelques divisions débarquées par camions, qui se fondent aussitôt dans la fournaise. Les renforts français ne viennent pas de la Champagne toute proche, où Pétain redoute une deuxième offensive allemande, mais de Lorraine, par chemin de fer. Le front défoncé de Saint-Quentin risque d’entraîner toute l’armée alliée dans la catastrophe.

 

16 mars 1918, à la jonction des fronts français et britanniques. Cinq jours avant la grande offensive de Ludendorff, les soldats alliés fraternisent. En janvier, les Anglais ont relevé les Français jusqu’à Barisis, au sud-est de Noyon., malgré la réticence du maréchal Haig.

Pour les Britanniques de Gough (Ve armée) et Byng (IIIe armée), la guerre reprend en rase campagne. Les hommes passent de la guerre des tranchées à la guerre des trous: dans la plaine picarde, un renfoncement de terrain, un creusement improvisé, tiennent lieu de ligne de défense.

MARS 1918

LE COMMANDEMENT UNIQUE

À l’évidence, la percée allemande est due au flottement du commandement interalié. Les Anglais sont toujours en retraite, sans avoir le temps d’enterrer leurs morts. Les renforts français sont écrasés. La brèche entre alliés sera bientôt irrémédiable. Ludendorff tient sa victoire.

Dans la journée tragique du 24 mars, les divergences de vues entre alliés s’étalent. Pétain veut à la foi assurer la cohésion de l’armée française et couvrir Paris. C’est se replier su sud, vers Beauvais et laisser les Britanniques à leur sort. Pour Haig, comme pour Foch, c’est plus au nord, devant Amiens, qu’il faut tenir. La liaison franc-britannique, prioritaire, sera ainsi maintenue. Il faut à cet effet, dit Foch à Clemenceau, instituer un organe directeur de la guerre.

L’urgence d’une décision est grande. En l’absence des renforts français, annonce Haig à ses dirigeants, l’armée britannique se repliera lentement sur les ports de la Manche.

 Le 25, les Alliés se réunissent à Compiègne. Lord Milner, venus de Londres, rencontre le Tigre. Les hommes tombent d’accord: la discorde interaliée est synonyme de défaite. Il est question de donner à Foch un commandement spécial.

À Doullens, le lendemain, politiques et militaires réunis en présence du président Poincaré, s’accordent enfin. Foch les convainc de sauver Amiens et de rétablir la liaison franco-britannique autour de Bray-sur-Somme. Dans ce but, il est chargé de coordonner l’action des armées alliées sur le front ouest. Pétain et Haig acceptent. Milner et Clemenceau sous la pression des événements, viennent de remporter une victoire décisive.

La situation au 24 mars, quand le fléchissement de Gough rend nécessaire l’intervention de trois divisions francaises (22e et 62e d’infanterie, 1er de cavalerie) pour  boucher les trous.

Les Britanniques montent en ligne à Aveluy (Somme), au côté des tanks. Aveluy, un village au nord du Q.G. de Byng à Albert, était très à l’arrière du front le 21 mars. Dès le 26, il est au coeur des violents combats qui opposent le Ve corps britannique et deux corps d’armée de von der Marwitz.

Foch, nommé le 14 avril commandant en chef des armées alliés: ici en juillet à son quartier-générale, il à sa droite les généralissimes Haig, (G.B.) Pétain (France), à sa gauche le général Pershing (États-Unis.

MARS 1918

LA TERREUR À PARIS

Ludendorff ne néglige rien pour terroriser les parisiens et détruire le moral allié. Le 23 mars un tube à longue portée prend Paris pour objectif à partir de la forêt de Sain-Gobain. Capable de tirer à 100 km, les journalistes le surnomment la Grosse Bertha, du nom de Bertha Krupp, la fille du canonnier allemand.

Un obus tombe tous les quarts d’heure, dans l’axe nord-sud des boulevards Saint-Michel et de Sébastopole. Le vendredi saint, le 29 mars, 75 personnes sont tuées d’un coup dans l’église de Saint-Gervais.

La population conserve son calme, mais les tirs de la Bertha se doublent de raids aériens combinés. La capital n’est plus en sécurité: Poincaré lui-même descend dans la cave de l’Élysée pendant les alertes. De nouveau, on évoque l’évacuation des institutions vers Bordeaux. Poincaré et Clemenceau l’écartent. Si les Allemands sont à Noyon, Paris est encore en dehors de la zone des combats. Clemenceau est partout. Il tient les parlementaires d’une main ferme. Il accroît la surveillance de la censure militaire, stimule le zèle de la police. Il fulmine contre les insuffisances de la D.C.A. autour de paris. Aussitôt, des canons auto-portés sont mis en batterie, couplés aux projecteurs qui illuminent les Taube, pendant que les pompiers, aidés par la population, dégagent les victimes des bombardements.

La Grosse Bertha, Max-le-Long (Lange Max) pour les Allemands et Paris Gun pour les Anglais. Sa principale qualité est la portée, assurée par la longueur du tube (34 m), le calibre étant relativement modeste (environ 210 mm). L’échauffement très rapide du fût oblige les Allemands à le remplacer à tous les 50 à 60 coups.

Effet d’un obus de la Bertha, tombé le 25 mars au 19, rue des Nonnaines d’Hyères. Au fond, l’église Saint-Gervais, théâtre de la tragédie du 29 mars. La Bertha fait 256 victimes en région parisienne, auxquelles s’ajoutent les morts des raids aériens.


Les impacts de la Bertha sur Paris du 23 mars au 9 août. Bien que tous les arrondissements soient touchés, un axe nord-sud se dégage clairement.

Trois positions successives du canon. Très mobile, il peut être démonté en 48 heures et transporté par chemin de fer.

1-    près de Crépy-en-Lannois (120 km de Paris).

2-    Près de Beaumont-sur-Seine (110 km de Paris).

3-   Aux environs de Château-Thierry (85 km de Paris).

MARS-AVRIL 1918

LES FRANÇAIS ARRIVENT

Il faut se faire tuer sur place, dit Fayolle qui commande sur Noyon.

Et Foch, le 27 mars:

Il n’y a plus un mètre de sol de France à perdre.

Les camarades arrivent.

Plus de chemin de fer: il est sous le canon allemand. Trente kilomètres de marche quotidienne, sac au dos, la noria des divisions s’organise, comme à Verdun: 40 seront jetées dans la brèche. Dès le 26 mars, Foch à fait monté sur Amiens deux divisions de l’armée Debeney.

Le front est sur le pont d’être rompu, télégraphie Fayolle.

Une résistance désespérée s’organise. Les cuirassiers et les dragons combattent à pied. Les aviateurs des groupes Féquant et Ménard harcèlent les colonnes ennemies. Au nord de la Somme, les Anglais ont reçu le renfort de 7 divisions canadiennes et australiennes. Le front se stabilise. Arras ets sauvée.

Reste Amiens. Les Allemands piétinent: les munitions manquent, les renforts tardent à arriver. Les attaques répétées n’aboutissent pas. Le 5 avril, Ludendorff arrête l’offensive. Il a avancé de 60 km, fait 90 000 prisonniers, mais il n’a pu séparer les Français des Anglais. Foch, le sauveur, deviendra général en chef des armées alliées.

Le 9 avril, les Britanniques sont attaqués dans les Flandres, entre Ypres et Béthume. Les allemands bousculent une division portugaise, franchissent la Lys, avancent au nord d’Armentières. Ils menacent les ports de la Manche. L’infanterie française arrive par camions. Douze divisions secourent les Anglais. Le corps de cavalerie de Robillot monte de 200 km en 70 heures, crevant ses chevaux.

La bataille est impitoyable. Les hommes meurent par milliers pour défendre un bois, un piton, la chasse alliée gêne l’acheminement des renforts allemands. Le Belge Gillain. L’Anglais Plumer mène une résistance acharnée. Le 25, les Allemands prennent le Mont Kemmel aux Français. C’est leur dernier succès : le 29, la seconde offensive cesse.

Haig a perdu 240 000 soldats. Lloyd George doit engager tous les sujets britanniques de moins de 50 ans pour récupérer 350 000 hommes. Les Britanniques, exténués, ont subi le poids de l’attaque Allemande. Mais il conserve les ports de la Manche, l’Yser, et Ypres. Aux Français, qui ont perdu 92 000 soldats d’attendre, avec inquiétude, la prochaine offensive de Ludendorff.

Le général Fayolle. Camarade de Foch chez les Jésuites, ce chef vénérable, âgé de 66 ans, doit assurer la liaison franco-britannique, à la tête du groupe d’armées de réserve.

Armentières, 11 avril: bombardement des britanniques sur la ville évacuée la veille. Elle constituait le premier objectif de la seconde offensive de Ludendorff.

Les Français arrivent: le 12 avril, un convoi d’artillerie française se portant au nord, sur une route de la Somme.

MAI-JUIN 1918

LE CHEMIN DES DAMES

Les Français ont envoyé leurs réserves dans le Nord pour soutenir les Britanniques. Ludendorff décide de monter une offensive limitée dans leur secteur, sur le Chemin des Dames : Foch devra ramener ses troupes au sud, et les Anglais isolés deviendront une cible aisée.

Le 27 mai, les 30 divisions du Kromprinz de Prusse, précédées de Stosstruppen, passent à l’attaque. La VIe armée de Duchêne qui voulait résister en première ligne, est facilement enfoncée. Surpris par ce succès inattendu, Ludendorff donne l’ordre de foncer vers la Marne.

Au même moment, vient d’affronter une vague de grèves. Les 29 départements qui travaillent pour la guerre sont entrés dans le mouvement. La vie chère, et à Paris les bombardements, ont favorisé les grèves. Mais les mots d’ordre sont politiques; les leaders exigent la coclusion immédiate d’une paix du droit. Les mineurs du Gard, les métallurgistes de Firminy, les ouvriers et les ouvrières de la région parisienne ont cessé le travail. Renault, Citroën, Hotchkiss, ont fermé leurs portes. En pleine menace allemande, Clemenceau a dû détourner du front des unités de cavalerie, pour contrer le risque de grève générale dans la Loire. Enfin, dans la nuit du 26 au 27 mai, 43 dirigeants syndicaux sont arrêtés, 73 ouvriers envoyés à l’armée. Le 28, la reprise du travail est générale.

Il était temps, les Allemands ont franchi l’Aisne sur des ponts intacts. Le 31, ils sont sur la Marne. Mais Pétain a organisé deux môles de résistance, autour de Soissons à l’ouest, de la Montagne de Reims à l’est. Ils tiennent, tandis que l’ennemi s’essouffle. Ludendorff, pris de court par l’ampleur du recul allié, ne dispose pas des renforts nécessaires. Le 11 juin, il doit renoncer. Les Allemands peuvent se regorger d’une avance de 60 km et de la capture de 50 000 Français. À la Chambre, Clemenceau doit user de toute son autorité pour sauver la tête des généraux responsables. Cette fois Paris est menacé. Tombera-t-il ?

Clemenceau est au coeur de la bataille: le 29 mai, il se rend à Fère-en-Tardenois pour un entretient avec le général Maistre. La ville tombe quelques heures plus tard.

La percée du Chemin des Dames et la ruée allemande vers la Marne.

Un coup de main du 134e régient d’infanterie en Champagne: les hommes montent à l’asssaut, suivis par un brancardier (à gauche). Ils franchissent quatre-vingt mètres en moins de quatre minutes, tuant plusieurs Allemands et ramenant quatre prisonniers.

Des combats se déroulent aussi plus au nord, dans le Pas-de-Calais: un fisil-mitrailleur balayant la route de Courcelles au Tronquoy, le 9 juin, Invisibles pour l’instant, les Allemands arrivent à travers les blés. Mais le cadavre derrière le tireur indique qu’un premier assaut a déjà été repoussé.

JUILLET 1918

LA DEUXIÈME BATAILLE DE LA MARNE

À Berlin, Hindenburg a fait renvoyer le secrétaire d’État Kühlmann qi doutait devant le Reichstag de la solution militaire du conflit. Ludendorff est libre de monter une nouvelle offensive, avec les renforts venus de l’Est.

L’instant est bien choisi: Pétain ne dispose que d’une demi-douzaine de divisions de réserve. Les Anglais n’ont plus que 34 divisions en ligne. Mais les Américains ont proposé l’emploi de 7 divisions à peine instruites. Désormais, ils se battent: à Cantigny en mai, au Bois Bellau et à Château-Thierry en juin, à Beaumomt-Hamel le 4 juillet. En 20 minutes, les Allemands sont capables de jetter un pont de bateaux sur la Marne. Mais le but de Ludendorff est de s’emparer de la Montagne de Reims. Le 15 juillet, à 1 heure du matin, le canon tonne à l’est de Reims, sur le front de l’armée Gouraud. Avec des noirs américains, des chasseurs polonais, des tirailleurs maghrébins, des territoriaux et le XXIe corps de Naulin, la IVe armée de Gouraud s’accroche au terrain.

Simultanément, une attaque est lancée à l’ouest de Reims, contre la Ve armée de Berthelot. A deux contre un, les Allemands enfoncent un corps d’armée italien, entre la Montagne de Bligny et la Marne. Ils franchissent le fleuve, établissent une tête de pont. Vont-ils marcher sur Paris ?

Pétain est de nouveau en désaccord avec Foch. Ce dernier veut lancer une contre-offensive avec deux armées intactes. Pétain veut utiliser ces renforts pour se cramponner au terrain. Mais Gouraud tient bon avec ses seuls effectifs. Pellé recule, mais sans flancher. C’est de leur sacrifice que dépend la victoire. Les aviateurs français attaquent sans relâche: 225 sorties dans la journée du 15. Ils bombardent et mitraillent les ponts sur la Marne. Les Américains de la 3e division se montrent héroïques au feu. Ils contribuent à réduire la poche pour jeter les Allemands à l’eau. Le XXIIe corps britannique débarque à Arcis-sur-Aube, soutenu par 4 divisions françaises.

Les Allemands avancent sur Dormans et Épernay. Mais leurs pertes sont lourdes, et les Français résistent. La Ve armée ne réussit pas à réduire la poche ennemie. Mais elle rend impossible toute progression. La 8e division de Pellé doit être évacuée en raison des pertes. Les Italiens se sont fait tuer sur place. Mais les 5 000 avions et les 20 000 canons de Pétain ont eu raison de la dernière offensive de Ludendorff, arrêtée le 17 juin, alors qu’il tient encore la Marne. Il n’a pu se rendre maître de la Montagne de Reims.

Les deux batailles de la Marne en 1914 et en 1918.

7 juillet, sur le front de Champagne: Clemenceau et Gouraud dans l’attente de la grande offensive allemande, qui surviendra huit jours plus tard.

L’attaque allemande du 15 juillet dans la Montagne de Reims, sur le front de la IVe armée (Gouraud). Les flèches indiquent la direction de l’assaut.

Une batterie française de 145/155 mm à tracteurs dans les rues de Compiègne. La ville, à l’ouest du champ de bataille, est un objectif important des Allemands.

Au nord de la forêt de Villers-Cotterêts, un régiment de Zouaves a constitué une ligne de résistance dans un chemin creux.

Des coups de main préviennent les Alliés de l’imminence d’un assaut sur la Marne. Le 14 juillet au soir, un raid audacieux de ces cinq hommes permet à Gouraud de connaître l’heure de l’attaque du 14 juillet. De gauche à droite, le sergent Lejeune, le caporal Hoquet, le lieutenant Belestier, le caporal Gourmelon et le soldat Aumassen.

Après la bataille: les prisonniers de l’armée de Gouraud défilent dans les rues de Châlon-sur-Marne.

Les unités de la Xe armée de Mangin, constituées en réserve, prennent l’offensive au matin du 18 juillet. De la forêt de Viliers-Cotterêts, les Allemands voient sortir des divisions précédées de chars Renault. Ludendorff croyait les alliés à bout. Leur attaque le surprend.

Elle frappe le flanc droit de la poche allemande, entre l’Aisne et la Marne, au moment ou les Stosstruppen essoufflées ont dû renoncer à l’assaut. En un jour, les Français capturent 12 000 prisonniers de de nombreux canons, que Clemenceau fait disposer en trophées place de la Concorde. Les positions ennemies sont enfoncées sur un front de 40 km. C’est la victoire.

On entend de Paris le canon tonner. Ludendorff jette des renforts dans la bataille. Les Français avancent lentement. Pourtant, leurs pièces d’artillerie montées sur rail parviennent à couper la voie ferrée de Fismes, le seul chemin pour les renforts de Ludendorff. Asphyxiée, l’armée allemande se retire sur la ligne de l’Aisne le 2 août. Foch et Mangin ont gagné la partie.

Le 22 juillet, une colonne Allemande franchit la Marne, mais comme prisonniers. Les ponts sont coupés, et c’est sur une passerelle provisoire, établie de nuit sous le feu allemand que s’effectue le passage.

L’offensive française en Champagne, 18-31 juillet. Au centre, le noeud ferroviaire essentiel de Fismes, dont la prise entraîne la retraite allemande sur l’Aisne.

A la fin juillet commence l’avance prudente des Français.

AOÛT 1918

LE JOUR DE DEUIL DE L’ARMÉE ALLEMANDE

Le 8 août Foch est décidé à lancer une offensive pour la victoire. Sous les ordres de Haig, la IVe armée britannique de Rawlinson et la 1re armée française de Debeney, soit 27 divisions, s’élancent hors des parallèles de départ, sur la route d’Amien à Roye. Les Allemands cèdent, perdent 400 camions et 27 000 hommes.

Ludendorff croyait les Anglais brisés, incapables du moindre mouvement offensif. Mais Haig a recu le renfort des nouveaux mobilisés et des divisions venues d’Orient. Des centaines de chars d’assaut sont déployés dans la plaine. Les Américains sont de la partie. Par le jeu continu des renforts, les Alliés attaquent jusqu’à la fin d’août et reprennent toutes les positions qu’ils avaient perdues depuis le 21 mars. Dès le 8 août, Ludendorff, que la presse allemande appelait l’homme aux nerfs d’acier: a envoyé sa démission à Guillaume II, qui l’a refusée: C’est lui disait-il, le jour de deuil de l’armée allemande. Il n’avait plus les moyens de gagner la guerre. Mieux valait demander l’armistice dans des conditions honorables. Trois mois de combats seraient encore nécessaires avant que les civils acceptent d’assumer la responsabilité du désastre des militaires.

Les mois d’août et de juillet sont pour les Allemands ceux des prisonniers et des morts. Ici, un cadavre d’allemand à Neuilly-Saint-Frontm au nord-ouest de Château-Thierry. Il est peut-être là depuis longtemps, tombé dans les combats des 10 et 11 juillet.

L’offensive franco-britanniqque du 8 août: l’essentiel du succès revient aux Canadiens et aux Australiens de Rawlinson. Ce dernier, battu sur la Somme en 1916, a su tirer les leçons sde sont échec. Exceptionellement, l’armée française de Debeney était placée sous ses ordres.

Le début de la fin : les 21 et 22 août, les Britanniques de Byng (IIIe armée) et Rawlinson (IVe armée) , font, entre Ancre et Somme, un nombre considérable de prisonniers, que l’on voit ici rassemblés dans un dépôt à l’arrière du front.

Des Allemands prisonniers des britanniques aident un de leurs blessés à sortir d’une cave-abri.

ÉTÉ 1918

LA RUSSIE DÉSEMPARÉE

Lénine a proclamé la dictature du prolétariat, lancé les gardes rouges contre les Koulaks et sucité une révolte armée dans la région du Don, qui fournit des volontaires aux généraux blancs. Alexeiev, Dénikine et Kornilov. Le Transsibérien est tenu par les 40 000 prisonniers libérés et armés de la Légion tchèque, qui veulent rejoindre l’ouest en Sembarquant dans le port de Vlidivostok. La Sibérie, où les Bolcheviks viennent de liquider le Tsar et sa famille (Ekaterinbourg, 16 juillet), leur échappe peu après juillet. Trotski doit diriger les premiers bataillons de l’armée rouge au nord de Moscou, sur Iaroslav, aux mains des Blancs de Boris Savinkov.

Il décide de conclure un accord secret avec les Allemands qui occupe l’Ukraine, les Pays Baltes et la Finlande. Pendant que les japonais débarquent 76 000 hommes à Vladivostok pour rendre la main aux Tchèques et prendre la Sibérie, que les Anglo-Français occupent au nord Arkhangelsk, les Allemands s’engagent à aider Trotski contre Alexeiev et à nettoyer le corps expéditionnaire allié de Mourmansk. Trotski peut ainsi reprendre Kanzan, et attaquer sur la moyenne Volga. L’engagement contre-révolutionnaire des Alliés objectif de Hindenburg, mais en obligeant les Allemands à maintenir des troupes dans l’est, les Bolcheviks empêchent Ludendorff de l’emporter à l’ouest.

Le démembrement de la Russie: situation en novembre 1918.

Débarquement de Britanniques à Vladivostok; le drapeau anglais est salué par des officiers russes et britanniques, devant une garde Tchécoslovaques.

Mai-juin 1918: la Légion tchèque progresse sur le Transsbérien, dans un train camouflé.

SEPTEMBRE 1918

LES AMÉRICAINS À SAINT-MIHIEL

Du 12 au 15 septembre, les Américains attaquent pour la première fois seules. Ils ont déjà attaqué sur la Marne, mais au sein d’armée alliées. Ils doivent maintenant réduire le saillant de Saint-Mihiel, sur la Meuse, pour dégager définitivement Verdun. Sur les 600 000 hommes de la 1re armée de Pershing, seul 50 000 sont français.

Les doughboys attaquent bravement, avec le soutien de 3000 pièces d’artillerie et de 270 chars. Au prix de pertes sévères. Les Américains enlèvent toutes positions, faisant de nombreux prisonniers. Dès le 13, Pétain et Pershing entre dans Saint- Mihiel.

Les Américains sont alors près de 1 200 000 en France, et les débarquements se poursuivent constamment, La 1re armée s’est placée pour l’offensive finale de Foch, même si l’exploitation de l’action a montré des désordres à l’arrière des lignes, des lenteurs dans le ravitaillement et l’approvisionnement en munitions.

L’artillerie américaine en action en Meuse-Argonne, avec des 75 mm français.

L’assaut américain à Saint-Mihiel, le 12 septembre.

Les Américains combattent sous leur drapeau. C’était la revendication essentielle de Pershing. Ici une compagnie du génie traverse le village de Nonsard.

Ici vécût, en août 1870, le prince Bismarck. Ce doughboy semble insensible à ce panneau commémoratif, laissé derrière eux par les Allemands lors de l’évacuation de Granpré  Ardenne). Le 10 octobre, les Français de Gouraud et les Américains y font jonction, parachevant le succès de l’offensive de Meuse-Argonne.

SEPTEMBRE 1918

PREMIÈRE VICTOIRE DANS LES BALKANS

Le général Franchet d’Esperey a été nommé sur le front d’Orient. Il y prépare une offensive interaliée dès le début d’août, pour atteindre le noeud ferroviaire de Gradsko dans le Haut-Vardar et réduire à l’impuissance l’armée bulgare. Il dispose de divisions grèques et serbes, mais les Italiens, menacés dans les Alpes, et les Britanniques, qui ont subi de lourdes pertes sur le front Ouest, hésitent à soutenir l’offensive. Pour obtenir leur accord, Clemenceau doit envoyer à Rome et à Londres le général Guillaumat.

A partir du 15 septembre, l’offensive est en cours, soutenue par un feu puissant d’artillerie. Les Serbes font merveille, avec les coloniaux de Franchet, dans l’attaque très dure du massif de la Mogléna, entre le Vardar et la Cerna. Le 23, les Bulgares, harcèlés par la cavalerie, mitraillés et bombardés par l’aviation, sont en retraite: les Français prennent Prilep sur l’aile gauche, les Serbes passent le Vardar au centre, les Britanniques et les Grecs progressent plus lentement sur l’aile droite. Le 29, débouchant de la montagne, la cavalerie de Jouinot-Gambetta s’empare d’Uskub. L’armée bulgare, coupée en deux, est au bord de l’effondrement et les renforts acheminés sur l’ordre de Ludendorff arrivent trop tard. L’armée d’Orient vient de reporter la première victoire des Alliés. Le 29 au soir, les plénipotentaires bulgares signent le premier armistice de la guerre.

Le général Franchet d’Esperey. Sa percée, réalisée par la montagne et non par la vallée du Vardar, lui permet de remporter le plus ample succès offensive de 1918.

Mai 1918: en prélude à la grande offensive, Guillaumat attaque le Skra di legen. Des soldats grecs, équipés à la française, en ramènent une colonne de prisonniers bulgares.

L’heure serbe: le prince héritier Alexandre de Serbie, accompagné de son état-major et du général Bojovic, chef de la 1re armée (deuxième à gauche), observe l’offensive allié du 15 septembre. Depuis deux ans, ce rocher au seuil de leur terre natale sert d’observation aux Serbes.

Entrée de cavaliers serbes, en uniforme français, à Rozden. Comme les Australiens en palestine, les cavaliers font ici la décision par leurs percées audacieuses.

SEPTEMBRE 1918

LA VICTOIRE D’ALLENBY EN ORIENT

Au début de septembre, Allenby décide de lancer une offensive contre le groupe d’armées turques Yilderim. Ses services de renseignement lui ont en effet appris que le tunnel du Taurus était en réfection: le blocage de la voie ferré empêchait les généraux allemands d’envoyer des renforts aux Turcs. C’était le momment d’attaquer. La cavalerie britannique se lance en avant vers le lac de Tibériade, le 19 septembre, Le front turcs est enfoncé, les deux armées de l’aile droite capitulent, la troisième, sur l’aile gauche, abandonne le Jourdain pour tâcher de se replier sur Damas. Les cavaliers anglais y arrivent les premiers et font 22 000 prisonniers le 30 septembre. La résistance turque est brisée: le 30 octobre, l’amiral anglais Callthorpe signera seul l’armistice avec Izzet Pacha, sans aucun concours français. L’Empire ottoman a cessé d’exister.

Bombardement de Beyrouth par des hydravions anglais. La ville tombe aux mains des Alliés les 7 et 8 octobre.

Mars-avril 1918: campement de troupes indiennes au nord du Bagdad, Les civières forment un abri improvisé contre le soleil. La chaleur excessive interrompt pratiquement les opérations britanniques en Mésopotamie d’avril à octobre.

Le général Harry-Chauvel, commandant le desert Mounted Corps (DMC), dans les rues de Damas. De la percée de Meggido (19 septembre) à la prise de Damas (30 septembre), la cavalerie australienne du DMC livre les dernières grandes charges de la guerre.

SEPTEMBRE-OCTOBRE 1918

LA VICTOIRE DE FOCH

Foch veut en finir: il lance, du 26 au 28 septembre, l’offensive de la victoire. Le 26, la 1re armée américaine et la IVe française attaquent de Reims à l’Argonne, vers Mézières. Le 27, la Ire et la IIIe armée britanniques se lancent vers Cambrai, contre la ligne Hindenburg inachevée. Le 28, plus au sud, Albert 1re de Belgique commande une vaste offensive interaliée dans les Flandres, en direction de Bruges. Le 30, l’armée Berthelot entre en scène en Champagne. Vingt-deux divisions américaines sont engagées dans une partie où le quartier-maître général Ludendorff est en infériorité : il vient de dissoudre 14 divisions.

Les résultats ne sont pas décisifs, mais les progrès des Alliés sont réguliers. L’armée Allemande recule en bon ordre, d’une position à l’autre. Les Américains marquent le pas entre l’Argonne et la Meuse.-, Gouraud piétine en Champagne. Les Anglais ont percé la ligne Hindenburg, mais avancent lentement. La résistance allemande en Flandre est tenace, grâce à l’envoi d’ultimes renforts.

Mais Hidenburg et Ludendorff redoutent une percée à tout moment, ils interviennent à Berlin pour sauver leur armée. Guillaume II vient de nommer Max de Bade à la tête du gouvernement, pour faire supporter à ce prince pacifique la responsabilité du désastre. Dans la nuit du 3 au 4 octobre, il signe une note au président Wilson l’ouverture de négociations de paix. La marche vers l’armistice est commencée. Elle ne verra son terme qu’au 11 novembre.

Les soldats du Royal North Lancashire forment une des premières patrouilles qui pénètrent dans Cambrai au matin du 9 octobre. La ville est entièrement ruinée: les Prussiens l’ont vidée de ses habitants, pillée, puis incendiée au moyen de mines à retardement.

Denain, 20 octobre: le lendemain de leur libération par les Canadiens, les habitants saluent le prince de Galles (au centre) et le général Currie).

Le 17 octobre, Lille enfin libéré acclame ses libérateurs britanniques, des unités de la Ve armée de Birdwood. Lorsqu’apparaît le premier Français l’enthousiasme redouble.

OCTOBRE-NOVEMBRE 1918

L’ABANDON DE L’EMPEREUR CHARLES

L’empereur Charles ne parvient pas à dominer les Tchèques, les polonais, les Slaves du sud qui demandent et obtiennent une indépendance de fait. Leurs soldats désertent les rangs de l’armée K und K. Il devient impossible de poursuivre le combat.

Le 24 octobre, les Italiens engagent leur offensive sur le front des Alpes, appuyés par trois divisions franco-britanniques. La Piave est franchie, Le Mont Grappa attaqué. Le général Caviglia parvient le 28, à bousculer l’armée autrichienne et à remporter, le 30, la victoire incontestable de Vottorio Veneto. La défaite tourne aussitôt en déroute. Seuls les éléments germaniques de l’armée résistent encore. Trente divisions slaves ont refusé de servir.

Charles 1re doit se résoudre à demander l’armistice, signé le 3 novembre à Villa Giusti. Réfugié en Hongrie, il signera un acte de renonciation à toute participation aux affaires de l’État. Il n’a pas abdiqué. Il a seulement quitté son trône. L’Empire austro-Hongrois s’est écroulé.

29 octobre: camions de soldats révolutionnaires dans les rues de Budapest.

Libération d’une ville italienne par les troupes britanniques et transalpines.

Achèvement définitif de l’Autriche-Hongrie: le 25 décembre, l’automobile du président Massaryk arrive sur la place Venceslas de Prague, escortée par un détachement de légionnaires tchécoslovaques.

OCTOBRE-NOVEMBRE 1918

LA RÉVOLUTION EN ALLEMAGNE

Le 26 octobre, Ludendorff a démissionné parce que les notes successives de Wilson, en réponse à la demande allemande d’armistice, exigeaient la destruction de l’appareil militaire et l’abolition du régime autocratique. La réponse de Wilson, dit-il, demande la capitulation militaire, elle est donc inacceptable.

Le 3 novembre, la flotte se mutine à Kiel. Le 7, Hanovre, Brunswick, Cologne sont gagnées par le mouvement. Dans la nuit du 7 au 8, le socialiste Kurt Eisner forme à Munich un Soviet qui exige la démission de l’Empereur pendant que la retraite s’accentue sur le front, jusqu’à la ligne Gand-Valenciennes et la Serre. Le 5 novembre, la retraite a été décidée vers Charleroi et Mézières. Les Américains ont déjàs pris pied sur la rive droite de la Meuse. Foch prépare une attaque en Lorraine. Le 6 novembre, le nouveau général en chef, Gröner, avertit Berlin qu’il faut mettre bas les armes.

Une révolution se prépare dans la capitale. Elle éclate le 8, et la troupe refuse de mener la répression. Le Kaiser renonce enfin au trône, passe en Hollande, et la République est proclamée. Il ne reste plus qu’à traiter avec les Alliés, Mais qui traitera?

Kiel, 5 novembre : le socialiste Gustav Noske harangue les équipages mutiné des sous-marins.

La révolution du 9 novembre à Berlin: la garde de la caserne des Uhlans, symbole du régime prussien, fait sa reddition aux conseils d’ouvriers et de soldats.

Sur la Potsdamer Platz, soldats allemands et prisonniers français libérés se côtoient dans une ambiance de franche fraternisation.

NOVEMBRE 1918

L’ARMISTICE

Clemenceau et Foch pensent qu’il ne faut pas riquer la vie d’un seul soldat allié, alors que les Allemands acceptent de signer l’armistice. Encore faut-il qu’un pouvoir civil responsable s’engage. Le centriste catholique Erzberger, qui avait plaidé au Reichstag pour une résolution de paix en juillet 1917, est chargé de négocoer. Foch lui impose des conditions militaires très dures sur lesquelles les Alliés, après dicussion se sont mis d’accord.

Les Allemands acceptent à Rethondes, dans le wagon de Foch, de signer l’armistice, dans la nuit du 10 au 11 novembre. Ils s’engagent à évacuer les territoires envahis, la rive gauche du Rihn. À livrer des têtes de pont sur le fleuve et une zone de 10 kilomètres sur la rive droite. Ils livrent leurs canons lourds et 25 000 mitrailleuses, leur flotte de haute mer, et leurs sous-marins. Ils promettent de retirer les troupes encore en activité à l’est de l’Europe. L’Allemagne est, selon le mot de Foch, à la merci des vainqueurs,

Dans toutes les capitales alliées, c’est une explosion de joie. Les foules envahissent les rues, les Français rentrent dans Metz et Strasbourg décorées de drapeaux tricolores.C’est la fin du cauchemar. Il ne manque à la réjouisance populaire qu’un million et demi de femmes françaises, mères ou veuves des français tués et disparus, et qui n’ont pas le coeur de fêter la victoire.

Une parisienne offre des fleurs à un soldat américain, le jour de l’armistice. La vague de joie et de soulagement ne fait qu’accentuer le succès des doughboys auprès des élégantes.

New York entre en liesse dès l’annonce de l’armistice. Les affaires sont immédiatement suspendues et la foule envahit les rues de Times Square.

Apogée de l’émotion: la cérémonie de Metz, le 8 décembre 1918. Pétain, qui vient de recevoir le bâton de maréchal de France, retient une larme. Derrière lui, les généraux Pershing (États-Unis), Gillian (Belgique), Albricci Italie), Haller (Pologne). Poincaré prenant Clemenceau par l’épaule, lui donne l’accolade. Les coeurs des deux adversaires politiques battent, pour un instant, à l’unisson.



01/05/2013
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