LA GRANDE GUERRE 1914-1918

NAVALE 1914-1918


LA RENCONTRE MANQUÉE DU JUTLAND

C’était, ce 31 mai 1916, le déchiffrement des messages radio allemands annoncent des manoeuvres d’appareillage qui avait provoqué la sortie de la flotte de bataille anglaise de sa base de Scapa Flow en Écosse et de la flotte des croiseurs de bataille du port de Rosyth situé plus au sud. La rencontre ne se produit qu’au début de l’après-midi et d’une manière parfaitement banale.

À 14 h 15, le croiseur léger HMS Galatea, qui éclairait vers l’est les croiseurs de bataille, appert la vapeur s’échappant des soupapes de sécurité d’un cargo neutre qui venait de stopper, arraisonné par une torpille allemand. Le Galatea s’approcha et tira le premier coup de canon de la bataille du Jutland. Vers 15 h 30, les croiseurs de bataille anglais guidés par les signaux de leurs éclaireurs apercevaient leurs adversaires, les cinq croiseurs de bataille du vice-amiral von Hipper, le Lützow, le Derfflinger, le Seydlitz, le Molke et le Von der Tann, sous la forme de panaches de fumée qui, la distance diminuaint, révélèrent à leur base des mâts et des cheminées minuscules. La ligne allemande, entourée de croiseurs légers et de flottilles de torpilleurs, faisait route au sud-est à bonne vitesse. Hipper, conscient de son infériorité en nombre en nombre et en armement (seuls ses deux navires de tête, très moderne, disposaient de canons de 305 mm, les autres se contentant de canons de 280 mm) se repliait sur le gros de la flotte allemande dès que lui furent signalés les six croiseurs de bataille du vice-amiral sir David Beatty, HMS Lion. HMS Princess Royal, HMS Queen Mary, HMS Tiger, HMS New Zeakand et HMS Indefatigable, dont les quatre premiers étaient armée de canon de 343 mm.

L’Indefatigable fendant les flots à grande vitesse; avec son jumeau, le New Zealand, il formait le second escadron de croiseurs de bataille. Ces deux bâtiments différençiaient de la classe Invincible grâce à leurs cheminées espacées; ils possédaient une grande hauteur sur l’eau, caractéristique très visible sur le cliché.

Les télémétrisites allemands eurent, dans leurs instruments à fort grossissement, le spectacle impressionnant des six énormes vaisseaux qui naviguaient sur un cape de rencontre sur la route parallèle à l’escadre allemande, les espacements étant de 400 à 500 m entre les navires. Le Lützow ouvrit le feu à 15 h 47 à une distance d’environ 17 000 m mais elle devait diminuer rapidement.

Les tirs des Anglais étaient synchronisés et leurs pointages s’effectuaient automatiquement au moyen d’un appareil appelé le Firing Director. Les Allemands disposaient d’appareils un peu moins sophistiqués mais très au point et d’instruments optiques très précis et très lumineux. La recherche à vue des gerbes d’eau provoquées par les obus, gerbes courtes, longues ou encadrantes (primordiale pour le réglage du tir) nécessitait une forte cadence de tir. Au début du combat, les canonniers allemands tirèrent nettement plus vite que leurs opposants, presque deux slaves pour une. Ils utilisaient la méthode de recherche de l’encadrement de l’adversaire dite par échelons et qui, pour être efficace, demande un tir accéléré, chaque slave étant corrigée systématiquement, pour la distance, par rapport à la précédente. Le résultat fut qu’ils impressionnèrent les observateurs dès les premières minutes du combat par la densité et l’efficacité de leurs tirs.

Tout au long de la bataille, les mauvaises conditions atmosphériques furent aggravées par les fumées des navires et celles des explosions des milliers d’obus tirés de part et d’autre. Quelques instants avant la destruction de l’Indefaticable, la ligne de bataille anglaise photographiée à partir du croiseur Birmingham.

On tirera sur le troisième grand croiseur à partir de la gauche, hausse 16 700 mètres. Or vers 16 h, après environ un quart d’heure de combat le navire de queue anglais HMS Indefatigable durement touché, une grosse fumée s’élevant de ses superstructures arrière ne suivait pas le changement de route vers l’ennemi de la ligne de Beatty et se trouvait à 400 m de la hanche tribord du navire qui le précédait, le New Zesland. Touché de nouveau à la tourelle avant l’Indefatigable continua sur cette route divergente, puis explosa brusquement en une série de détonations commençent apparemment à l’avant. Ce navire qui venait de disparaître de la surface de la mer d’une façon aussi rapide et aussi brutale était le no 6 de la ligne anglaise et avait manifestement été coulé par le Von der Tann, le no 5 allemand, qui s’était sans doute trompé d’objectif.

18 h 30 l’invincible, portant les couleurs de l’amiral Hood, conduit la ligne britannique à l’assaut de la flotte de haute mer allemande. 18 h 33, sous le feu de cinq bâtiments ennemis l’invincible est durement touché sur sa tourelle Q; en quelques instants, le navire commence à brûler ( ci-dessus )

Alors que les navires de Jellicoe venaient de faire demi-tour à la suite de l’ordre donné par Scheer à ses torpilleurs de se ruer vers l’ennemi, l’équipage du Benbow aperçut une épave coupée en deux et cria sa joie, croyant avoir affaire à un bâtiment allemand; hélas il s’agissait de l’invincible. Il n’y eu que trois survivants.

Le Drefflinger joua un grand rôle dans la destruction de l’invincible et le Queen Mary.

Une violente polémique provoquées par l’évidence qu’un nouveau Trafalgar n’avait pas eu lieu et que Nelson était bien mort, se développa en Angleterre à laquelle participèrent même les amiraux allemands par voie de presse, il y eut des pro-Jellicoe et des pro-Beatty, les uns reprochant à sir Davis Beatty son audace désordonnée, les autres sa prudence excessive à lord Jellicoe.

On peut dire que, dans l’ensemble, ce furent les tenants de Beatty qui l’emportèrent au nom de l’intrépidité et du dynamisme novateur.

Un cuirassé de la classe Nassau tirant une slave. Ces bâtiments déjà anciens, formaient la seconde division de cuirassés et avaient été placés très en retrait par rapport à la première ligne de combat.

Scheer faisait face à une situation qui risquait de devenir rapidement désespérée: à la tête de la ligne de bataille, le Konig se trouvait sous un déluge d’acier et embarquait beaucoup d’eau Pour se sortir de ce mauvais pas, Scheer ordonna à la flotte de faire demi-tour.

 LA GRANDE GUERRE SOUS LES FLOTS

 En 1914, le sous-marin était considéré par beaucoup d’officiers de marine comme une arme défensive à court rayon d’action, et les Allemands eux-mêmes ne se rendaient pas compte de son immense potentiel. En fait, le développement des armes sous-marines révolutionna la guerre navale. En 1914, le submersible était déjà passé du type à coque unique en forme de fuseau à des modèles plus gros dotés d’une double coque, qui disposaient d’un volume intérieur utilisable beaucoup plus important et de qualité nautiques considérablement améliorées. Cette dernière caractéristique était capitale, car les sous-marins, avec leurs mauvaises performances en immersion, devaient opérer le plus souvent en surface et ne plonger que pour sévader ou pour attaquer. Les problèmes posés par des patrouilles prolongées ou l’équipement des navires ou armes adaptées à leurs cibles les plus probables n’avaient guère été envisagés. Ainsi, par exemple, quand les Allemands s’aperçurent que le rayon d’action et l’autonomie des U-Boote étaient beaucoup plus important que prévu, le faible nombre de torpilles embarquées imposa immédiatement des limites à leurs activités: faute de trouver une méthode pour les réapprovisionner sur place ou de leur donner d’autres moyens d’attaque, les navires existants seraient obligés d’écourter des patrouilles fructueuses et de passer beaucoup de temps en transit. Dans la pratique les torpilles étaient réservées aux cibles difficiles ou de grande valeur, alors que des canons ou des charges de destruction suffisaient pour couler les navires marchands, dont les Allemands découvrirent rapidement que la protection était le point faible du Royaume-Uni. Cela privait cependant le submersible de son atout principal, l’effet de surprise et amena la mise sur pied de contre-mesures telles que les navires Q, La lenteur de l’immersion des sous-marins, jugée de peu de conséquence en temps de paix. Se révéla un sérieux inconvénient quand la situation prit brusquement une nouvelle tournure. Il suffisait cependant souvent de pratiquer des anguillers supplémentaires dans la structure de la coque pour améliorer cette caractéristique.

Le U-8 coulé par le HMS Maori et le HMS Gurkha le 4 mars 1915, fut le premier U-Boot perdu par les Allemands. L’abordage à l’éperon était une méthode souvent utilisée pour détruire les sous-marins: deux semaines plus tard, le U-29 sombra à son tour, heurté par les 18 000 t du HMS Dreadnought.

Doté d’un seul lance-torpilles et de huit membres d’équipage, le HM Submarine no. 2 de 113 t fut le premier sous-marin à entrer en service dans la Royal Navy. Le no.1 sombra en 1913 alors qu’il était en remorque et ne fut retrouvé qu’en 1981; il est en cours de réfection au musée de Gosport.

Les torpilles étaient généralement performantes pour l’époque, mais le manque de portée et d’efficacité des engins britanniques de 457 mm et allemande de 450 mm amena la mise en service d’armes de 533 mm et de 500 mm. Celles-ci exigeaient bien sûr des bâtiments plus gros, mais elles pouvaient être lancées d’une distance plus grande. L’augmentation de la taille des coques entraîna l’abandon par les Britanniques des tubes montés transversalement et une réduction des exigences de maniabilité, un décrochage rapide n’étant plus nécessaire.

Comme les navires de guerre étaient les cibles les plus probables des bateaux britanniques, les canons ne furent guère privilégiés au départ. Les pièces de six, insuffisantes, cédèrent la place à des pièces de douze, et les bâtiments embarquèrent un ou deux canons de 102 mm pour se défendre contre les sous-marins en surface. Les Allemands estimaient le canon indispensable comme solution de rechange au torpillage des navires marchands et firent passer progressivement son calibre de 50 mm à 88 mm, 105 mm et finalement 150 mm; il arrivait que deux canons soient montés. Bien que les submersibles fassent l’objet d’attaques aériennes, leurs armes automatiques légères n’étaient pas spécifiquement destinées à des fonctions AA. Les armes de gros calibre comme celles qui équipaient les sous-marins de surveillance étaient une aberration et n’apportèrent rien au développement du submersible en général.

Les Allemands s’intéressèrent au mouillage de mines, dont ils comprenaient la rentabilité beaucoup mieux que les Britanniques, Ces derniers transformèrent quelques navires standards, mais les Allemands construisirent de nombreux bâtiments côtiers et océaniques spécialement conçus pour cette tâche. Les deux pays utilisèrent à peu près le même dispositif, des rampes d’arrimage inondables; ce système était cependant lent et peu sûr, et les Britanniques l’abandonnèrent bientôt pour arrimer les mines dans le sens de la longueur de la coque et les mouiller par-dessus la poupe.

L’une des victimes: les attaques de sous-marins provoquèrent la destruction de onze croiseurs lourds pendant la Première Guerre mondiale. Le croiseur de 14 000 t HMS Drake fut torpillé et coulé au large de l’Irlande du Nord par l’U-79, mouilleur de mines équipé de deux lance-torpilles extérieurs.

 

Un U-Boot, arborant un dessin de camouflage intéressant, se rend en 1918. Alors que la plupart des équipages de la flotte de haute mer allemande se mutinèrent, des officiers volontaires tentèrent de pénétrer avec un sous-marin dans la base britannique de Scapa Flow pour une mission suicide.

L’épave d’un U-Boot échouée sur une plage du Sussex en 1919. Après la victoire, les Alliés se partagèrent ce qui restait de la flotte ennemie, mais beaucoup de U-Boote sombrèrent accidentellement au moment où les marins allemands étaient censés les remettres à leurs nouveaux propriétaires.

L’immersion périscopique d’un sous-marin de la Royal Navy. Une fois en mer, les commandants étaient pratiquement livrés à eux mêmes. Car les techniques radios utilisées pendant la Seconde Guerre mondiale pour contrôler les U-Boote depuis la terre en étaient encore à leurs premiers balbutiements.

Les communications radios, étaient les plus souvent d’une portée et d’une qualité incertaines, si bien que le commandement centralisé exercé sur les sous-marins pendant la Seconde Guerre mondiale, était impossible pendant la Première. Les antennes exigeaient que les bâtiments soient encombrés de deux hauts mâts télescopiques ou repliables.

Les communications entre un sous-marin en plongée et un navire de surface en étaient encore au stade expérimental en 1914; les recherches dans ce domaine rejoignaient celles qui étaient conduites sur la détection des sous-marins au moyen de dispositifs acoustiques passifs. Il peut être surprenant de constater, à notre époque de systèmes linéaires remorqués que des hydrophones furent placés à l’arrière des navires des 1917, et disposés par groupes de plusieurs éléments immergés, mais la grande percée technologique. La détection active par asdic (plus tard rebaptisé sonar), atteignit le stade opérationnel un peu trop tard pour être utilisée. Presque tous les sous-marins de cette période étaient extérieurement très encombrés, possédaient des hélices inéfficaces et faisaient beaucoup de bruit, mais ils n’étaient encore généralement détectés qu’après être sortis à découvert pour attaquer, ce qui leur laissait l’initiative.

Les recherches précoces des Allemands pour produire un moteur Diesel fiable permirent à leurs bâtiments de bénéficier d’excellentes machines, seuls quelques-uns des tous premiers étant équipés du moteur Korting qui faisait beaucoup de fumée et utilisait un combustible à point d’ignition élevé. Les britanniques n’abandonnèrent le moteur à essence, plus dangereux, qu’avec la classe D, mais il faut dire, en faveur de ce système, qu’il était plus compact et avait un rapport puissance poids bien meilleur.

 L’intérieur exigu d’un sous-marin britannique. Quand la taille des bâtiments augmenta, celle des équipages en fit autant, et l’espace demeura une denrée rare. L’odeur de choux rance qui règne invariablement dans ce type de navire reste l’un des éléments les plus désagréables de la vie des sous-mariniers.

 Photographié ici à Scapa Flow, le G14 était l’un des quatorze unités d’une classe de sous-marins commandée avant la guerre pour répondre aux rumeurs exagérées concernant les performances des U-Boote allemands. Les sous-mariniers de la Royal  Navy s’acquittèrent fort bien de leur tâche.

Les dimensions de tous les types de sous-marins augmentèrent considérablement pendant le conflit, il en résulta une moins grande agilité et une détection plus facile, mais l’autonomie et l’habitabilité en furent sensiblement améliorées, et des patrouilles de six à sept semaines devinrent possibles. Lors de la Seconde Guerre mondiale, des sous-marins allemands purent même atteindre la zone d’influence japonaise en Asie.

Les navires de la classe K furent conçus comme des sous-marins de croisière capables d’une vitesse de 24 noeuds en surface. Aucun moteur Diesel de l’époque n’étant à la hauteur, des turbines à vapeur furent montées, avec un diesel pour le générateur.

LE PREMIER DES AS

L’U-35 demeure à ce jour le sous-marin qui connut le plus de réussite au combat. Il coula 224 navires, représentant un total de 535 900 t et dont la plupart furent détruits alors qu’il était sous les ordres de Lothar von Arnauld de la Perière, un aristocrate d’une vieille famille française; par comparaison, le sous-marin de la Seconde Guerre mondiale qui obtint les meilleurs résultats, le U-48, coula cinquante-deux bâtiments (310 000 t au total).

Un hydravion apporte des dépêches à l’U-35 en Méditerranée. Le Kaiser utilisa une fois ce sous-marin pour remetttre un message personnel au roi d’Espagne; sur le trajet aller retour de Carthagène, von Arnauld tira plus de 500 obus contre des navires de commerce alliés.

 L’équipage de l’U-35 observe, en avril 1917, quatre navires de guerre. L’année précédente, von Arnauld avait vécu une expérience humiliante en ratant le croiseur-cuirassé français Waldeck-Rousseau.

 Le 12 novembre 1915, le sous-marin allemand U-35 revint à sa base avancée du port de Cattaro, alors sous la domination austro-hongroise. Son commandant Kophamel, avait détruit en un mois environ 49 000 t de navires dans le bassin oriental de la Méditerranée. Il allait maintenant prendre le commandement de la nouvelle base de Pola et devait être remplacé sur son sous-marin par un inconnu que rien ne semblait destiner à de telles fonctions.

 Cette photo prise en 1918 montre l’U-35 à Harwich en compagnie d’autres navires allemands remis aux Alliés.

Lothar Eugen George von Arnauld de la Perière, qui n’avait pas encore trente ans, descendait d’une très vieille famille d’aristocrates français. Son père était commissaire aux comptes à Posdam, mais l’un de ses arrière grand-pères, général de division dans l’armée prussienne, s’était distingué au combat sous le règne de Frédéric le Grand.

À l’âge de dix ans, Lothar fut envoyé à Wahlstatt  comme élève officier de marine ; il entra dans la Kaiserliche Marine sept ans plus tard. Se spécialisant dans les torpilles, il servit en Extrême-Orient à bord du croiseur Emden entre 1911 et 1913 avant d’être détaché à l’état-major de l’amiral von Pohl, qui allait bientôt devenir commandant en chef de la flotte de haute mer allemande. Son affectation suivante fut l’U-35.

Le rendez-vous de l’U-35 avec un autre U-Boot. Le manque d’équipement radio signifiait que la tactique des meutes n’était pas encore possible, mais les navires de surface avaient peu d'armes et de capteurs, et les marines alliées mirent du temps à s’ntéresser à la lutte ASM.

Dans ses rapports, Kophamel  avait décrit le bassin oriental de la Méditerranée comme un bon terrain de chasse, avec peu de patrouilles et des navires (qui suivaient) des routes imposées. Après un court radoub, L’U-35 appareilla le 20 février 916 pour aller opérer entre Malte et la Crète. Sa première victime fut, le 26 février, le navire auxiliaire français Provence II, dont la destruction coûta la vie à plus de la moitié des 1 800 soldats qui se trouvaient à bord. Le statut du Provence II autorisait à l’attaquer en plongée sans avertissement, mais en fin de ménager ses torpilles, von Arnauld avait sagement recruté un bon canonnier. Pendant les deux jours qui suivirent, deux bâtiments furent coulés à coup de canon, mais un troisième s’échappa parce que le mouvement du bateau  rendait le tir difficile. Le 29 février, il fallut quatre torpilles à l’U-35 pour envoyer par le fond l’aviso britannique HMS Primula. En revenant, von Arnauld trouva le secteur presque vide de bateaux : au bout d’un mois d’opération, il n’avait fait qu’une seule victime d’importance, le navire de transport britannique de 13 540 t Minneapolis, qui mit deux jours à sombrer.

L’U-35 reçoit des visiteurs. La silhouette en uniforme britannique est le capitaine Wilson, messager d’État que von Arnauld a fait prisonnier au cours d’une patrouille.

Le 26 juillet il appareilla pour la même zone et effectua alors la patrouille sous-marine la plus fructueuse du conflit: en l’espace de vingt-cinq jours, il détruisit cinquante-quatre navires, représentant un total d’environ 90 000 t, qu’il attaqua tous en surface. Von Arnauld prenait des risques considérables pour respecter la réglementation. Le 14 août, par exemple, il coula onze petits bâtiments de commerce italiens qui doublaient la pointe nord de la Corse, mais il fut assailli par un nombre équivalent de navires ASM français. Le lendemain, alors qu’il avait arrêté un petit bâtiment, il vit arriver un gros vaisseau, qui ne portait aucune marque d’identification, et ouvrit soudain le feu; von Arnauld plongea rapidement et son adversaire, le bateau piège italien Città di Sassari, s’éloigna. Quand l’U-35 rentra à sa base, il avait tiré plus de 900 obus de 105 mm, mais seulement quatre torpilles, dont l’une avait manqué le croiseur-cuirassé français Waldeck-Rousseau.

La patrouille suivante provoqua la perte de vingt-deux navires représentant plus de 70 000 t au total. Parmi les plus gros se trouvait, par exemple, le Benpark  de 3 840 t, qui faisait la traversée entre l’Amérique du Nord et Gênes avec un manifeste ou figuraient 5 000 t de tissus à la pièce, de l’acier manufacturé, des machines-outils, neuf cents barres de cuivre et 1 000 t de coke. Au cours de l’opération l’U-35 se rendit de nouveau à Carthagène pour prendre un groupe d’officiers allemands chargés d’une mission inconnue: parmi eux se trouvait un certain capitaine de corvette Canaris, qui devait plus tard devenir le chef du renseignement militaire.

Von Arnauld fut décoré  et continua de patrouille en patrouille, à augmenter le nombre de ses victoires. Avec la mise en place du système de convois, cependant, le manque de cibles l’obligea peu à peu à opérer au large de Gibraltar.

Au début de l’année 1918, alors qu’il comptait à son tableau de chasse 195 navires (plus de 500 000 t au total), von Arnauld retourna en Allemagne pour prendre  le commandement du sous-marin de grande croisière U-139 et mener l’offensive contre les eaux américaines. Bien que d’autres, dont l’U-40 de Kophamel, soient arrivée au cours de l’été, von Arnauld fut rappelé; il opéra alors à l’ouest de l’Espagne, où il se heurta à des convois bien escortés et aux redoutables grenades ASM. Bien qu’il est eu l’honneur d’être reçu personnellement par le Kaiser, il revin à Kiel le 14 octobre 1918 pour trouver la flotte révoltée et partager avec elle l’humiliation de la défaite.

 VICTOIRE DANS LES DÉTROITS

Le 30 octobre 1914, la Turquie se rangea aux côtés des Empires centraux, les choses commencèrent à devenir sérieuses pour une petite force sous-marine franco-anglaise basée sur l’île grecque de Ténédos. L’ennemi était solidement retranché derrière des barrages de mines.

Commodément placés près de l’entrée du détroit des Dardanelles, les bateaux avaient pu se familiariser avec les environs depuis que le croiseur de bataille allemand Goeben et le croiseur léger Breslau avaient disparu dans le détroit, au mois d’août précédent. Avec le ravitailleur de fortune Hindu Kursh, il y avait là à l’origine trois bâtiments français et les sous-marins britanniques B9, B10 et B11.

Le détrois des Dardanelles est un bras de mer long d’environ 56 km; il permet d’accéder à la mer de Marmara, qui est encerclée par les terres et s’étend sur 160 km. Au fond se trouvait la capital de l’Empire ottoman, Constantinople, mais un sous-marin devait l’atteindre franchir le détroit, qui était puissamment défendu par des forts, des batteries et des projecteurs; ses eaux recelaient des courant imprévisibles pouvant atteindre 5 noeuds et elles étaient en outre semées de filets et de barrières de mines.

Le B 11 de Holbrook ouvrit la campagne des Dardanelles de remarquable façon: le 13 décembre. Il fut le premier sous-marin à pénétrer dans le détroit, où il navigua en plongée pour rester au-dessous du niveau des mines.

Quand la véritable campagne des Dardanelles commença, au début de l’année 1915, des bâtiments modernes de la classe E vinrent grossir la force sous-marine britannique. Les communications terrestres étant pratiquement inexistantes en Turquie, l’envoi de ravitaillement et de renforts sur le front allait en grande partie se faire par la mer de Marmara et il était vital de couper cette route. La première tentative pour forcer le détroit, effectuée par le E 15 fut un désastre: le sous-marin s’échoua près de Kephez, et fut finalement détruit après une incursion héroïque de vedettes appartenant aux cuirassés HMS Majestic et Triumph.

Le bâtiment australien AE 2 fut le premier à traverser le détroit, le 25 avril 1915, suivi dès le lendemain par le E 14 qui, profitant de l’obscurité, resta en surface pendant la majeure partie du trajet. Il fallait avoir les nerfs solides pour continuer malgré les projecteurs et les bombardements incessants des batteries turques.

Nasmith pénétra avec le sous-marin E 11 dans la Corne d’Or et torpilla un cargo. Le sous-marin accrocha un câble de mine qu’il remorqua sur une certaine distance. Après avoir donné quelques sueurs froides à l’équipage, le câble se libéra et le E 11 put s’échapper du détroit.

Quand la véritable campagne des Dardanelles commença, au début de l’année 1915, des bâtiments modernes de la classe E vinrent grossir la force sous-marine britannique. Les communications terrestres étant pratiquement inexistantes en Turquie, l’envoi de ravitaillement et de renforts sur le front allait en grande partie se faire par la mer de Marmara et il était vital de couper cette route. La première tentative pour forcer le détroit, effectuée par le E 15 fut un désastre: le sous-marin s’échoua près de Kephez, et fut finalement détruit après une incursion héroïque de vedettes appartenant aux cuirassés HMS Majestic et Triumph.

Le bâtiment australien AE 2 fut le premier à traverser le détroit, le 25 avril 1915, suivi dès le lendemain par le E 14 qui, profitant de l’obscurité, resta en surface pendant la majeure partie du trajet. Il fallait avoir les nerfs solides pour continuer malgré les projecteurs et les bombardements incessants des batteries turques.

 Les quais de Constantinople après que le sous-marin britanique E 11, commandé par Nasmith, ait pénétré dans le port et tiré une slave de torpilles qui coula un gros navire marchand et détruisit cette partie des docks Nasmith prit même le temps de faire une photo à travers le périscope pour que sa visite passe à la postérité.

Il ne resta plus alors dans la mer de Marmara que Nasmith, sur l’E11, mais il réussit, lors d’une patrouille de quarante-sept jours, à faire de tels dégâts qu’il fut récompensé par une promotion au grade de capitaine de vaisseau un an seulement après avoir été nommé capitaine de frégate. Au milieu du mois de décembre, il fut rejoint par le E 2 de Stock, qui fut le dernier bateau envoyé dans cette zone. La décision d’abandonner complètement la campagne des Dardanelles ayant alors été prise, Quand ce sous-marin redescendit le détroit, le 2 janvier 1916, certains des obstacles avaient déjà été enlevés et l’évacuation des troupes alliées était presque terminée.

Le E 11 revient de sa patrouille la plus fructueuse; le 8 août 1915, il a en effet coulé le cuirassé turc Heireddin Barbarossa (l’encien navire allemand de la classe Brandenburg Kurfürst Friedrich Wilhelm), qui avait eu une carrière active en tant que bâtiment amiral de la flotte ottomane conseillée par les Allemands.

Pour la perte de quatre bâtiments britanniques et de quatre français, tous ces courageux commandants avaient démontré que des sous-marins pouvaient mener une campagne efficace dans des eaux bien défendues. Ils avaient semé la confusion à terre et coulé deux cuirassés, six navires de flottille, trente-sept bâtiments de commerce et près de deux cents bateaux à voiles.

Le commandant du E 2 pose près de son canon après une patrouille dans la mer de Marmara. Le E 2 était à l’origine équipé d’une pièce de douze, mais il reçut à Malte un canon de 102 mm.

Le détroit recelait des courants dangereux, et les turcs y avaient mouillé de nombreuses mines; il était en outre puissamment défendu par des forts. Sur cette photo, l’équipage triomphant fête son retour.


10/05/2013
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